Chez les femmes immigrées et racisées, il y a aussi des femmes aînées et maltraitées!

6 juin 2016

Chez les femmes immigrées et racisées, il y a aussi des femmes aînées et maltraitées!

Source: 

Réseau d’action pour l’égalité des femmes immigrées et racisées du Québec (RAFIQ)

MÉMOIRE

 

Présenté par  le Réseau d’action pour l’égalité des femmes immigrées et racisées du Québec  (RAFIQ) au Secrétariat aux Aînés

 

Présentation de l'organisme

Le Réseau d’action pour l’égalité des femmes immigrées et racisées du Québec  (RAFIQ), est un Regroupement provincial, légalement constitue depuis 2012. La mission de l'organisme est de répondre aux besoins des femmes immigrées et racisées du Québec.  Le RAFIQ soutient des revendications des femmes en matière d'intégration socio-économique et promeut la mobilisation autour d’enjeux de défense de droits et de citoyenneté à part entière, des femmes immigrées et racisées dans une perspective féministe et de promotion de valeurs d'égalité entre les femmes et les hommes.

L'organisme, dont l'action est provinciale, compte des membres individuelles et de membres organisationnelles, tels le Comité Femmes de la Fédération des communautés culturelles de l'Estrie, l'Association des femmes immigrantes de l'Outaouais, etc.

Depuis un an, l'une des priorités du RAFIQ est celle d'identifier les besoins des aînées immigrées et racisées parce qu’elles sont difficiles à rejoindre du fait de leur méconnaissance du français ou de l'anglais et que les campagnes de sensibilisation pour lutter contre la maltraitance et l'âgisme ne peuvent pas forcément les cibler adéquatement.

Dans ce contexte, nous vous présentons aujourd'hui,  quelques éléments qui nous interpellent en rapport à la maltraitances que subissent des femmes immigrantes au Québec, d'une part, et d'autre part, les possibles avenues pour améliorer cet état de choses.

 

Statut d'immigration, conditions socio-économique et maltraitance  [1]

Peu d'études se sont penchées sur les conditions de femmes aînées habitants au Québec et nées à l'extérieur du Canada, il ne s'agit pas seulement avec des femmes ayant un statut d'immigration légal, mais aussi d’aînées en attente de statut, dont les revenus sont très bas ou inexistants.  Elles n'ont pas vieilli au Québec, elles sont arrivés déjà âgées et pour des raisons diverses : réunification des familles, catastrophes naturelles, guerres interethniques ou religieuses, entre autres. Ce n'est pas pour elles une question de choix, c'est parfois une question de survie. Ce sont des aînées originaires principalement de pays en voie développement.

Dans leur pays, ces femmes aînées jouissaient d'un statut socio-économique, elles étaient agricultrices, commerçantes, sages-femmes, etc. Elles ont l'expérience de la vie et de la famille, et elles étaient aussi gardiennes de valeurs et de traditions. Une fois arrivées au Québec dans la famille de leurs enfants, elles sont devenues progressivement isolées et vivent différents types de maltraitances.

Pour plusieurs d'entre-elles, arrivées avec le statut de parrainée, se retrouvent dépendantes du parrain (fils ou fille). D'autres, ont obtenu le statut de réfugié ou la résidence pour des raisons humanitaires. Une fois arrivées chez leurs enfants, elles doivent s'occuper des petits enfants, de faire le ménage et de préparer les repas.  Rarement, elles auront la possibilité de quitter la maison, d'apprendre le français ou de rencontrer d'autres personnes. Ces femmes se retrouvent complètement dépendantes économiquement et isolées socialement. C'est l'un de groupes le plus vulnérables de la société québécoise et cette condition favorise la maltraitance.

Nous avons été mises au courant des cas des familles immigrantes latinos et des Caraïbes qui ont obtenu des frais de garde du gouvernement, sans que les grand-mères ne puissent toucher même pas une partie de l'argent reçu. D'autres qui ont tiré profit des aînées dans les services de garde en milieu familial ou dans les commerces.

D'autres cas des femmes aînées réfugiées ou immigrantes ayant le droit à l'aide sociale, n'ont jamais vu la couleur de leur argent, sous prétexte que leurs enfants leur donnaient un toit et de la nourriture.

D'ailleurs, le manque d'argent, l'enfermement dans la maison de leurs enfants, fait en sorte que l'isolement ne leur permet pas d'apprendre le français, ni de côtoyer d'autres personnes de la même origine ou d'une autre origine.

 

Stratégies pour aider les aînées immigrées et racisées à prendre conscience de leurs droits comme citoyennes à part entière

S'il est difficile de rejoindre les aînées immigrées de communautés culturelles, ce n'est pas impossible. Dans tous les cas pour le RAFIQ, c'est à travers des organismes communautaires qui offrent des services aux personnes immigrantes qu'il a été possible de les joindre.  Le RAFIQ a organisé l’année dernière, des entrevues individuelles et de groupe avec ces femmes, qui se sont déroulés dans leur langue maternelle. À la suite des résultats de ces rencontres, le RAFIQ suggère plusieurs recommandations. 

 

Recommandations :

                1 - Offrir des cours de français adaptés aux conditions d'apprentissage des ainées.  Cela leur donnera la possibilité de mieux comprendre la société d'accueil. C'est un premier pas vers l'empowerment des aînées immigrées et racisées. 

                2 -Financer les initiatives des organismes communautaires comme le RAFIQ, afin de développer des outils qui permettent aux aînées immigrées des communautés culturelles de reconnaitre des événements de maltraitance envers elles et de les dénoncer.  Nous allons organiser, les prochains mois, deux ateliers sur la thématique de la maltraitance des femmes aînées immigrées afin de renforcer les liens entre les femmes  et trouver, avec l'aide d’autres organismes des moyens de favoriser leur implication dans des activités sociales, sportives, culturelles et même économiques, afin qu’elles deviennent des citoyennes à part entière de la société québécoise.

                3 - Motiver ces femmes aînées immigrées de diverses communautés culturelles, à produire elles-mêmes et participer à des campagnes publicitaires pour contrer la maltraitance et promouvoir la bientraitance des aînés issus de l'immigration, toute en favorisant  l'égalité hommes-femmes.

 

En somme, nous suggérons que le Gouvernement du Québec, tienne compte des femmes immigrées aînées et finance des initiatives qui vont dans le sens de l'égalité et de la participation citoyenne de ces femmes. Les organismes communautaires comme le RAFIQ sont au cœur de l'action avec les femmes vulnérables. 

 

À Montréal, le 16 mai 2016



[1] À partir de documents produits par

 Garreaud, Ludmila (2016) Rapport d'activités d'une expérience auprès des aînés haïtiennes Collaboration Rafiq et Maison d'Haiti.

 

Montejo, M.E.« Les aînées issues des communautés culturelles : qui sont-elles ? » in L’autonomie économique des femmes : Citoyennes à part entière pour toute la vie CD-ROM Fédération de Femmes du Québec 2010. http://www.ffq.qc.ca/2010/09/citoyennes-a-part-entiere-pour-toute-la-vie/

Lavoie, J.P.,  Guberman, N., Battaglini,  A.,  Belleau, H., Brotman, S., Montejo, M.E., Hallouche, K., « Prendre soin en contexte d’immigration récente. Les limites aux solidarités familiales à l’égard des membres de la famille avec incapacités » Enfances, familles, générations. 2007 http://www.erudit.org/revue/efg/2007/v/n6/016484ar.html