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Agir contre les violences patriarcales

« Nouvelles questions féministes » 43/2 2024

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Publié le mercredi 16 novembre 2022

Résumé

La dénonciation des violences masculines a toujours accompagné le mouvement des femmes. Depuis les années 1970, l’alliance entre associations, chercheuses et représentantes institutionnelles féministes a été le point de départ d’un travail considérable de diffusion des savoirs féministes sur ces violences vers les personnes intervenant auprès des victimes (travail social, santé, police, justice), mais aussi vers la société civile (médias, syndicats, entreprises, etc.) et les pouvoirs publics. Quarante ans plus tard, le courage de nombreuses victimes ayant dénoncé la violence d’hommes de pouvoir a fait émerger une réflexion collective, dépassant largement le seul cadre du militantisme féministe. Cet appel cherche à recueillir des articles éclairant un ou plusieurs des axes proposés : agir pénalement et administrativement, prendre en charge l’accompagnement des victimes, agir dans le futur.

Annonce

Argumentaire

La dénonciation des violences masculines a toujours accompagné le mouvement des femmes. Depuis les années 1970, l’alliance entre associations, chercheuses et représentantes institutionnelles féministes a été le point de départ d’un travail considérable de diffusion des savoirs féministes sur ces violences vers les personnes intervenant auprès des victimes (travail social, santé, police, justice), mais aussi vers la société civile (médias, syndicats, entreprises, etc.) et les pouvoirs publics. Quarante ans plus tard, le courage de nombreuses victimes ayant dénoncé la violence d’hommes de pouvoir a fait émerger une réflexion collective, dépassant largement le seul cadre du militantisme féministe. Ces affaires médiatisées à une échelle internationale (l’affaire DSK en 2012, mettant en cause un homme politique de gauche, puis l’affaire Weinstein dans l’univers du cinéma) ont lancé le mouvement #MeToo, et son flot de témoignages sur les réseaux sociaux, ainsi qu’une multiplication de prises de parole de victimes et aussi de leur famille. Dans ce contexte favorable, le mouvement féministe est parvenu à organiser de fortes mobilisations nationales et internationales de dénonciation des violences masculines commises contre les femmes et à exercer des pressions fortes sur les pouvoirs politiques. Elles ont mis au jour leur inaction ainsi que l’inefficacité des dispositifs existants pour accompagner les victimes et éradiquer les violences sexistes et sexuelles. Face à l’injonction récurrente à déposer plainte, qui fonctionne comme une pression à se taire pour celles qui hésiteraient, le mouvement féministe a mené une analyse critique très poussée des dysfonctionnements des institutions policières, judiciaires, médicales, ou encore de l’accompagnement social relativement aux besoins des victimes. Une interrogation forte se fait également jour sur la réponse à apporter aux agresseurs.

Axe 1 : Agir pénalement et administrativement

Le contexte récent renouvelle les enjeux de la prise en charge. Faut-il : inclure la notion de féminicide dans le Code pénal ? Revoir la définition de la légitime défense au regard des questions posées par les cas de meurtre des femmes violentées pendant des années par leur mari violent ? Redéfinir le viol en inscrivant le consentement dans le Code pénal ? Penser les violences spécifiques sur les mineur·e·s ? Les innovations juridiques se multiplient d’un pays à l’autre. Plusieurs pays d’Amérique du Sud, en ayant inscrit le féminicide dans leur législation, intriguent les spécialistes du droit en Europe et ailleurs. L’Espagne s’illustre depuis une vingtaine d’années par une politique volontariste de transformation et de renforcement de sa législation contre les violences commises à l’encontre des femmes, et tout récemment avec la loi d’août 2022, dite « loi de garantie intégrale de la liberté sexuelle », stipulant l’obligation d’un consentement explicite. Du côté de la protection des victimes, on a pu voir des innovations technologiques se mettre en place, comme le bracelet anti-rapprochement, le téléphone grave danger, ou encore des algorithmes permettant de calculer les risques de féminicides en fonction du parcours des victimes (système espagnol de suivi des victimes VioGén). L’utilisation croissante de ces moyens techniques – qui semble avoir la préférence des gouvernements comme en témoignent les suites du Grenelle des violences conjugales de 2019 en France – au détriment de moyens préventifs (comme l’éducation à la sexualité) doit être questionnée. Le constat est fait de l’inadéquation des dispositifs juridiques existants. La lenteur de la justice, le manque de formation, la définition des missions de la police comme de la justice sont posées en même temps que la dénonciation d’un fonctionnement patriarcal de ces instances. Parallèlement, une partie du mouvement féministe, s’inspirant de l’abolitionnisme carcéral et des critiques formulées sur le système pénal par d’autres mouvements sociaux (antiraciste et LGBT notamment), s’interroge plus globalement sur l’intérêt du recours au droit et de la sanction pénale. Face à ces critiques, quel autre système de gestion et régulation de ces situations de violence peut-on mettre en place ? Les essais d’instauration d’une « justice restaurative » apportent-ils satisfaction ?

Axe 2 : Prendre en charge l’accompagnement des victimes

Les violences conjugales et les violences sexuelles n'ont pas toujours été reconnues comme une question légitime et les conditions de prise en charge de ces violences spécifiques contre les femmes diffèrent selon les pays. Elles sont tantôt abordées comme un problème de délinquance à judiciariser, tantôt comme un problème social appelant l’intervention d’autres acteurs·trices, comme les travailleuses sociales ou encore le corps médical. Le besoin d’identifier les évolutions et la diversité des modes de prise en charge associatifs et institutionnels, ainsi que les perspectives théoriques et politiques qui les sous-tendent se fait sentir. On peut se demander quelle place les militantes féministes occupent aujourd'hui dans la prise en charge de ces violences. Diverses associations et collectifs développent des lieux d'accueil et de prise en charge. Plusieurs recherches montrent que le travail social a constitué un outil indéniable de légitimation sociale et politique de la cause. Toutefois, cette institutionnalisation a tendance à uniformiser les modalités d'action et à négliger les lectures féministes de ces violences. On peut se demander comment le développement de formations féministes et aux questions de genre auprès des professionnel·le·s de police, de l'enseignement, du travail social et sanitaire participe à transformer les métiers, à revisiter les pratiques professionnelles, mais aussi à modifier les définitions et les analystes féministes de ces violences. Enfin, on pourra évoquer les évolutions en matière de prises en charge thérapeutiques, qu’il s’agisse de s'intéresser à l’émergence de thérapies alternatives (comme l’art-thérapie, l’EMDR, etc.), de poursuivre la critique des formes classiques de soins (par exemple, des soins psychanalytiques ou psychiatriques), ou encore des dispositifs de détection des victimes et de signalement de leur situation par le corps médical.

Axe 3 : Comment agir dans le futur ?

Comment instaurer un rapport de force politique et un mouvement social assez puissant pour atteindre l’objectif d’une société sans violences contre les femmes ? Quels militantismes féministes (modes d’action, théories, organisations) avons-nous forgés dans la lutte contre les violences ? Quelle sémantique faut-il préférer et élaborer pour nommer les violences (violences machistes, de genre, sexistes et sexuelles, misogynes, etc.), dans un contexte où le langage est peu satisfaisant pour nommer les actes (« baisers/caresses forcées », par exemple) ? Il s’agit de s’interroger sur les modalités de la poursuite des mobilisations féministes contre les violences tout en questionnant les limites des stratégies militantes contemporaines, et la pertinence tant de leurs approches théoriques que de leurs modes d’action et d’organisation. Face au backslash et aux contre-offensives patriarcales, parfois violentes, nos militantismes peuvent-ils élaborer des pratiques plus protectrices pour les militantes, peut-être moins visibles, comme les whisper networks, ou réclamer l’éducation massive de la population ? Dans cette perspective, quel statut donner à l’autodéfense féministe ? Des mouvements de dénonciation des violences sexuelles et des crimes que sont les viols ont émergé spontanément. Ils apparaissent récurrents, collectifs, multiples, diffusant surtout sur les réseaux sociaux (#BalanceTonPorc, #MeToo), mais prenant aussi d’autres formes d’organisations comme les collectifs de collage, les conférences gesticulées et le théâtre-forum. Saisir la genèse des actions collectives, les emprunts de pratiques à d’autres mouvements sociaux, les réactions qu’elles suscitent, les effets qu’elles produisent est nécessaire pour poursuivre ces luttes.

Cet appel cherche à recueillir des articles éclairant un ou plusieurs des axes proposés et portant sur un ou divers contextes nationaux.

Coordination du numéro

  • Véronique Bayer - Institut de recherche et de formation de l’action sociale de l’Essonne, France
  • Sigolène Couchot-Schiex - CY Cergy Paris Université, France
  • Margot Giacinti – École normale supérieure de Lyon, France
  • Christelle Hamel - Institut national d'études démographiques, France
  • Marta Roca i Escoda – Université de Lausanne, Suisse

Modalités de soumission

Les propositions d’articles de deux pages sont attendues en format Word, envoyées par mail à veronique.bayer@irfase.com et christelle.hamel@ined.fr  

pour 15 février 2023.

La 1ère version des articles retenus devra être soumise au groupe de coordination de NQF d’ici le 15 septembre 2023, dans un format conforme aux consignes consultables sur le site de Nouvelles Questions Féministes. Le numéro sortira en septembre 2024.

Modalités pratiques d’évaluation des propositions

Le groupe de coordination communiquera aux auteur·e·s l’acceptation ou le refus de leurs propositions au plus tard en avril 2023. Toute proposition d’article est soumise à l’avis du Comité de rédaction de la revue.

Les articles accompagnés d’un résumé en français sont attendus pour le 1er février 2022.

Les articles anonymisés font l’objet d’une double évaluation par des pair·e·s. Les expertises sont anonymes. L’article peut être accepté en l’état, refusé, ou accepté sous réserve de modifications. Dans ce cas, le groupe de coordination prend contact avec l’auteur·e pour suggérer des axes de retravail.


Dates

  • mercredi 15 février 2023

Mots-clés

  • violence, féminisme, metoo, genre

Contacts

  • Christelle Hamel
    courriel : christelle [dot] hamel [at] ined [dot] fr
  • Véronique Bayer
    courriel : veronique [dot] bayer [at] irfase [dot] com

URLS de référence

Source de l'information

  • Revue NQF
    courriel : nqf_redaction [at] hetsl [dot] ch

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Agir contre les violences patriarcales », Appel à contribution, Calenda, Publié le mercredi 16 novembre 2022, https://doi.org/10.58079/19xs

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