AFRIQUE : Développer une protection plus forte contre les violences basées sur le genre
AFRIQUE: Développer une protection plus forte contre les violences basées sur le genre
Joyce Mulama
Disponible sur le site d'IPS : http://www.ipsinternational.org/fr/_note.asp?idnews=5313
NAIROBI, 28 avr (IPS) - Quand des chefs de districts qualifient les efforts pour lutter contre les violences sexuelles comme un gaspillage de ressources, cela suscite des questions sur l’engagement des dirigeants de régler le problème.
Telle est la situation au nord de l’Ouganda où des commissaires ont rejeté les violences sexuelles et les violences basées sur le genre (SGBV) comme inexistantes, demandant que les fonds des donateurs pour l’appui psychologique aux victimes des SGBV soient orientés vers d’autres secteurs.
« Ils disent que nous gaspillons de l’argent et qu’il devrait aller plutôt vers la construction des routes, des écoles détruites au cours de la guerre. Ceux-ci sont des représentants du gouvernement dans les districts. Ce qu’ils nous disent est que les SGBV ne sont pas importantes, alors que des femmes et des filles ont été gravement affectées par la guerre", a déclaré à IPS, Betty Akulu du Réseau pour le développement de la femme et le développement rural (WORUDNET) dans le district de Pader, au nord de l’Ouganda.
Pader est l’un des districts les plus gravement touchés par le conflit qui a duré 20 ans entre les forces gouvernementales et les rebelles de l’Armée de résistance du seigneur (LRA), où des forces des deux côtés ont été accusées de nombreuses atrocités contre des civiles. Des femmes et des filles ont été battues, violées et mutilées. « Vous trouvez beaucoup d’entre elles avec leurs bouches et leurs membres coupés, et même les yeux arrachés », a indiqué Akulu.
Bien que des chiffres définitifs sur le nombre des violations n’aient pas été collectés, Human Rights Watch déclare que les abus étaient répandus, notamment lorsque la guerre a atteint son comble, et se poursuivent même après que la guerre a baissé dans les années récentes.
Un programme régional visant à élaborer des voies pour aborder conjointement les violences de genre dans les situations conflictuelles et post-conflictuelles, dans cinq pays, a été lancé par l’Agence de coopération et de recherche pour le développement (ACORD).
Le Programme régional sur le genre cible cinq pays y compris la République démocratique du Congo (RDC), le Burundi, le Kenya, l’Ouganda et le Rwanda. Des experts de la question de genre et des droits humains, venus de ces pays, se sont réunis à Nairobi au début du mois sous le thème : « Les crimes de guerre cachés : défier l’impunité pour les violences sexuelles et les violences basées sur le genre dans la Région des grands lacs » en vue d’explorer les voies pour corriger les lacunes dans la lutte contre les SGBV dans la région.
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Le viol en RDC est puni pour un maximum de 20 ans d’emprisonnement, et si la victime meurt du fait de ce crime, il devient un crime capital. Mais Bimansha, qui est également la présidente de l’Association nationale des femmes juristes de la RDC, a indiqué qu’à cause du manque de fonds pour des enquêtes et par conséquent le manque de preuves de leur part, peu de cas sont déclarés coupables et condamnés. Pire encore, les auteurs sont déclarés coupables de chefs d’accusation moindres.
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En plus de l’échec du système judiciaire à protéger les femmes, les victimes de viol bénéficient d’une faible assistance de la part du système de santé. Nombre de centres de santé publique dans le pays sont mal équipés en Prophylaxie post-exposition (PEP), un traitement anti-rétroviral à court terme qui réduit la possibilité de l’infection au VIH après une exposition potentielle à la maladie. Ceci en dépit de l’exigence de l’Organisation mondiale de la santé que les pays assurent que la PEP constitue une partie d’un plan global de la fourniture des services de santé.
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L’initiative de l’ACORD vise également un changement à la base. Un programme appelé « Agents of Change » (Agents du changement) se concentre sur la transformation des attitudes culturelles au Burundi.
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« La lutte contre les SGBV commence par le changement des attitudes au niveau du ménage. Vous commencez par dire à vos propres enfants dès le jeune âge que la femme et l’homme, les filles et les garçons méritent du respect. Et cet enseignement sera en eux pour toujours », a souligné Nyamarushwa, qui est actuellement avec l’ACORD -Burundi.
Le programme des Agents du changement, actuellement un projet-pilote dans cinq provinces du Burundi, implique des couples qui sont formés pour faire passer des messages anti-SGBV à leurs ménages, chaque couple essayant d’atteindre au moins 10 couples, qui vont à leur tour agir comme des « agents du changement » pour 10 autres couples au sein de la famille étendue, faisant passer un message contre les violences de genre à travers la communauté dans son ensemble.
En conformité avec toute l’intention de l’ACORD avec le Programme régional sur le genre, le projet des agents enquête également sur les pratiques culturelles spécifiques qui font la promotion des violences de genre.
En collectant des données détaillées et en menant une recherche sur les SGBV dans ces cinq pays, l’ACORD espère mettre fin à l’impunité pour les crimes basés sur le genre et renforcer la protection des femmes et des filles aux niveaux local, national et régional.
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Source : IPS http://www.ipsinternational.org/fr/_note.asp?idnews=5313