Appel à contributions - Recherches participatives
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Nouvelles pratiqes sociales
VOL. 25, No2 (PRINTEMPS 2013)
Dossier : Recherches participatives
Responsables : Jean-François René, Manon Champagne et Suzanne Mongeau
Depuis quelques décennies, la recherche sociale est dominée par un modèle qui semble de plus en plus imposer sa voie et sa vérité, celui des données probantes, des Evidence-Based Practice. Cʼest ce type de recherches qui a la cote auprès de nombreux décideurs, désireux de mieux gérer les risques sociaux, voire même de les prévenir, tout en espérant ainsi rationaliser les coûts et hausser lʼefficience de leurs politiques, programmes et interventions.
Parallèlement, la recherche en général semble de moins en moins la prérogative des scientifiques, des universitaires et des chercheurs. Dʼimportants mouvements sociaux en interrogent explicitement les enjeux et les finalités. Émerge alors une préoccupation croissante pour la participation des personnes aux recherches qui les concernent. Dʼune part parce quʼen excluant les principaux intéressés, lʼon se coupe de savoirs essentiels à la résolution de problèmes sociaux et de santé. Dʼautre part, parce la recherche construite sur un modèle biomédical soulève des questionnements éthiques majeurs, conséquence des effets du ciblage (étiquettes, stigmates, discrimination, marginalisation).
Dans un tel contexte, doit-on se surprendre de lʼintérêt grandissant pour la recherche dite participative? Dans des sociétés où la démocratie représentative apparait de plus en plus minée et en perte de crédibilité, de nombreux États et institutions sont en quête dʼune participation plus active du citoyen ou de lʼusager. En outre, la demande de participation va grandissante face à de nombreux enjeux de société (ex. gaz de schiste). La recherche ne fait pas exception à ce phénomène. On peut penser par exemple à la tradition occidentale de la recherche-action; à la recherche émancipatrice liée aux luttes de libération au Sud comme au Nord; à la recherche partenariale; puis, plus récemment, à lʼévaluation participative et dʼempowerment ainsi quʼaux recherches favorisant le croisement des savoirs entre chercheurs et participants.
Toutefois, le label « participatif » ne présume en rien du niveau de participation recherché et réel, et dʼune possible instrumentalisation de la participation.
Cet appel de contributions propose de se pencher sur la recherche participative dont les finalités visent à soutenir le développement démocratique des pratiques sociales. Ce type de recherches nous semble balisé par un certain nombre de finalités :
- Être centrées sur les besoins et les intérêts des personnes et des communautés qui ne disposent pas des ressources pour entamer par eux-mêmes un processus de recherche;
- Favoriser la rencontre et le croisement des savoirs en donnant une place et un pouvoir aux participants aux différentes étapes du processus de recherche;
- Faciliter lʼémergence de savoirs peu connus, plus expérientiels et dʼaction, et soutenir la production de ces nouveaux savoirs;
- Permettre aux groupes et aux communautés de sʼapproprier, partager, discuter et disséminer les résultats, notamment afin dʼêtre en mesure de modifier eux-mêmes leurs pratiques.
Afin dʼatteindre ces finalités, il va de soi que les rapports entre les chercheurs et les participants seront modifiés. Dans certains cas, les participants vont accompagner la démarche, tandis que dans dʼautres études, les participants deviennent eux-mêmes des co-chercheurs. Ce changement dans les rapports renvoie à un certain nombre de facteurs facilitant la réalisation de telles recherches. Ces facteurs peuvent être vus comme des enjeux, car ils sont parfois difficiles à mettre en oeuvre : disposer du temps et des ressources humaines nécessaires; adapter son mode de fonctionnement aux parties en présence, qui sont de cultures distinctes dans bien des situations; apprendre à modifier le calendrier et le rythme de lʼétude en fonction de cette participation; établir un climat de confiance nécessaire à un contexte de recherche qui exige beaucoup de chaque partie en présence.
Un certain nombre de questionnements émergent et pourraient être couverts dans ce numéro :
- Quels sont les traditions et les courants de recherche qui aspirent à favoriser une réelle participation des personnes concernées?
- À quelles conditions une plus grande participation à la recherche peut-elle générer une plus grande démocratisation des pratiques?
- Dans de telles études, comment soutenir une réelle appropriation par les participants des objectifs, des méthodologies et du processus même de recherche?
- De quelles manières de telles recherches peuvent-elles interpeler la communauté scientifique, les décideurs et les intervenants?
- De quelle façon la recherche participative peut-elle sʼinscrire dans les finalités actuelles de lʼintervention sociale?
Les manuscrits doivent être soumis avant le 15 avril 2012 par courrier électronique à Nouvelles pratiques sociales (nps@uqam.ca).