Une retraite décente pour tout le monde - manifeste soumis au rassemblement du 4 avril 2012

Une retraite décente pour tout le monde - manifeste soumis au rassemblement du 4 avril 2012

NOTRE ANALYSE : UNE INSÉCURITÉ QUI SE GÉNÉRALISE

Nous, les groupes sociaux et les citoyen.ne.s signataires de ce manifeste, avons décidé de nous élever ensemble contre les menaces que les gouvernements font peser sur les régimes publics de retraite. Nous rejetons l'option de l'épargne individuelle qui sert surtout les intérêts des institutions financières tout en faisant porter l'ensemble du risque et le poids des crises financières par les épargnant-e-s et les personnes à la retraite. Pour nous, la notion d'équité intergénérationnelle signifie que les jeunes, autant que les personnes proches de la retraite et celles qui sont déjà à la retraite, ont droit à une retraite décente, garantie et indexée ainsi qu'à une utilisation efficiente de leurs épargnes.

Les régimes publics fonctionnent bien mais sont insuffisants

La Pension de la sécurité de la vieillesse (PSV), combinée au Supplément de revenu garanti (SRG), offre un revenu minimum garanti de 15 270$ pour une personne seule et de 24 618$ pour un couple à toutes les personnes qui ont résidé au Canada pendant un certain nombre d'années. Toutefois, ce revenu minimum est inférieur au seuil de faible revenu de Statistique Canada (environ 23 760$ pour une personne et 29 580$ pour deux personnes en 2012). Et il semble que ce serait déjà trop, puisque le gouvernement Harper a annoncé son intention de hausser l'âge d'accès à la PSV et au SRV de 65 à 67 ans!

Le Régime de rentes du Québec (RRQ) assure une couverture universelle pour les personnes qui exercent un emploi rémunéré. Il est bien géré et ses frais de gestion sont de l'ordre de 0,6 %. Néanmoins, il remplace moins de 25% du revenu d'avant la retraite et ne permet pas à la classe moyenne de maintenir son niveau de vie. En 2010, la rente moyenne pour un homme était de seulement 6 523 $ par année tandis qu’une femme recevait 35% de moins, soit 4 210 $. La rente maximale en 2012 pour une personne qui aurait cotisé au maximum toute sa vie et pris sa retraite à 65 ans est seulement de 11 840 $ ! Une personne seule qui aurait droit aux prestations maximales des régimes publics devra se débrouiller avec un revenu annuel de 20 583 $, soit 41% de son revenu d'avant la retraite.
 
Une érosion des régimes complémentaires de retraite

De moins en moins de travailleuses et de travailleurs peuvent compter sur un régime complémentaire à prestations déterminées, surtout dans le secteur privé. Les employeurs cherchent à se départir de leur obligation d'aider leurs employés à préparer la retraite, fermant les meilleurs régimes à la faveur de diverses formes de régimes à cotisation déterminée (y inclus des REER collectifs et bientôt des régimes à prestations cibles) qui transfèrent tout le risque aux participantes et participants et aux personnes déjà à la retraite.

Les RVER, tout comme les REER : des fausses solutions

Actuellement, plus de 60% des 14 milliards de dollars d'avantages fiscaux accordés par le fédéral (et une proportion équivalente des dépenses provinciales) pour les Régimes enregistrés d'épargne retraite (REER) vont au 10% des contribuables les mieux nantis. Les frais de gestion de ces régimes sont parmi les plus élevés au monde et, selon un rapport de l'OCDE, les institutions financières accaparent 37% de la valeur des actifs accumulés dans les REER.

Les deux paliers de gouvernement s'apprêtent à adopter des lois pour mettre en place des Régimes volontaires d'épargne retraite (RVER) pour encourager les gens à épargner davantage en les inscrivant automatiquement. Toutefois, les employeurs n'auront aucune obligation de contribuer à ces régimes tout en choisissant seuls l’institution financière qui gérera les fonds. La réduction des frais de gestion risque d'être minime et cette approche ne garantit en rien un revenu adéquat, ni même prévisible, à la retraite.

Reconnaître le travail non rémunéré des femmes

Comme c'est le cas avant la retraite, les femmes sont, beaucoup plus souvent que les hommes, pauvres à la retraite. À l'intérieur du RRQ, certaines mesures telles le droit d'exclure les années à faible revenu passées avec des enfants de moins de sept ans, les rentes de conjoint survivant et le partage des crédits de pension en cas de divorce compensent en partie le travail non rémunéré effectué par les femmes au sein de la famille. Les rentes de conjoint survivant offertes obligatoirement dans les régimes complémentaires de retraite offrent aussi une certaine compensation. Toutefois, les REER et les régimes à cotisation déterminée offrent le moins de protection aux femmes, outre le droit, dans certains cas, d'hériter du solde du compte lors du décès du conjoint et le droit de partage des actifs lors d'un divorce (pour les femmes mariées mais rarement pour les conjointes de fait). Ce sont les mères monoparentales qui bénéficient le moins de ces mesures à la retraite.

Nos demandes

Nous, les groupes sociaux et les citoyen.ne.s signataires de ce manifeste, rejetons les fausses solutions comme le RVER et l’affaiblissement de la Pension de la sécurité de la vieillesse ou du Supplément de revenu garanti.

Nous, les groupes sociaux et les citoyen.ne.s signataires de ce manifeste, demandons au gouvernement du Québec de mettre sur pied un comité de travail composé par le gouvernement et la société civile (groupes de femmes, de jeunes et de retraité.e.s, syndicats et patronat) pour étudier l’ensemble des moyens à mettre en place afin d’assurer une retraite décente pour toutes et tous, y compris la possibilité d’améliorer les régimes publics.

Nous, les groupes sociaux et les citoyen.ne.s signataires de ce manifeste, demandons que le gouvernement québécois, comme déjà sept gouvernements provinciaux, s’ouvre à une amélioration du régime public (Régime de rentes du Québec et Régime de pensions du Canada sur le reste du territoire) et qu'il défende activement cette position à la prochaine conférence fédérale-provinciale des ministres des Finances à l'été 2012.

Nous, les groupes sociaux et les citoyen.ne.s signataires de ce manifeste, allons exiger de tous les partis politiques et de toutes les candidates et tous les candidats qui se présentent aux prochaines élections de se prononcer clairement sur les moyens pour offrir Une retraite décente pour tout le monde.

Nous, les groupes sociaux et les citoyen.ne.s signataires de ce manifeste, nous engageons à diffuser l’information sur les enjeux autour de la retraite et à soumettre les demandes suivantes [1] à nos membres ou à nos milieux:

  • Faire passer le taux de remplacement du Régime de rentes du Québec de 25 à 50% du revenu gagné et augmenter le plafond du revenu couvert de 50 100 $ à 66 000 $, (même plafond que pour la CSST ou le RQAP). Cette amélioration progressive, qui sera capitalisée, nécessitera une hausse du taux de cotisation salariale et patronale d'environ 3%. Afin d’atténuer l’impact pour les bas salariés, faire passer l’exemption sur les cotisations annuelles de 3 500 $ à 7 000 $.
  • Augmenter immédiatement le Supplément de revenu garanti d’au moins 15 %. Rendre automatique l’inscription à la Pension de sécurité de vieillesse et au Supplément de revenu garanti et verser la pleine rétroactivité payable à une personne qui ne les a pas reçus alors qu’elle y avait droit. De plus, nous nous opposons à toute coupure à la Pension de sécurité de vieillesse, qu’il s’agisse d’un relèvement de l’âge d’admissibilité ou d’une remise en question de son caractère universel.
  • Amender la Loi fédérale sur les faillites pour qu'une caisse de retraite soit un créancier prioritaire en cas de faillite afin de mettre fin à des scandales comme ceux de Nortel et White Birch. Et assurer un meilleur financement des régimes complémentaires de retraite et une surveillance accrue de la Régie des rentes du Québec.

Les signataires du manifeste pour une retraite décente pour tout le monde au 4 Avril 2012

Fédération des femmes du Québec (FFQ)
Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail (CIAFT)
Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ)
Association québécoise de défense des droits des personnes aînées (AQDR)
L'Association des clubs de femmes du Québec (BPW Québec)
Réseau FADOQ
Carrefour de participation, ressourcement et formation (CPRF)
Collectif pour un Québec sans pauvreté
Association pour la taxation des transactions financières pour l'aide aux citoyens (ATTAC – Québec)
Université du troisième âge MRC de l'Assomption (UTA MRC l'Assomption)
Regroupement des aidantes et aidants naturels de Montréal (RAM)
Projet changement – Centre communautaire pour aînés

1 Ces demandes viennent de la campagne « Une retraite à l’abri des soucis » de la FTQ. Pour consulter le nom des groupes qui adhèrent déjà aux trois demandes ou pour ajouter le nom de votre organisation, contacter la FTQ (http://ftq.qc.ca/campagneretraite).