Entretien - Les inégalités de retraite entre les hommes et les femmes en France

Entretien - Les inégalités de retraite entre les hommes et les femmes en France

Source: 

Marie-Thérèse Lanquetin, Revue de la CFDT

Un entretien avec Marie-Thérèse Lanquetin, juriste, chercheure à l’Institut de recherches et d’études juridiques sur les relations professionnelles (IRERP) de l’université Paris X Nanterre, publié dans le no 107 de la Revue de la CFDT, mars 2012

Pourquoi avez-vous décidé d’orienter votre travail de juriste vers le droit communautaire à propos des inégalités de pensions entre hommes et femmes?

La question s’est posée à propos des retraites des fonctionnaires. Le droit communautaire a considéré que ce régime de retraite était un régime professionnel de Sécurité sociale et que les retraites servies étaient des « rémunérations » au sens du Traité impliquant l’égalité entre fonctionnaires masculins et féminins.

Il pouvait sembler cohérent de compenser les retraites des mères par des bonifications mais en même temps cela confortait la répartition des rôles entre hommes et femmes concernant l’éducation des enfants. C’est au cours de la vie professionnelle et de sa conciliation avec la vie familiale que des mesures doivent être prises.

La question s’est posée également concernant les majorations pour enfant accordées aux mères dans le régime général de Sécurité sociale. Et la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme apportait une réponse plus égalitaire entre hommes et femmes. 

Or, sur ces questions, alors que le droit européen s’impose à la France, celle-ci répond de façon contrainte et forcée privilégiant sa conception de l’égalité entre hommes et femmes, confortant son modèle de politique familiale. Celui-ci est ancien, constitué de dispositifs qui se sont empilés, avec des objectifs qui ont quelque peu évolué mais qui, sous couvert de « libre choix », privilégient une conciliation pour les mères. La France n’a pas pris la mesure de ce qu’impliquait le passage à un modèle égalitaire.

Les États membres savent qu’ils doivent repenser leur droit national sur cette question. Le Royaume-Uni, par exemple, a prévu une application progressive d’ici 2015 de l’égalité entre les hommes et les femmes en matière de Sécurité sociale.

En revanche, la France privilégie l’égalité formelle et, au-delà, il s’agirait de protéger les mères au nom de la préservation du taux de fécondité. Celui-ci reste très présent dans l’esprit des responsables politiques.

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