Déclaration du 2e Forum mondial des femmes francophones

Déclaration du 2e Forum mondial des femmes francophones

Nous, Femmes Francophones,

Réunies à Kinshasa les 3 et 4 mars 2014, dans le cadre du 2ème Forum mondial des femmes francophones, à l’invitation du gouvernement de la République démocratique du Congo, à l’initiative de la République française et avec le soutien de l’Organisation internationale de la Francophonie;

Profondément attachées aux valeurs universelles que les États et gouvernements francophones ont en partage, au premier rang desquelles le respect de la dignité humaine, des droits humains et de l’égalité entre les femmes et les hommes;

Nous fondant sur les engagements pris dans le cadre de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discriminations à l’égard des femmes, le programme d’action de Beijing ainsi que les Déclarations francophones de Luxembourg, Bamako et Saint-Boniface;

Déterminées à accélérer le mouvement mondial pour les droits des femmes et l’égalité femmes-hommes par des actions concrètes visant un changement radical des mentalités et l’élimination des préjugés à l’égard des femmes;

Reconnaissant que la paix, en tant que préalable des préalables, doit être construite, cultivée, protégée, et que les femmes doivent y prendre toute leur part, au même titre que les hommes;

Considérant la pleine participation économique, sociale et politique des femmes à tous niveaux de responsabilité comme un atout pour relever les défis du développement ;

Convaincues du rôle déterminant de l’éducation sur la condition des femmes et des hommes ainsi que sur la réalisation effective de l’ensemble de leurs droits ;

Considérant l’importance d’apporter un soutien et d’accompagner les pays francophones en crise, sortie de crise, ou en transition, en particulier la République centrafricaine, le Mali et Madagascar;

Saluant la création du Réseau francophone pour l’égalité femme-homme et renouvelant l’appel lancé le 20 mars 2013 à Paris à l’occasion du premier Forum mondial des femmes francophones.

Recommandons ce qui suit :

1. Aux États et gouvernements:

Intégrer pleinement l’égalité femme-homme et l’autonomisation des femmes dans le nouveau programme de développement pour l’après 2015, par le maintien et le renforcement d’un objectif spécifique sur l’égalité femme-homme, ainsi que l’adoption d’une approche transversale fondée sur les droits qui se traduise par des cibles et des indicateurs sexo-spécifiques dans les autres objectifs du développement durable.

En ce qui concerne la paix:

Garantir la participation des femmes dans les processus de médiation et de résolution des conflits, et prendre en considération la dimension du genre dans l’élaboration de futurs textes internationaux;

Améliorer les conditions de vie des populations par la bonne gouvernance socio-économique, notamment par une répartition équitable des ressources, indispensables à la consolidation de la paix;

Renforcer, au sein de l’Organisation internationale de la Francophonie, les actions de médiation pour la résolution des conflits et la consolidation de la paix, en appui des dispositifs régionaux et internationaux existants. Ces actions devront accorder une attention particulière aux violations des droits des femmes ;

Garantir la pleine participation et l’accès effectif des femmes à l’ensemble des métiers de la justice, notamment à travers une aide juridictionnelle suffisante, la mise e place des chambres foraines, en plus d’une prise en charge médicale et psychologique des victimes;

Veiller à ce que les exactions, violences, discriminations visant les femmes soient prises en compte dans les processus de justice;

Assurer une pleine participation des femmes à la réforme du secteur de la sécurité, notamment à travers un dialogue régulier et transparent avec les associations, la sensibilisation des personnels, la nomination de points focaux genre à tous les échelons des services de sécurité (armée, police) et organes subsidiaires ;

Adopter et mettre en œuvre, en concertation avec la société civile, des plans d’action nationaux relatifs aux résolutions « Femmes, Paix et Sécurité » du Conseil de sécurité des Nations unies.

En ce qui concerne l’éducation, l’emploi et le développement durable :

Prendre les mesures législatives et réglementaires nécessaires pour assurer l’accès effectif des filles à une éducation gratuite et obligatoire de qualité au moins jusqu’à 16 ans;

Assurer l’accès des femmes adultes à l’éducation à travers des programmes d’alphabétisation, de réscolarisation et de formation continue tout au long de la vie;

Prendre des mesures effectives pour garantir un environnement sûr et sans violence en milieu scolaire;

Mettre en œuvre des programmes d’emploi et d’insertion professionnelle répondant spécifiquement aux obstacles rencontrés par les femmes sur le marché du travail, notamment en améliorant les dispositifs de protection sociale;

Favoriser la mise en place d’un Fonds francophone pour la scolarisation des filles, en cohérence avec le Partenariat mondial pour l’éducation.

En ce qui concerne la participation politique, l’autonomisation économique et la lutte contre les stéréotypes :

Adopter un cadre législatif et des mesures incitatives (voire réformer le système électoral), garantissant une égale participation des femmes à la vie politique, notamment aux postes électifs locaux, régionaux et nationaux;

Engager un travail de budgétisation sensible au genre de manière à tracer la part des dépenses publiques dédiées et favorables à cette cible;

Entretenir avec les organisations de la société civile un dialogue soutenu et régulier sur les droits et conditions économiques, politiques, sociales des femmes et des hommes;

Promouvoir la pleine participation des femmes dans l’économie formelle, à tous niveaux de responsabilité. Assurer des conditions de travail égales pour les femmes et les hommes, à travers des politiques et un cadre normatif appropriés. Réviser les lois, règlements et encourager l’élimination des pratiques ou coutumes préjudiciables aux droits fondamentaux des femmes ;

Lutter contre les stéréotypes, source des discriminations basées sur le genre, à travers des campagnes de sensibilisation, notamment en milieu scolaire, dans les médias et auprès des administrations de l’Etat et au sein des sociétés.

2. À l’organisation internationale de la Francophonie :

Appuyer le Réseau francophone pour l’égalité femme-homme dans son travail de plaidoyer en faveur de l’égalité femme-homme, au sein de l’espace francophone et dans les enceintes internationales ;

Assurer la pérennisation, le suivi, et l’évaluation du Forum mondial des femmes francophones et le doter des moyens nécessaires;

Élaborer, en concertation avec la société civile, un Plan d’action francophone de mise en œuvre des résolutions « Femmes, Paix et Sécurité » du Conseil de sécurité des Nations Unies, des organisations régionales et sous régionales;

Promouvoir l’éducation de tous aux droits humains et notamment à l’égalité femme-homme;

Promouvoir l’expertise francophone en matière de genre et d’égalité femme-homme auprès des États et gouvernements membres ainsi qu’au sein des Nations- Unies et des autres institutions internationales, notamment, par la création d’un observatoire francophone de l’égalité;

Créer des prix d’excellence pour les femmes, dans le domaine de l’innovation et de l’entrepreneuriat;

Approfondir l’intégration de manière transversale de l’égalité femme-homme dans l’ensemble des programmes de l’Organisation.

3. À la Société civile

Travailler en réseau et ainsi constituer une force de proposition pour accompagner, dans tous les cas appropriés, les autorités nationales dans leur travail d’amélioration des politiques, du droit et de la sensibilisation du public en matière d’égalité femme-homme ;

Instaurer un dialogue inter générationnel en vue d’assurer le renouvellement des acteurs au sein des organisations de la société civile et permettre la participation accrue des nouvelles générations;

Participer activement aux processus de paix, de médiation et de réconciliation nationale, afin de faire entendre les voix de la société civile dans toute leur diversité, et notamment les voix des femmes et des jeunes ;

Assurer un suivi vigilant de la mise en œuvre par les États et les gouvernements des politiques, stratégies, programmes et projets en faveur de l’égalité femme-homme et de l’autonomisation des femmes.