Projet de loi 96 - Réalités invalidées des femmes immigrantes violentées allophones
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À Montréal, le 25 mai 2022 – C’est avec inquiétude que la Fédération des maisons d’hébergement pour femmes (FMHF) réagit à l’adoption du projet de loi 96. Il est primordial de rappeler les réalités et les conditions de vie des femmes immigrantes violentées allophones accueillies dans les maisons d’hébergement membres de la FMHF. Les obstacles sont nombreux lorsque vient le temps d’offrir des services, de dépister, de référencer ou d’intervenir auprès de ces femmes traumatisées lorsqu’aucune langue n’est partagée.
Les femmes immigrantes violentées doivent être soutenues
Dans ce sens, il semble dangereux et préjudiciable de forcer ces mêmes femmes à devoir nommer dans une langue qu’elles ne maitrisent pas, les épisodes de violence et les traumas qu’elles vivent après seulement 6 mois de vie sur le territoire québécois. Avec l’adoption du projet de loi 96, trop de femmes en maisons d’hébergement ne pourront plus bénéficier de soutien et de l’aide dans leur langue maternelle si fondamental afin d’exprimer leur souffrance et leur vécu traumatique et enfin pour s’émanciper d’un contexte de violence. D’autant plus de pouvoir maîtriser après en très peu de temps une langue étrangère dans de telles circonstances, être dans un état de stress post-traumatique ne peut permettre un tel apprentissage en accéléré.
Le travail quotidien auprès des femmes immigrantes réalisé par le réseau des maisons d’hébergement de la FMHF doit être soutenu par la prise en considération des violences faites aux femmes par les décideurs et partis politiques afin d’offrir un continuum de services adapté aux réalités de ces femmes, importante partie d’un filet social optimal pour soutenir TOUTES les femmes.
L’impossibilité de communiquer, un fardeau à traîner au quotidien
La méconnaissance du français et l’impossibilité de communiquer dans leurs langues, en plus de complexifier l’intervention sur leur vécu traumatique, est un fardeau que ces femmes traînent au quotidien. Vecteur principal de l’intégration socioprofessionnelle, de l’émancipation et de l’autonomie, il est impératif que toutes les femmes immigrantes aient accès à un interprète pour toutes les démarches administrative-judiciaires et qu’elles soient écoutées dans leur langue et à leur rythme dans leur processus de reprise de pouvoir et d’émancipation d’un contexte de violence.
Cours de francisation, sans compte à rebours
Il est primordial que ces femmes puissent avoir ainsi accès en effet aux cours de francisation, afin de leur offrir une réelle chance d’intégration, mais indépendamment du compte à rebours arbitraire imposé par le gouvernement. Également, si elles sont dans une situation de violence, il est normal qu’elles ne soient pas réceptives à apprendre une nouvelle langue. De plus, rappelons que les analyses et l’expertise des intervenantes en maison d’hébergement révèlent que certaines femmes, alors même qu’elles sont censées pouvoir bénéficier des programmes de francisation, témoignent d’avoir été privées de plusieurs de leurs droits surtout par leur conjoint violent, dont celui de participer aux programmes d’apprentissage de la langue, de les avoir arrêtés sous contraintes, ou bien même de ne pas en connaitre l’existence lors de leur arrivée au pays.
Le projet de loi 96, et notamment la mesure imposant un compte à rebours de 6 mois pour maitriser le français par les femmes immigrantes violentées allophones, semble contreproductif avec l’ambition portée par le gouvernement de répondre davantage aux besoins des femmes immigrantes tel qu’annoncé dans ses orientations.
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