Un nouveau rapport confirme que les inégalités de genre et de revenus sont à la source de la maternité adolescente dans les pays en développement
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NATIONS UNIES, New York – Dans les pays en développement, près d’un tiers des femmes ont eu leur premier enfant lorsqu’elles étaient encore adolescentes, selon un récent rapport ; près de la moitié de ces jeunes mères étaient en effet âgées de moins de 17 ans, et étaient donc elles-mêmes encore des enfants.
Les inégalités de revenus et celles basées sur le genre sont pointées comme facteur clé des grossesses adolescentes : elles font augmenter les taux de mariage d’enfants, empêchent les filles d’être scolarisées, restreignent leurs possibilités de carrière et limitent leur accès à la santé et à l’information sur une sexualité sûre et pratiquée dans le respect du consentement.
Les catastrophes climatiques, la COVID-19 et les conflits assoient encore ces inégalités : ils bouleversent la vie de personnes dans le monde entier, mettent à mal les moyens de subsistance et empêchent les filles de se rendre à l’école ou de consulter des services de santé, que les obstacles soient physiques ou financiers. Ainsi, des dizaines de millions d’entre elles sont vulnérables au mariage d’enfants et aux grossesses précoces.
« Lorsque près d’un tiers du total des femmes vivant dans les pays en développement deviennent mères à l’adolescence, il est clair que le monde n’est pas à la hauteur de ses engagements envers elles », déclare le Dr Natalia Kanem, directrice exécutive de l’UNFPA. « Les nombreuses grossesses que nous constatons parmi les adolescentes sont le signe flagrant qu’elles ont désespérément besoin d’information et de services de santé sexuelle et reproductive. ».
La maternité chez les adolescentes n’est pas toujours synonyme de grossesse non intentionnelle
Dans 54 pays en développement, la plupart des accouchements chez les filles de moins de 18 ans se produisent dans le cadre d’un mariage ou d’une union. Bien que la moitié des grossesses soit rapportée comme « intentionnelle », la capacité des jeunes filles à décider ou non d’avoir des enfants peut être très réduite. Le rapport montre en effet que les grossesses adolescentes sont très souvent – bien que pas toujours – provoquées par l’absence de choix éclairé, le manque de pouvoir décisionnel et même la force ou la coercition.
Même dans les contextes où une grossesse adolescente est considérée comme acceptable et planifiée, elle peut avoir des répercussions graves sur le long terme, surtout lorsque les systèmes de santé ne permettent pas d’assurer une information et des soins de santé sexuelle et reproductive à cette tranche d’âge très vulnérable.
Les complications liées à la grossesse et à l’accouchement sont la principale cause de mortalité chez les filles de 15 à 19 ans, qui constituent aussi la population la plus susceptible de subir une kyrielle d’autres violations de leurs droits, depuis le mariage forcé et la violence au sein du couple jusqu’aux terribles conséquences psychologiques de porter un enfant avant d’être elles-mêmes parvenues à l’âge adulte.
Les filles qui accouchent à l’adolescence ont également souvent plusieurs enfants très rapprochés, ce qui peut mettre en péril leur santé physique comme psychologique. Parmi celles qui ont accouché pour la première fois à 14 ans ou moins, les trois quarts ont eu un deuxième enfant avant leurs 20 ans, et 40 % de celles-ci en ont ensuite eu un troisième avant la fin de l’adolescence, un chiffre tout à fait vertigineux.
Les raisons de ces taux si élevés de maternité adolescente
Les accouchements chez les adolescentes représentent aujourd’hui 16 % des accouchements dans le monde, et le rapport souligne que les femmes ayant été enceintes dès l’adolescence ont connu près de 5 accouchements avant leurs 40 ans. Avec la multiplication et l’intensification des inégalités et des crises humanitaires, il est établi que les femmes et les filles portent le plus gros du fardeau que provoquent les bouleversements physiques, psychologiques et économiques.
Dans les conflits comme dans les catastrophes climatiques, les écoles et les structures de santé sont souvent en ruines et manquent cruellement de personnel et d’équipement. L’insécurité et la violence rendent impossibles les déplacements permettant de bénéficier de produits et services essentiels, comme la contraception et d’autres soins incontournables de santé sexuelle et reproductive.
Les crises et les déplacements de population provoquent aussi des pics de violence sexuelle et basée sur le genre, qui entraînent à leur tour un plus grand nombre d’infections sexuellement transmissibles, de grossesses non désirées suite à des viols, et des mariages d’enfants ou forcés, car les parents ont du mal à joindre les deux bouts et à lutter contre la famine. Dans de telles circonstances, l’accès à l’emploi, à l’éducation et aux services de santé est très perturbé voire tout à fait suspendu, ce qui chasse les filles de l’école et les femmes du marché du travail, et accroît fortement le nombre de mariages d’enfants et de grossesses non intentionnelles.
Ces tendances ne sont pourtant pas récentes : les recherches dans ce domaine montrent que malgré des progrès, la proportion d’un premier accouchement avant l’âge de 17 ans n’est passée sur les 6 dernières décennies que de 60 à 45 %, soit une chute de seulement 2 points tous les dix ans.
Augmenter la valeur des filles en investissant dans leur avenir
Le rapport appelle à renforcer le soutien à des soins complets de santé sexuelle et reproductive ainsi qu’à un engagement ferme pour le potentiel de formation et d’emploi des filles. Ces mesures sont particulièrement urgentes pour celles qui vivent dans des zones vulnérables ou à faible revenu, où le nombre de mères adolescentes est le plus élevé.
« Les gouvernements doivent investir dans les adolescentes pour élargir leurs opportunités, leurs ressources et leurs compétences, en vue de les aider à éviter des grossesses trop précoces et non intentionnelles », ajoute le Dr Kanem. « Lorsque les jeunes filles peuvent véritablement décider de leur propre parcours de vie, la maternité se raréfie chez les adolescentes. »
Les initiatives pour garantir la scolarité des filles, couplées à une éducation complète à la sexualité et à des formations en compétences de la vie courante, se sont révélées efficaces : elles leur donnent l’autonomie de faire leurs propres choix. Cela les aidera ensuite à sortir de la pauvreté et à jouir d’un avenir meilleur – une existence dans laquelle la décision d’entrer dans la maternité leur appartiendra, lorsqu’elles estimeront y être prêtes, en être capables et en avoir envie.
* Les prénoms ont été changés pour garantir la protection et l’anonymat