200 places supplémentaires en maison d'hébergement de 2e étape menacées par l'incohérence gouvernementale
Source avec lien:
MONTRÉAL, le 5 déc. 2023 /CNW/ - L'Alliance des maisons d'hébergement de 2e étape pour femmes et enfants victimes de violence conjugale (Alliance MH2), le Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale et SOS violence conjugale unissent aujourd'hui leur voix pour dénoncer la situation inacceptable dans laquelle se trouvent plusieurs maisons d'hébergement du fait de l'incohérence des programmes subventionnant les nouvelles maisons d'hébergement de 2e étape. Cette situation survient à un moment où l'entièreté du continuum de services en violence conjugale est surchargé et hautement fragilisé.
Incohérence gouvernementale et lenteur administrative mettant en danger la réalisation des projets de maison d'hébergement de 2e étape
Au printemps 2021, le gouvernement du Québec s'engageait à déployer un ensemble de mesures en matière de violence conjugale en réponse à une vague de féminicides sans précédent. Parmi celles-ci, figurait le développement de nombreuses places de 2e étape dont la mission est d'héberger les femmes et enfants à haut risque d'être victimes d'un homicide lié à la violence conjugale. Deux ans et demi plus tard, la contradiction des programmes gouvernementaux qui manquent d'adaptation aux réalités des maisons d'hébergement menacent la réalisation de ce déploiement. Ainsi, 11 projets dans 5 régions, soit 200 places supplémentaires, rencontrent des obstacles majeurs en raison des normes de programmes qui ne correspondent pas à la réalité terrain. Par ailleurs, la lenteur administrative engendre d'importants délais pour le déboursement des financements, imposant aux organismes porteurs d'avancer des sommes exorbitantes de plusieurs dizaines de milliers de dollars mensuellement en attente de réponses officielles de Québec. Les maisons d'hébergement se trouvent donc dans une situation financière insoutenable qui menace la réalisation même de leurs projets. Certaines avancées ont certes été obtenues au fil de multiples rencontres, mais la situation ne se gère, actuellement, qu'un projet à la fois, une conjoncture hautement décourageante. Bien que certains acteurs saisissent bien les enjeux et démontrent une volonté de débloquer les projets, nous nous retrouvons malgré tout devant leur impuissance face à l'incohérence gouvernementale des différents programmes concernés. Nous devons impérativement sortir de ce fonctionnement au cas par cas. C'est pourquoi nous demandons une mobilisation des 18 ministères, secrétariats et organismes étatiques engagés dans la Stratégie gouvernementale intégrée pour contrer la violence sexuelle, la violence conjugale et Rebâtir la confiance 2022-2027, afin de créer des assouplissements et des adaptations rapides des programmes de financement existants afin de débloquer les projets à risque de ne pas se réaliser à court terme.
Les maisons d'hébergement de 2e étape ne sont pas du logement social
À l'heure actuelle, aucun programme spécifique n'existe pour financer les ressources d'hébergement de 2e étape en violence conjugale. Le développement de nouvelles maisons se base donc sur des normes de programmes pensées et structurées pour du logement social. Il en résulte que la viabilité des projets est fortement impactée par un manque d'adéquation entre les divers programmes. Plus de 60% des espaces d'intervention (salles de rencontres individuelles et de groupes, local d'intervention pour les enfants, etc.) nécessaires pour offrir les services financés par le MSSS ne sont pas reconnus par la SHQ, confrontée aux limitations des normes en logement social. Le MSSS de son côté ne reconnaît aucune dépense liée à la réparation ou autres frais liés à l'immeuble (frais de construction, hypothèque, etc.). Les maisons d'hébergement se trouvent donc dans une impasse, ne pouvant financer ni d'un côté ni de l'autre ces espaces essentiels. Pourtant, les professionnel-les engagé-es dans la conceptualisation des maisons d'hébergement de 2e étape ont fait preuve de grande créativité pour optimiser l'intégration des espaces dédiés à l'intervention (salles multifonction, salles de coworking, etc.). En somme, ce sont actuellement plus de 22M$ en espaces d'intervention sans aucune garantie de financement gouvernemental qui devront, jusqu'à preuve du contraire, être assumés par les organismes; un nombre inconcevable de soupers-spaghetti et autres activités de levées de fonds à organiser! Ces difficultés affectent particulièrement les projets de maisons d'hébergement de 2e étape les plus avancés, mais plus de 150 autres places d'hébergement actuellement en développement sont également à risque de rencontrer les mêmes enjeux dans les prochains mois. Nous demandons donc, qu'en plus de trouver une sortie de crise rapide pour les enjeux critiques actuels, le gouvernement s'active rapidement à concevoir un programme spécifique pour les hébergements de 2e étape en violence conjugale, en collaboration avec les regroupements provinciaux pour faciliter les développements futurs.
Un blocage qui fragilise tout le continuum de services en violence conjugale
Depuis le début de la pandémie en mars 2020, 46 femmes ainsi que 13 enfants ont été assassinés dans des contextes de violence conjugale. 58 victimes d'homicides, plus de 75 enfants orphelins et un nombre incalculable de personnes qui n'auront plus jamais accès à une vie tranquille, hantées par le féminicide d'une proche. Actuellement le nombre de demandes d'aide de victimes de violence conjugale atteint des sommets historiques. Il est inconcevable que des projets de 2e étape pouvant offrir plus de 200 places supplémentaires à des femmes et enfants en grave danger se trouvent menacés par l'incohérence gouvernementale et l'impuissance administrative. Débloquer dans les plus brefs délais ces projets sera bénéfique pour l'ensemble du continuum de services en violence conjugale qui ressent fortement les contre-coups du manque de places en maison d'hébergement de 2e étape.
« Il est inconcevable que des organismes communautaires s'endettent de dizaines de millions de dollars en raison de normes gouvernementales inadéquates. Il est crucial que le gouvernement agisse rapidement pour débloquer les fonds pour les projets concernés afin d'assurer la sécurité des femmes et enfants en danger. »
Maud Pontel, coordonnatrice générale | Alliance MH2
« Les programmes mésadaptés et l'incohérence gouvernementale menacent gravement la réalisation des projets de maisons d'hébergement de 2e étape. Nous appelons à une reconnaissance appropriée des besoins de celles-ci et à la création d'un programme spécifique pour financer ces ressources cruciales. »
Mélanie Miranda, coordonnatrice à l'habitation | Alliance MH2
« Quand une femme a l'opportunité de s'installer en maison d'hébergement de 2e étape, cela permet d'accueillir une nouvelle femme en maison d'aide et d'hébergement. Les blocages actuels ont un effet domino sur toute la chaîne de services, et sur notre capacité collective à soutenir et protéger les femmes et les enfants victimes de violence conjugale. »
Louise Riendeau, coresponsable des dossiers politiques | Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale
« Quand une femme s'adresse à SOS violence conjugale pour demander de l'hébergement, c'est parce qu'elle craint sérieusement pour sa sécurité ou pour celle de ses enfants et qu'une opportunité de quitter s'est présentée. C'est un cri du cœur, un appel à l'aide immédiate. On devrait toujours pouvoir dire oui. On doit donc s'assurer que le continuum de services permet de le faire.»
Claudine Thibaudeau, responsable du soutien clinique et de la formation | SOS violence conjugale
-30-
L'Alliance des maisons d'hébergement de 2e étape pour femmes et enfants victimes de violence conjugale (Alliance MH2) compte 38 maisons membres dans 15 régions du Québec dont l'objectif principal est la prévention de l'homicide conjugal. Les MH2 en fonction hébergent annuellement plus de 500 femmes et enfants par année dans 149 unités d'hébergement sécurisées. Elles offrent des services spécialisés en violence conjugale postséparation, au regard de la dévictimisation, de l'analyse de la dangerosité du conjoint, des impacts sur les enfants exposés à la violence conjugale, de la réinsertion sociale des victimes et de l'autonomisation des femmes hébergées. Le premier critère d'admission est la dangerosité de l'ex-conjoint; 8% des femmes au départ d'un refuge d'urgence vivent des enjeux de sécurité majeurs et auront besoin d'un hébergement de 2e étape.
SOURCE Alliance des maisons d'hébergement de 2e étape pour femmes et enfants victimes de violence conjugale
Renseignements: Demande d'informations : Vicky Croisetière, chargée des communications et de la sensibilisation, communication@alliancemh2.org 438-356-2100