Avec Dominique Bourque (Université d'Ottawa)

En Occident, les artiste féministes ont brouillé la frontière censée exister entre l'art et la politique en refusant, entre autres, de séparer art et artisanat, ou art noble et art populaire -- séparation qui écartaient systématiquement les œuvres des femmes, et autres non "initiés", de la reconnaissance, des subventions et des musées.  Leurs créations hybrides et inattendues faisaient en effet éclater ces classifications. Parmi ces artistes, beaucoup ont également évité, neutralisé ou aboli le marquage des sexes et d'autres catégories identitaires investies socialement ou dites "naturelles". Après la présentation du concept du "dé-marquage" que je propose pour nommer cette démarche, j'examinerai quelques-unes des stratégies présentes dans les œuvres d'artistes féministes.

Dans mes travaux, je m’intéresse aux œuvres et autoreprésentations des artistes marginalisés et plus particulièrement des femmes, lesbiennes et personnes déracinées ou racisées. Depuis quelques années, je me concentre sur l’élaboration du concept du « dé-marquage » et le recensement de ses stratégies. Par « dé-marquage », j’entends l’évitement, la neutralisation ou l’abolition des marques imposées aux divers groupes sociaux subissant un rapport de domination de sexe, de sexualité, de « race », de nationalité, etc. J’ai publié Écrire l’inter-dit : la subversion formelle dans l’œuvre de Monique Wittig (L’Harmattan, 2006) et codirigé les trois ouvrages suivants : De l’assignation à l’éclatement. Continuités et ruptures dans les représentations des femmes (avec Caroline Désy et Francine Descarries, Cahiers de l’IREF, coll. « Agora », n° 5, 2013), Femmes et exils : formes et figures (avec Nellie Hogikyan, Presses de l’Université Laval, 2010) et Ces pays qui m’habitent : Expressions d’artistes canadiens d’origine arabe (avec Aïda Kaouk, Musée canadien des civilisations, 2003).