MARIE-HÉLÈNE BACQUÉ
Sociologue et urbaniste, professeure à l’université Paris Ouest 
Nanterre La Défense, directrice du laboratoire Mosaïques

RÉSUMÉ

La notion d’empowerment, parfois traduite par l’expression pouvoir d’agir, connaît un succès grandissant en France parmi les militants associatifs, les travailleurs sociaux, au sein de différents courants de la gauche mais aussi dans la littérature du management.

Utilisée de façon diffuse par des mouvements sociaux étasuniens dans les années 1970, adoptée à la même époque par des féministes défendant de nouvelles pratiques de développement dans les pays du Sud, cette notion a connu un succès important au cours des deux dernières décennies dans des sphères sociales, intellectuelles et dans des contextes politiques fort divers. Le vocabulaire de l’empowerment s’est imposé dans la rhétorique de grandes institutions comme la Banque mondiale et l’ONU. Différents programmes de politiques publiques nationales comme les Empowerment Zones aux Etats-Unis, le Black Empowerment en Afrique du Sud ou l’Action Plan for Community Empowerment en Grande Bretagne s’en réclament. Il est utilisé tant dans une perspective radicale, pour désigner un projet d’émancipation, que néolibérale ou social-libérale.

Alors que la notion d’empowerment commence à se diffuser en France sans pour autant y trouver une traduction satisfaisante, une discussion critique de ses utilisations qui éclaire ces différentes interprétations au regard de leurs contextes d’utilisation apparait nécessaire. En revenant sur la généalogie et la circulation de cette notion, des mouvements sociaux aux politiques publiques, des approches féministes aux grandes institutions, du Sud au Nord, il s’agit d’en dégager les limites mais aussi la portée spécifique pour éclairer les débats contemporains sur la démocratie. Les différentes mobilisations et mises en pratique de l’empowerment ouvrent en particulier des débats importants sur la nature du pouvoir, sur le processus pour y accéder et sur les rapports entre émancipation individuelle et collective et la transformation sociale.