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Ce colloque international a pour objectif de réunir des chercheurs, des membres d’ONG de droits humains et d’organisations de victimes pour débattre de l’état actuel des politiques de mémoire à travers les Amériques. Le colloque vise également à valoriser la contribution des victimes et de défenseur.es de droits humains à l’avancement des connaissances en ce qui concerne le difficile chemin de la vérité, la justice et la réconciliation.
Les enjeux liés à la vérité des crimes contre l’humanité, leur non-répétition et le rétablissement de la dignité des victimes sont des questions très sensibles. Ils exigent de réfléchir et de mettre en œuvre les conditions pour des sociétés engagées dans le respect de la pluralité, des droits humains et de la démocratie. Ainsi, aux notions de vérité, justice et réparation s’ajoutent, parfois en tension, celles de pardon et de réconciliation. Quel bilan peut-on faire des politiques de mémoire à l’heure actuelle dans les Amériques?
À cette première perspective qui touche des dimensions plus classiques des politiques de mémoire s’ajoutent des questions spécifiquement contemporaines auxquelles ce colloque tient à donner une place centrale. En effet, à travers le continent les enjeux concernés par les politiques de mémoire se complexifient avec le temps. Les commissions de vérité sur les crimes des régimes dictatoriaux ont été suivies par d’autres commissions qui ont examiné les exactions commises durant les conflits internes; l’un et l’autre étaient encadrés par le combat des idéologies anticommuniste et anticapitaliste. Aujourd’hui, les crimes contre les communautés et les peuples autochtones sont devenus un enjeu central des commissions de vérité et pour les comprendre il faut tenir compte l’histoire coloniale. De la même manière, les crimes contre les femmes et la violence sexuelle deviennent progressivement un enjeu légitime dans la quête pour la vérité et pour la reconnaissance de la dignité des victimes. Si ces crimes peuvent être à la croisée des chemins entre le combat idéologique et l’histoire coloniale, on ne saurait en rendre compte sans interroger la violence patriarcale. Est-il possible d’établir un rapport entre la visibilisation de ces crimes et le foisonnement théorique et juridique autour des notions de féminicide ou d’ethnocide à travers le continent?
Les commissions de vérité font aujourd’hui face à des défis engendrés par la continuité entre le contexte sociopolitique dans lequel elles voient le jour et celui qui produit les situations de violence qu’elles examinent. Généralement, les politiques de justice, réparation et réconciliation sont vues comme nécessaires pour permettre la transition démocratique après des régimes dictatoriaux, des conflits armés ou d’autres périodes de violence. Or, dans le contexte actuel, on observe deux types de continuités. D’une part, les faits visés sont de plus en plus imputés à des régimes démocratiques (par exemple Colombie, Mexique, Canada) et souvent il n’y a pas de rupture entre le régime qui met en place des politiques de vérité et celui qui a participé à commettre les crimes. D’autre part, au moment où les commissions de vérité sont mises en place ou que leurs recommandations doivent s’appliquer, les groupes qui se font reconnaître le droit à la vérité, la justice et la réparation continuent à être des cibles. Alors, que ce soit la vérité sur le coup d’État au Honduras, sur la violence faite aux autochtones et aux femmes à travers les Amériques, les crimes dont il est question n’appartiennent pas seulement au passé; c’est dire que les politiques en question ne sont pas vraiment de transition. Dans ces circonstances, quelles sont les implications de la mise en place des politiques de vérité, justice, réparation et réconciliation?