La crise écologique est avant tout une crise de notre rapport au monde. Fondé sur la coupure entre nature et culture et sur la foi aveugle dans le progrès technique, il autorise l’exploitation sans limites d’une « nature » conçue comme un objet distinct de l’humain et extérieur à la société. Dans cette vision coloniale-moderne, tout ce qui est apparenté à l’idée de nature est soumis à des formes analogues de domination, de domestication, de réduction : du corps des femmes aux populations non blanches, en passant par les non-humains et les mondes de l’invisible. Une relation plus holistique et mutualiste à la « nature » est donc indispensable si l’on espère préserver un monde habitable – au sens écologique, mais aussi social, psychique et spirituel du terme.

Quelles luttes et mobilisations actuelles peuvent nous inspirer dans ce changement radical de paradigme et nous inciter à cesser de « défendre la nature » pour « devenir la nature qui se défend », comme le veut un slogan en vogue ? Comment dépasser le rationalisme étroit de nos sociétés sécularistes, qui désenchante le monde et permet son exploitation en reléguant aux marges la richesse des mondes invisibles ? Et quelles lectures critiques des traditions spirituelles dominantes peuvent contribuer à un réenchantement porteur de vie, au bénéfice de nouvelles relations entre humains et non humains ?

À l’occasion de son 40e anniversaire, le Centre justice et foi vous invite à réfléchir à ces questions au croisement de l’écologie, des luttes décoloniales et féministes, sans oublier les questions spirituelles et religieuses. Nous y voyons les prémisses d’une alliance écologique inédite et novatrice ainsi qu’une invitation à pluraliser le monde commun.