L’attrait de l’apprentissage en période de crise
GENEVE (OIT Info) – Déterminé à éviter la formation d’une génération perdue, le monde s’intéresse de plus en plus à l’apprentissage comme remède miracle à la crise mondiale de l’emploi des jeunes.
Toute solution est par nature complexe mais le nouvel intérêt pour l’apprentissage et son potentiel de création d’emplois sont le bienvenue au moment où 75 millions de jeunes, hommes et femmes sont sans emploi.
Un bon apprentissage apporte aux jeunes les compétences dont ils ont besoin pour entrer sur le marché du travail et fait correspondre l’offre de main-d’œuvre qualifiée aux besoins des employeurs. Il peut contribuer à réduire l’incidence et la durée du chômage tout en soutenant la croissance économique.
«De meilleurs programmes d’apprentissage, plus largement accessibles, et d’autres possibilités de formation, peuvent réduire le chômage des jeunes et la pauvreté lorsqu’on les associe aux efforts nationaux de relance de l’emploi», déclare Christine Evans-Klock, qui dirige le Département des compétences et de l’employabilité de l’OIT.
Des avantages incontestables
Bien des gens considèrent l’apprentissage comme un remède miracle pour résoudre la crise de l’emploi des jeunes.”L’impact positif d’un apprentissage bien conçu – et particulièrement les systèmes duels qui associent formation en alternance entre l’entreprise et la classe – a été clairement démontré.
Dans des pays où un cinquième, voire plus, des 16-24 ans est en apprentissage – comme en Allemagne, Autriche, Suisse, Pays-Bas et Danemark – qui disposent tous de systèmes duels – le chômage des jeunes est plus faible que dans les autres pays européens où l’apprentissage n’est pas si courant.
Les systèmes d’apprentissage relèvent d’une tradition multiséculaire dans certains pays mais ce n’est qu’assez récemment que leur potentiel de création d’emplois a été progressivement reconnu, déclare Michael Axman, spécialiste du développement des compétences à l’OIT.
«L’intérêt s’est décuplé ces derniers mois. De plus en plus de conférences dans le monde y sont consacrées et nous recevons de nombreux appels de mandants en quête de conseils sur la manière d’instaurer un bon système d’apprentissage », ajoute M. Axman.
Si l’exportation systématique des modes d’apprentissage qui ont fait leurs preuves – comme le système allemand tant vanté – n’a pas grand sens, les pays peuvent choisir certains éléments qu’ils pourront adapter à leurs propres besoins.
M. Axman estime qu’il est possible pour les économies développées, émergentes ou en développement de mettre sur pied des dispositifs d’apprentissage: il cite Haïti, la Jordanie et Israël, des pays ayant récemment manifesté un grand intérêt à le faire.
L’implication du secteur privé
Quand bien même les pays choisiraient d’instaurer des programmes d’apprentissage, l’implication du secteur privé est fondamentale et doit être le point de départ, ajoute M. Axman.
«Ce dont nous avons besoin, c’est de l’engagement des entreprises et, mieux encore, de secteurs entiers.»
L’une des principales raisons qui explique que la transition entre école et travail s’opère plutôt en douceur dans les pays à système duel est que les apprentissages proposés sont étroitement liés aux besoins des employeurs.
Les organisations de travailleurs ont aussi un rôle important à jouer dans la conception d’apprentissages de qualité, tandis que les gouvernements doivent s’assurer de la qualité de l’éducation de base, faciliter l’implication du secteur privé et partager les coûts du système dual de formation.
Améliorer et repenser le système
Il existe aussi des marges de manœuvre pour intensifier, renforcer et améliorer les programmes d’apprentissage dans les pays qui en disposent déjà.
Cela est d’autant plus important que l’émergence de nouveaux métiers – par exemple dans le secteur des énergies propres – signifie que de nouvelles qualifications seront recherchées.
Offrir des apprentissages de qualité suppose de veiller àce que leur programme soit pertinent au regard des besoins du monde du travail actuel. Dans certains cas, cela exige de repenser la façon dont les compétences sont transmises, en se focalisant moins sur la mémorisation et davantage sur la pensée analytique, précise M. Axman.
«Plus que d’un cerveau fonctionnant comme un ordinateur avec un petit processeur et une grosse mémoire, le gage de la réussite dans le monde du travail d’aujourd’hui est un cerveau équipé d’un processeurbeaucoup plus gros.»