Une grande dame de l’alpha accroche sa craie
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Un billet de Ghislaine Jetté
Madame Thérèse Bussières-Caya, enseignante en alphabétisation à la commission scolaire Marguerite-Bourgeoys, prendra sa retraite le 30 juin prochain après 25 années d’enseignement bien remplies.
Connaissez-vous Thérèse Bussières-Caya?
Moi, j’ai connu Thérèse en 2005. Un jour, j’ai téléphoné à la conseillère pédagogique de la commission scolaire Marguerite-Bourgeoys pour lui demander si une enseignante serait intéressée à participer au Projet de création d’une minibibliothèque. Elle m’a dit « je vais demander à Thérèse. Les nouveaux projets, elle est toujours partante ». C’est comme ça que j’ai connu Thérèse.
Dans ce temps-là, Thérèse donnait sa classe d’alphabétisation au Resto-Vie de Pierrefonds. Un peu avant le dîner, les apprenantes et les apprenants troquaient leurs crayons et leurs cahiers pour des tabliers. En participant à la préparation et au service, ils avaient droit à un bon repas. Après le dîner, les tables ramassées et les clients partis, c’était l’atelier de mathématiques.
Plus tard, la classe de Thérèse a déménagé dans une école primaire. Elle s’est arrangée pour que les heures de classe coïncident avec l’horaire des enfants, pour faciliter la vie de ses étudiantes qui étaient pour la plupart des mères immigrantes. Un jour, un tout petit garçon arrive en tenant une dame par la main. Il regarde Thérèse timidement et lui dit dans un français tout neuf « Ma maman aussi, elle veut venir à l’école ».
Pourquoi j’aime Thérèse?
Thérèse est une femme passionnée d’alphabétisation. L’alphabétisation pour apprendre à lire et à écrire bien sûr mais l’alpha pour devenir un citoyen actif, un consommateur averti, un parent plus compétent, une personne qui connaît ses droits et qui est capable de s’informer.
Thérèse est une femme généreuse. Combien d’épiceries a-t-elle faites avec ses apprenantes et ses apprenants pour leur apprendre à repérer les bonnes aubaines. Sans compter les visites de logements, les rendez-vous chez le docteur et les nombreux papiers d’immigration qu’elle a aidé à compléter.
Thérèse est une femme de cœur qui parle toujours de ses apprenantes et de ses apprenants avec respect et amour. Elle est pour eux un guide, une confidente et souvent une deuxième mère.
Thérèse est une femme engagée et créatrice. Elle a été de tous les comités, sur la Table de concertation en alphabétisation de Montréal, a écrit du matériel pédagogique et partagé son expérience avec des dizaines d’autres profs. Elle se rappelle d’ailleurs avec nostalgie des années 1990, les grandes années de l’alphabétisation. Particulièrement de l’Année internationale de l’alphabétisation et des IFPCA qui permettaient de créer du nouveau matériel, de faire des nouveaux projets et de tenir des petites et grandes rencontres.
Un repos (?) bien mérité
Thérèse m’a dit qu’elle n’avait pas de projet spécial pour sa retraite. Qu’elle désirait voir pousser ses tomates et faire son ketchup un matin de semaine. Mais déjà dans la phrase suivante, elle m’a parlé de la dame qui a un organisme communautaire à Pierrefonds qui lui a donné un coup de fil… une passionnée, c’est comme ça!
En travaillant à ses côtés, j’ai beaucoup appris et j’ai eu beaucoup de plaisir. Elle va me manquer tout comme, j’en suis sûre, à ses collègues et aux centaines d’apprenantes et d’apprenants à qui elle a enseigné au cours de sa longue carrière.
Au revoir Thérèse!
Ghislaine Jetté