En automne 2015, un reportage de l’émission « Enquête » a porté à l’attention du grand public des dénonciations de femmes autochtones d’abus policiers à leur égard à Val-d’Or. Un an plus tard, on apprend que le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) donnera suite qu’à deux accusations sur 37. Femmes autochtones du Québec, appuyé par de nombreux groupes dont le Conseil du statut de la femme, demande une enquête publique indépendante, pour « mettre en lumière la situation relationnelle entre les femmes autochtones et les services policiers ».
Un regard sur les statistiques montre que les femmes autochtones représentent 4,3 % de la population féminine, mais qu’elles comptent pour 16 % des femmes assassinées au Canada. Elles vivent plus souvent la violence conjugale et elles en subissent des formes plus graves. En même temps, les femmes autochtones représentent 36 % des femmes incarcérées au Canada (13 % au Québec).
Pour comprendre cette surreprésentation, il faut tenir compte du contexte dans lequel vivent les femmes autochtones. À travers des lois et des pratiques, comme la « Loi des Indiens », les peuples autochtones ont été forcés à abandonner leur culture et à s’adapter à celle des colonisateurs. Pendant des décennies, des enfants étaient enlevés à leurs parents pour vivre dans des pensionnats. La Commission de vérité et de réconciliation a appelé cette pratique, dont les générations d’aujourd’hui vivent encore les conséquences, un génocide culturel. À ces facteurs historiques, des facteurs économiques et sociaux s’ajoutent. Les probabilités de vivre avec un revenu plus bas que le seuil de faible revenu sont deux fois plus élevées chez les femmes autochtones que les femmes allochtones. Le nombre d’enfants est plus élevé chez les femmes autochtones que chez les femmes allochtones. De même, la croissance de la population autochtone dans un contexte de pénurie de logements rend encore plus difficile pour les femmes de fuir les violences qu’elles subissent.
Ces discriminations et violences structurelles sont des facteurs cruciaux pour comprendre les violences que vivent les femmes autochtones. Pour mieux prendre en compte ce contexte et pour reconnaître que la violence est souvent une problématique intergénérationnelle, Femmes autochtones du Québec, comme d’autres organismes autochtones, préfère utiliser l’expression « violence familiale » plutôt que « violence conjugale ».
Un an après les dénonciations de Val-d’Or, Femmes autochtones du Québec nous appelle à soutenir leur demande d’une enquête publique sur les relations entre les femmes autochtones et les institutions policières au Québec. « Aujourd’hui, nous demandons au gouvernement, à la Sûreté du Québec et aux autres corps policiers du Québec ce qu’ils vont faire pour rétablir la confiance, pour assurer la sécurité des femmes de nos nations et pour répondre à son devoir de réconciliation. Le gouvernement du Québec doit écouter et collaborer avec les organisations autochtones et alliées et s’engager à être un acteur de changement pour éliminer la violence et le racisme au sein de ses propres institutions ».
Ressources d'aide
Foyer pour femmes autochtones de Montréal
Listes des maisons d’hébergement pour femmes autochtones au Québec
Services parajudiciaires autochtones du Québec
Répertoire des ressources en violence familiale à l’intention des Premières Nations du Québec