Des femmes handicapées s’emparent du micro !

Des femmes handicapées s’emparent du micro !

Des femmes handicapées s’emparent du micro !
Jeudi 26 février 2009 par Sophie Toupin «Avant de faire de la radio, les gens de mon village ne m’adressaient pas la parole. On me lançait même régulièrement des roches par la tête. Mon handicap faisait de moi une damnée. Mais aujourd’hui, je n’ai plus besoin de me cacher, je peux sortir en plein jour sans crainte. Et grâce à mon enregistreuse, j’ai même commencé à établir une relation avec des villageois. La radio Ada m’a permis d’expérimenter ce qu’est le respect, la dignité et, surtout, elle m’a donné une raison de vivre.» -- Afi, une bénévole à la radio Ada Les femmes handicapées constituent une des populations les plus fragiles sur le continent africain. Ces femmes sont exclues de la vie sociale : écartées de manière précoce du système scolaire, elles éprouvent non seulement de la difficulté à se marier ou à se trouver un partenaire, mais elles sont même violentées. La radio Ada, une radio communautaire située dans le sud-est du Ghana, a permis de briser ce cycle de discrimination et d’exclusion en donnant la voix à ces femmes, en leur permettant de réclamer leur dignité, bref de se tailler une place dans leur communauté. Radio Ada est la première radio communautaire orientée vers le développement à avoir vu le jour au Ghana. Celle-ci diffuse depuis 1999 en langue vernaculaire dangme et cible principalement une population de pêcheurs et d’agriculteurs analphabète à 65 %. Avant la radio Ada, aucun autre médium de communication ne rejoignait cette population. Sa philosophie  : le développement participatif. La radio refuse d’embaucher des journalistes, son objectif n’étant pas de véhiculer une information répondant à des critères journalistiques rigoureux, mais bien de viser à l’émancipation de la population, en plus d’assurer un développement sain de leur région. Elle recrute donc des bénévoles de la communauté qui sont ensuite formés. Les émissions sont présentées comme un dialogue en continu, dans lequel les animateurs jouent simplement un rôle de facilitateur. On donne ainsi la parole à des pêcheurs, des vendeuses ambulantes, des marchands de poissons, des agriculteurs. Un des exemples les plus probants et émouvants est celui des femmes handicapées (principalement physiquement : moteur, auditif ou visuel). Au fil des semaines, ces femmes ont été formées pour utiliser le matériel audio de la radio. Une fois outillées, elles sont bravement sorties de leur isolement en accompagnant d’autres animateurs pour ensuite réaliser seules des entrevues. Elles ont aussi organisé avec d’autres femmes handicapées des discussions en direct sur les thématiques qui les touchent au jour le jour, et ce, sous l’oeil (ou l’oreille) attentif des villageois. Afi, l’une des participantes à cette émission de radio affirme : «Pour la première fois de ma vie, je parlais de la discrimination que j’expérimente au quotidien. Pour la première fois, on écoutait ce que j’avais à dire». Source : Journal Alternatives - Vol. 15, No. 6 - Mars 2009 - http://www.alternatives.ca/article4549.html