Valorisation de la recherche - Un professeur engagé socialement ne voit pas son travail valorisé sur le plan académique

Valorisation de la recherche - Un professeur engagé socialement ne voit pas son travail valorisé sur le plan académique

Extrait de l'article paru dans le cahier spécial "77e congrès de l'Acfas" du journal Le Devoir (Édition du samedi 02 et du dimanche 03 mai 2009)

Par Assia Kettani

Pour la troisième année consécutive, le congrès de l'Acfas accueille une activité spéciale consacrée à la réflexion sur la valorisation de la recherche. Rassemblant une vingtaine de participants autour d'une dizaine de communications étalées sur deux jours, ce colloque se propose d'évoquer les enjeux éthiques de la valorisation des résultats de la recherche, de présenter les initiatives et d'amorcer des pratiques novatrices dans ce domaine.

Qu'est-ce que la valorisation de la recherche? Né aux États-Unis au début des années 80, ce concept occupe les scènes universitaires québécoise et canadienne depuis une dizaine d'années: à travers des initiatives telles que le Bureau recherche-développement-valorisation (BRDV) créé en 1987 à l'Université de Montréal, les universités peuvent mieux encadrer ce qui se passe après la recherche et accompagner les chercheurs dans l'utilisation ou la commercialisation de leurs découvertes.

À l'origine, cette tendance visait surtout les inventions technologiques et le secteur des sciences biomédicales: partant du constat que les inventions et les nouveaux savoirs qui découlent de la recherche universitaire se transforment trop rarement en applications concrètes ou commercialisables, la valorisation de la recherche se concentre sur le volet appliqué de la recherche et s'inscrit dans un souci de rentabilité des universités. La valorisation de la recherche en milieu universitaire se résume donc à une équation simple, selon Guillaume Paré, conseiller en éthique de la recherche au BRDV et coresponsable du colloque intitulé «Une invention - un brevet - un partenariat avec une entreprise».

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Mais, après le développement du transfert des connaissances en matière de technologies, au service du secteur industriel privé, le défi à relever est la valorisation des innovations sociales provenant des sciences humaines: quelles peuvent être les contributions des sciences humaines à l'économie, à l'environnement, à la vie intellectuelle ou encore à la résolution de problèmes sociaux?

C'est à cette tendance que répond le projet VINCI (Valorisation de l'innovation et du capital intellectuel), né en 2005. Réunissant 16 unités de recherche et établissements affiliés à l'Université de Montréal (tels que les HEC, l'École polytechnique ou encore l'hôpital Sainte-Justine), ce regroupement vise l'accroissement et l'amélioration du transfert des connaissances. «On peut valoriser les technologies mais aussi les connaissances dans le domaine des sciences humaines, dont la rentabilité est difficile à chiffrer», souligne Guillaume Paré.

La question qui sous-tend ce regroupement est donc la suivante: comment valoriser les résultats de la recherche en sciences sociales et humaines? «Ça peut aller d'une nouvelle méthode de gestion à un programme de décrochage scolaire; ça peut englober tout le champ de l'innovation sociale.» Le projet VINCI s'attache donc à un domaine en plein essor: «Aujourd'hui, le transfert des technologies est bien encadré et le transfert des connaissances est en plein développement.»

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Transfert de connaissances

La valorisation de la recherche permet aussi d'appuyer un aspect qui échappe parfois au monde universitaire: les dossiers de promotion des chercheurs ne tiennent pas compte du transfert des connaissances. Ainsi, un professeur qui passe énormément de temps sur le terrain à travailler avec des populations en difficulté, par exemple, ne voit pas son travail valorisé sur le plan académique puisqu'il échappe à l'impératif de publication. «Un chercheur très engagé à un niveau social ne pourra pas écrire autant d'articles et donc n'aura pas le CV qui lui permettra d'avancer dans sa carrière, ni les fonds de recherche nécessaires: il sera enfermé dans un cercle vicieux», remarque d'ailleurs Guillaume Paré.

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- Colloque «Valorisation de la recherche universitaire: enjeu social ou économique?», les mardi 12 et mercredi 13 mai.

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[Source : http://www.ledevoir.com/2009/05/02/248468.html]

 

>> À lire également dans le cahier spécial "77e congrès de l'ACFAS" de l'édition des 2 et 3 mai du journal Le Devoir :
Faire la science autrement - Femmes et sciences, l'équation est-elle possible?