La détresse psychologique des enseignantes et enseignants: les conditions de travail mises en cause

La détresse psychologique des enseignantes et enseignants: les conditions de travail mises en cause

MONTRÉAL, le 10 févr. /CNW Telbec/ - Une recherche effectuée par l'École nationale d'administration publique (ENAP), auprès du personnel enseignant membre de la Fédération autonome de l'enseignement (FAE), démontre que près de la moitié des enseignantes et enseignants vivent de l'anxiété. La recherche réalisée par Nathalie Houlfort, Ph. D., professeure à l'ENAP, démontre clairement que la surcharge de travail et le manque de contrôle sur la tâche demeurent les principaux facteurs de stress vécus par le personnel enseignant. Parmi les principaux facteurs qui minent la santé mentale des enseignants, on trouve :

  • la charge élevée de travail;
  • les difficultés liées au maintien de la discipline en classe (gestion de classe);
  • les difficultés relationnelles avec les directions, marquées par le manque de soutien, le manque de liberté et le style de gestion non approprié.

Détresse plus importante chez les profs

Si on compare avec les données d'une enquête de l'Institut de la statistique du Québec, la présente étude rapporte un taux deux fois plus élevé de santé mentale moyenne ou médiocre chez le personnel enseignant qu'au sein de la population en général, soit 19 % comparativement à 8,1 %. L'étude effectuée auprès de plus de 2000 enseignantes et enseignants a mesuré différents symptômes de détresse psychologique. 73,9 % rapportent que leur besoin d'autonomie n'est pas satisfait au travail. L'insatisfaction du besoin d'autonomie chez les enseignantes et enseignants sondés semblerait en partie causée par l'implantation du renouveau pédagogique. De plus, 60 % des enseignantes et enseignants présentent des symptômes d'épuisement professionnel au moins une fois par mois. Plus de 20 % en font l'expérience au moins une fois par semaine.

Charge de travail

La charge de travail élevée ainsi que les difficultés liées à la gestion de classe affectent négativement le besoin de compétence des enseignantes et enseignants. 35 % de ceux-ci vivent aussi des conflits travail/vie personnelle. Ceux-ci sont principalement causés par le stress et la pression qu'engendre leur tâche. Le manque de soutien de la direction a également un impact négatif sur le besoin d'affiliation des enseignantes et enseignants. Ces derniers ne se sentent pas respectés ni appréciés par leur supérieur. L'étude révèle que 23 % des profs ont l'intention de quitter leur travail d'ici cinq ans.

« Il est indéniable que les profs ont été dépossédés de leurs moyens au fil des ans. On leur impose une tâche de plus en plus lourde en leur enlevant en même temps les outils pour réaliser adéquatement leur mission qui est d'enseigner. Le manque de temps, le manque de ressources et l'absence de reconnaissance limitent grandement l'autonomie des profs. La détresse psychologique qui souvent en découle les conduit inévitablement vers l'épuisement professionnel et en incite plusieurs à quitter l'enseignement. C'est dramatique, il faut que le gouvernement réalise que le décrochage touche aussi le personnel enseignant qui souhaite enseigner, mais qui ne dispose ni des conditions, ni des moyens pour le faire », précise le président de la FAE, Pierre St-Germain.

L'étude souligne que des ajustements à la tâche de travail, par exemple la diminution du nombre d'élèves par groupe, l'augmentation du temps personnel pour effectuer la planification des cours et l'ajout de ressources pour les élèves en difficulté, permettraient de libérer davantage les enseignantes et enseignants pour accomplir leur mission.

« Cette étude vient confirmer une fois de plus que nos revendications sont légitimes. On se bat pour une éducation de qualité, mais pour cela, il faut donner aux profs des conditions qui soient humaines et qui tiennent compte de leurs besoins. Avant de parler de stabilité dans le poste, encore faudrait-il que le gouvernement s'assure de retenir les profs en fonction et prenne les mesures pour éviter qu'ils ne tombent malades. Les conditions d'exercice de la profession se sont dégradées dramatiquement, les profs s'épuisent et tout ce qu'on trouve, c'est d'en ajouter encore davantage à leur tâche. Il faut que cela cesse. Nous ne sommes plus au signal d'alarme, mais à l'incendie à éteindre », d'ajouter le président de la FAE, Pierre St-Germain.

Offrir plus de latitude aux enseignantes et enseignants et faire davantage confiance en leur jugement professionnel pourrait augmenter le sentiment de contrôle envers la tâche à réaliser.

« Il est aussi intéressant de constater que l'étude confirme le haut niveau d'attachement des enseignantes et enseignants aux élèves et à leur profession. Ça, nous le savions déjà et, pour notre part, nous n'avions aucun doute là-dessus », de conclure monsieur St-Germain.

La FAE regroupe neuf syndicats de l'enseignement qui représentent quelque 30 000 enseignantes et enseignants (le tiers du personnel enseignant au Québec) du préscolaire, du primaire, du secondaire, du milieu carcéral, de la formation professionnelle et de l'éducation des adultes ainsi que le personnel scolaire des écoles Peter Hall et du Centre académique Fournier.

[Source : http://www.newswire.ca/fr/releases/archive/February2010/10/c8423.html]