Le nouveau « modèle d’affaires » d’Emploi-Québec : un pas dans la mauvaise direction

Le nouveau « modèle d’affaires » d’Emploi-Québec : un pas dans la mauvaise direction

Communiqué

Montréal, le 11 avril 2011 - L’agence gouvernementale Emploi-Québec s’apprête à réviser ce qu’elle appelle son « modèle d’affaires ». Cela pourrait se traduire par la modification, voire la réduction, des activités offertes par les services publics et les organismes communautaires de développement de la main-d’œuvre, dont le RESO, et un accès de plus en plus limité à la formation générale et professionnelle qualifiante pour les personnes qui éprouvent des difficultés à intégrer le marché du travail. Pourtant, en situation de pénurie, le Québec aura besoin de la participation de toute la main-d’œuvre disponible.

Emploi-Québec justifie la révision de son « modèle d’affaires » en invoquant les restrictions budgétaires imposées par le gouvernement à tous les ministères, la conjoncture économique relativement stable du Québec, la diminution du nombre de personnes sans emploi ainsi que les perspectives prometteuses du marché du travail d’ici 2019. Sur la base de ces prévisions optimistes, Emploi-Québec veut mettre l’accent sur les prestataires récents de l’assurance-emploi et souhaite rediriger sa prestation de services, assumée à plus de 50 % par des organismes communautaires, vers des mesures d’emploi à court terme, privilégiant une réinsertion rapide au marché du travail.

Selon le RESO, le ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale (MESS) et son agence ne sont pas dans la bonne voie lorsqu’ils proposent de miser sur les chercheurs d’emploi « réemployables rapidement » comme principale stratégie pour répondre aux besoins en main-d’œuvre. Ce « modèle d’affaires » ne propose rien de concret quant aux efforts qui devront être déployés à court terme pour faire face à la pénurie de main-d’œuvre à laquelle le Québec est confronté – 500 000 postes à combler d’ici 2013 – et qui nécessitera la mobilisation et la participation de toute la main-d’œuvre disponible.

Dans le Sud-Ouest, la pauvreté et l’exclusion sont encore trop souvent le lot d’une partie importante de la population. Selon les données récentes d’Emploi-Québec, le Sud-Ouest comptait 5 909 prestataires de la sécurité du revenu aptes au travail. Selon le recensement de 2006, le taux de chômage s’élevait à 10,7 % dans le Sud-Ouest contre 9,1 % à Montréal et 29,3 % de la population du territoire n’avait aucun diplôme, comparativement à 22,8 % à Montréal.

Aux prises avec des situations de vie qui freinent leur intégration rapide au marché du travail, plusieurs personnes sans emploi ont besoin d’accompagnement, souvent sur une longue période, pour retrouver l’estime de soi et la motivation nécessaires pour surmonter leurs difficultés et s’inscrire dans une démarche de retour à l’emploi. Bien souvent, elles ont besoin d’acquérir les compétences et les qualifications qui leur permettront de s’insérer en emploi et de sortir de la pauvreté et de l’exclusion de façon durable.

Chaque année, plus de 2 000 personnes sans emploi participent sur une base volontaire aux activités du RESO et de son Carrefour jeunesse-emploi : counselling individuel, projets de formation professionnelle et générale, ateliers de préemployabilité, stages en entreprises, etc. Ces services donnent de bons résultats.

Ainsi, 90 % des personnes qui ont participé aux formations professionnelles – métiers de la construction, préposé aux bénéficiaires, secrétariat dentaire, services de garde à l’enfance, etc. – offertes depuis 10 ans par le RESO sont aujourd’hui en emploi. Sans le soutien du RESO, la plupart n’auraient pu accéder à des programmes réguliers de formation. En outre, le taux de réussite de l’accompagnement offert par le RESO à des adultes qui retournent compléter une formation de niveau secondaire est de 80 % comparativement à 30 % pour les mesures traditionnelles.

Bien enraciné dans sa communauté et appuyé par de nombreux partenaires, le RESO s’efforce de rester à l’affût des besoins des entreprises et de la main-d’œuvre, d’adapter ses services, d’innover. Dans cette perspective, avec les corporations de développement économique communautaire (CDEC) de Montréal et en partenariat avec Emploi-Québec, il expérimente depuis quelques mois un projet arrimant les besoins de main-d’œuvre des entreprises et ceux des chômeurs récents. Mais ce projet n’est pas une panacée : même les chômeurs récents peuvent avoir besoin d’un accompagnement soutenu pour réintégrer l’emploi et s’y maintenir.

Afin de consolider les expériences permettant de faire face aux enjeux du marché du travail sans que personne ne soit exclu, et à titre de partenaire reconnu par Emploi-Québec, le RESO recommande au MESS et à son agence de :

  • ne pas s’engager dans une refonte des services publics de formation et d’emploi sans le concours de tous leurs partenaires œuvrant auprès de la main-d’œuvre sans emploi
  • s’engager avec leurs partenaires dans une véritable réflexion sur les besoins des personnes sans emploi et sur la reconnaissance de l’expertise développée par les ressources
  • maintenir et renforcer l’accompagnement et l’accès à la formation qualifiante pour les personnes qui éprouvent des difficultés à s’insérer en emploi
  • maintenir et même accroître l’investissement gouvernemental destiné aux organismes communautaires de développement de la main-d’œuvre afin d’augmenter le bassin de travailleurs capables de répondre aux besoins du marché du travail
  • mettre en place un fonds d’innovation en main-d’œuvre, souple, récurrent et géré localement pour expérimenter des activités adaptées aux besoins spécifiques des personnes sans emploi.

 

Enfin, le RESO souligne que le conseil d’arrondissement du Sud-Ouest a adopté lors de sa dernière réunion une résolution en faveur de l’accessibilité à l’éducation pour tous. L’Arrondissement y reconnaît l’engagement de ses organismes partenaires et déclare vouloir poursuivre son travail avec ses partenaires locaux en matière d’éducation et de formation afin de faire de la population du Sud-Ouest une communauté apprenante où l’accès à la formation pour tous est une valeur commune.

[Source : http://www.resomtl.com/docs//eqcommu.pdf]