Projet européen de Formation linguistique interculturelle pour adultes analphabètes et illettrés
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Le projet "Formation linguistique interculturelle pour adultes analphabètes ou illétrés”, placé dans le contexte du programme "Education et formation tout au long de la vie" de l’Union européenne est un projet sur trois ans et qui doit se conclure en 2012. Plus sur le projet par Vérina Pétrova, experte à la Fondation de coopération interculturelle: "Je commencerais par attirer votre attention sur l’intitulé même du projet, ILLIAD, un acronyme assez réussi de l’anglais Intercultural Language Learning for Illiterate Adults. Et c’est tout un symbole, qui nous oriente vers la culture orale de tous ces gens, et ils sont nombreux, qui vivent sans savoir lire ni écrire. Ce qui est un drame…Le projet s’articule autour d’un réseau d’institutions de nombreux pays qui ont décidé de conjuguer leurs efforts, de partager les bonnes pratiques des uns et des autres, d’organiser une série de conférences et de colloques pour sensibiliser l’opinion surtout les décideurs dans la sphère de l’enseignement et de l’éducation nationale à la gravité du problème de l’illettrisme. Et quand nous employons le mot « illettré » c’est au sens le plus large. Il s’agit de toutes ces personnes qui ne savent pas lire et écrire dans leur langue natale, mais aussi ce qu’on appelle les "illettrés fonctionnels" qui ont quelques notions d’écriture et de lecture, mais qui face à une phrase, n’arrivent pas à comprendre son sens. Grâce à ce projet, nous souhaitons accompagner toutes ces personnes dans l’apprentissage de leur propre langue, mais aussi, dans un deuxième temps, d’une langue étrangère. Car nous nous mettons aussi à la place d’un émigré qui se retrouve dans un pays inconnu dont il ne connaît pas la langue et qui doit quand même essayer de survivre, ou encore des représentants de communautés ethniques minoritaires qui doivent, bon gré mal gré, faire l’apprentissage d’une deuxième langue. Depuis que nous travaillons sur ce projet nous avons été surpris de voir la quantité de personnes en Europe où la culture est reine qui n’ont pas le niveau d’instruction nécessaire. Toujours est-il que nous considérons l’illettrisme sous un aspect positif et non pas comme un handicap et une condamnation sans appel car il est toujours possible de se rattraper ou de rebondir dans la vie…
Ilyan Ouzounov, représentant de la société Sirma média en dit plus de la coopération internationale sur le projet ILLIAD: "Nous avons noué des partenariats avec des organisations venant des quatre coins de l’Europe – aussi bien des pays scandinaves comme la Suède et la Norvège, que de pays d’Europe Centrale comme la République Tchèque. On travaille également avec des organismes belges, britanniques, italiens et turcs – c’est une véritable initiative européenne !"
Quelle est la place de la Bulgarie dans ce projet?
Vérina Pétrova : "Je commencerais par dire que c’est la Bulgarie qui est à l’origine de ce projet qui se situe dans le prolongement d’un autre projet qui traitait de l’enseignement interculturel des langues. Deux institutions de Bulgarie sont directement impliquées dans le projet à titre de coordinateurs, d’une part, mais aussi d’experts. Nous avons constitué 3 groupes de travail dont le premier est centré sur les bonnes pratiques en la matière. Le deuxième groupe est chargé d’étoffer la relation entre la linguistique et l’emploi. Moi personnellement, je fais partie du groupe dirigé par le professeur Philoména Capusu du Portugal qui fait la synthèse des méthodologies et rédige un guide qui facilite l’approche des personnes illettrées, surtout quand il leur faut faire l’apprentissage d’une langue étrangère."
Mme Pétrova donne plus de détails sur les principaux objectifs de son groupe de travail. "Ce groupe de travail est chargé d’élaborer un document contenant des recommandations qui sera distribué à toutes les institutions d’enseignement et de formation d’Europe. Nous essayons donc, dans un premier temps, à définir un contexte commun, en l’occurrence les politiques de l’Union européenne en matière d’interculturalisme et de multilinguisme, avant d’en arriver à une définition commune de l’’analphabétisme fonctionnel et à la préconisation d’un ensemble de méthodes qui donnent de bons résultats."
Ilyan Ouzounov qui fait partie du groupe de travail sur les bonnes pratiques nous en dit plus des activités engagées : "Notre groupe de travail a pour but d’analyser les bonnes pratiques existantes et de formuler des recommandations sur l’applicabilité de toutes ces pratiques et sur les cas de figure concrets, dans lesquels ces pratiques pourraient réellement être mises en œuvre. La conférence, organisée les 11 et 12 octobre à Berlin et consacrée aux bonnes pratiques dans ce domaine, a été en quelque sorte le point d’orgue dans le travail de notre groupe."
La dernière conférence sur ce projet s’est tenue à Bergame, en Italie, au mois d’octobre 2010. Vérina Pétrova parle des temps forts de l’intervention bulgare à ce forum.
"Lika Pichtalova a communiqué une expérience extrêmement intéressante dont je n’avais jamais entendu parler – un audit linguistique. En clair, il s’agit de se penser sur le fonctionnement d’une institution pour diagnostiquer ses besoins en formation linguistique. Et nous avons essayé de voir comment sensibiliser le business aux problèmes de l’apprentissage des langues."
Ilyan Ouzounov de Syrma média nous donne son appréciation de cette présentation bulgare faite à la conférence à Bergame en Italie : "Oui, effectivement, la présentation de Lika Pichtalova, dont Mme Pétrova vient de nous parler, a suscité l’intérêt des participants, étant donné que l’audit dans les entreprises peut revêtir différentes formes, il peut notamment se traduire par la réalisation d’un bilan des compétences linguistiques du personnel d’une société. Ici, je voudrais préciser que notre projet a beaucoup de points communs avec le Programme opérationnel Développement des ressources humaines et son volet baptisé "Je peux..." appliqué en Bulgarie depuis quelques années. Ce programme s’adresse à celles et ceux qui souhaitent acquérir ou développer une ou plusieurs compétences professionnelles, y compris dans le domaine de l’apprentissage des langues étrangères. Je pense que les employeurs et les décideurs, d’une manière générale, commencent à prendre conscience de l’importance grandissante de la formation professionnelle dans l’économie d’aujourd’hui."
Alan Clarke du prestigieux College of Teachers de Grande-Bretagne faisait partie du groupe de travail sur les bonnes pratiques. Lui-même est comédien de profession et il a participé pendant 10 ans à une série d’apprentissage de l’anglais "English for you”, diffusée sur la chaîne de télévision de l’ex-RDA. Depuis des années, Alan Clarke travaille sur des projets européens dans la sphère de l’éducation et de la culture transposés en milieu carcéral. Il monte des spectacles en prison, avec des détenus-acteurs, il fait des jeux de rôles et c’est une façon d’aider ces gens à surmonter leur détresse psychologique. Et il emploie ces mêmes méthodes ludiques dans le projet de formation linguistique interculturelle pour adultes analphabètes ou illettrés. Les détails par Alan Clarke lui-même : "Je pense que trop souvent, on a tendance à oublier que l’apprentissage d’une langue étrangère commence en effet de la même manière que l’initiation à la langue maternelle pour les enfants. Autrement dit, dans leurs premiers pas, les personnes qui doivent assimiler une langue étrangère se retrouvent dans la position de vrais débutants, tout comme les enfants apprenant leur langue maternelle. Donc, j’ai voulu axer ma présentation sur l’importance du caractère ludique des cours de langues. Car la bonne vieille méthode d’enseignement de règles et de principes de manière stricte, ne donne pas de résultats probants. A la différence des méthodologies, beaucoup plus efficaces, qui proposent la formation en langues étrangères sous forme de jeu.”
"Bien entendu, ce n’est qu’une des approches possibles – précise Alan Clarke – il y a autant de méthodes que de points de vue différents. Moi personnellement, j’ai toujours eu l’impression, probablement à cause de ma carrière de comédien, que les gens doivent se sentir impliqués dans le processus d’apprentissage, vous devez les amuser, les faire parler, provoquer leur réaction. Parce que la langue n’est pas un simple bout de papier, c’est quelque chose de vivant, une chose dont on a besoin au quotidien. Pour moi, la langue est liée avant tout à la pratique et comme je l’ai déjà expliqué, ceux qui apprennent une langue étrangère se trouvent souvent dans la même situation que les enfants qui doivent apprendre leur langue maternelle. C’est pourquoi, les jeux, les rimes et les chansons sont un excellent moyen de faire sauter les barrières à l’apprentissage des langues étrangères. Il faut également faire un certain travail de pédagogie et expliquer l’utilité des cours de langues, lutter contre le manque d’intérêt pour les langues étrangères, qui est un grand problème chez nous, en Angleterre."
Un autre expert, Rolf Okervick, de Norvège, a fait part de son expérience dans l’apprentissage du norvégien aux immigrés qui sont contraints à des petits boulots pour survivre. Ilian Ouzounov de Sirma média complète son récit : « En effet, les pays scandinaves possèdent une riche expérience dans ce domaine. Surtout les Norvégiens, qui ont dû travailler avec des personnes d’origines très diverses, comme les réfugiés venant de pays comme l’Afghanistan, l’Irak ou le Pakistan. Les autorités norvégiennes se sont toujours appliquées à intégrer ces demandeurs d’asile dans la société et toujours sous forme de jeu. Rolf est lui aussi, tout comme Alan, un adepte de la méthode de l’apprentissage ludique des langues étrangères. „
Formation linguistique interculturelle pour adultes analphabètes et illettrés”, placé dans le contexte du programme Education et formation tout au long de la vie de l’Union européenne.
Ce programme est réalisé avec le soutien financier de la Commission européenne.
Présenté par Sonia Vasséva et Tsvétan Nikolov