Les femmes au pouvoir dans le monde

Les femmes au pouvoir dans le monde

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Isabelle Maher - www.canoe.com

Quatre femmes sont actuellement premières ministres au Canada, du jamais vu. Dix-neuf femmes sont à la tête de leur pays sur la planète. Si être une femme en politique représente un «handicap sérieux», selon le député péquiste Claude Pinard, de nombreux électeurs ne sont pas de cet avis.

«Pour une partie encore importante de la population, un des handicaps sérieux de Pauline Marois est le fait qu'elle soit une femme.»

La déclaration incendiaire du député Claude Pinard en a fait bondir plusieurs cette semaine.

Le député de Saint-Maurice, qui tentait ainsi d'expliquer les déboires de sa chef, soulève une question à laquelle la population des quatre coins de la planète semble avoir déjà répondu en portant au pouvoir les Angela Merkel, Laura Chinchilla, Hell Thorning-Schmidt, Julia Gillard, Dilma Rousseff... pour ne nommer que celles-là. Notons au passage qu'une femme dirige le FMI, Christine Lagarde, qu'Hillary Clinton est secrétaire d'État américaine, que d'importantes entreprises comme Pepsi sont dirigées par des femmes.

Même les Canadiens semblent aujourd'hui plus mûrs que jamais pour donner leur appui aux femmes. Depuis le 12 octobre dernier, quatre femmes dirigent les destinées de trois provinces et d'un territoire. Une première dans l'histoire d'un pays qui fut aussi brièvement représenté par une femme, Kim Campbell, en 1993.

Un débat dépassé

Les Québécois ne font pas exception et feraient volontiers confiance à une femme pour diriger la province. Chez nous, plusieurs voix se sont élevées pour dire que la question ne se pose même plus.

«Il reste peut-être un petit segment d'hommes de Cro-Magnon qui a peur de faire confiance aux femmes pour diriger. Mais dans l'ensemble, la société est ailleurs, observe Anne Darche, spécialiste de l'image, des tendances et du marketing. Les femmes dirigent une foule d'organismes, je pense notamment au Mouvement Desjardins qui fonctionne un peu comme un gouvernement», ajoute-t-elle.

Pour la journaliste et auteure Pascale Navarro, croire qu'être une femme en politique peut représenter un sérieux handicap est complètement dépassé. «Plus grand monde ne pense ça aujourd'hui, c'est d'un autre âge, pense-t-elle. Oui, c'est difficile pour les femmes de faire de la politique parce qu'elles font face aux préjugés sexistes, mais celles qui sont là vont à la guerre et elles avancent», affirme celle qui signait récemment Les femmes en politique changent-elles le monde?, un ouvrage dans lequel elle s'entretient avec une vingtaine de politiciennes québécoises et canadiennes. L'auteure y défend l'idée que le pouvoir féminin n'existe pas. Les politiciens, qu'ils soient hommes ou femmes, font de la politique avec les valeurs qui les animent peu importe leur genre. Ainsi, écrit-elle, une femme comme Margaret Thatcher, surnommée «la dame de fer», peut se montrer d'une grande dureté, alors qu'un homme comme Barack Obama peut faire preuve de compassion.

Trop bagarreuse ou trop douce

Historiquement, les femmes n'en sont pas à leurs premières armes avec le pouvoir. Que l'on pense aux reines qui occupaient de véritables fonctions de chef d'État. Dans plusieurs sociétés autochtones, vers le 17e-18e siècle, les femmes étaient mères de clans, nommaient les chefs et s'impliquaient dans les prises de décisions.

Pourtant, aujourd'hui, les politiciennes qui veulent accéder aux plus hautes fonctions se heurtent encore à certains obstacles, croit Denise Baillargeon, professeure d'histoire des femmes à l'Université de Montréal.

«Les règles politiques ont été établies dans une tradition masculine et l'une des premières règles est d'être dur, de se battre et de rendre les coups, rappelle l'historienne. Pour une femme c'est damn if you do, damn if you don't. Une politicienne trop bagarreuse se fait reprocher d'être agressive, si elle ne l'est pas assez, on lui reproche d'être trop douce... Après 40 ans de féminisme, on aimerait que ça change, mais ce n'est pas encore tout à fait le cas», ajoute-t-elle.