Introduction

Si l'égalité entre les femmes et les hommes est acquise en droit, elle ne se concrétise pas totalement dans les faits en France. Certes, durant les trente dernières années qui viennent de s'écouler, les progrès sont indéniables. Pourtant le système éducatif, mixte en théorie, opère en réalité un partage des élèves selon le genre. Filles et garçons ne suivent pas les mêmes filières, les mêmes cursus, n'accèdent pas aux mêmes savoirs. Baudelot et Establet (1992) soulignaient deux faits sociaux au cours du XXe siècle, à la fois une progression de la scolarité féminine et un maintien des ségrégations entre filles et garçons aux cœurs et termes de leur scolarité. Pour résumer leur situation, trois constats paradoxaux : la meilleure réussite scolaire des filles à tous les niveaux des enseignements, leur concentration dans un nombre limité de filières les moins rentables professionnellement, leur place minoritaire dans les sections les plus prestigieuses.

La formation professionnelle a pourtant un rôle important à jouer dans la réalisation de l'égalité des chances qui commence au sein des familles et continue à l'école. Or, la mixité dans les formations scientifiques et techniques reste limitée. Afin de renforcer l'élargissement des choix et des projets d'orientation des jeunes filles en région Bourgogne, l'association Femmes Égalité Emploi (FETE) organise depuis plus de dix ans des carrefours des carrières au féminin. Ce sont des cadres d'échanges où des femmes, qui exercent des métiers techniques (utilisant des technologies traditionnellement à connotation masculine), partagent leurs expériences personnelles par des entretiens individuels avec les élèves, dans un dialogue librement engagé.

À la demande de FETE, l'Institut de recherche sur l'éducation, sociologie et économie de l'éducation (IREDU/CNRS, Centre associé au Céreq) a réalisé en 2011 une enquête qualitative, à l'instar de celle menée en 2002, portant sur les carrefours des carrières au féminin. L'apport de cette étude est de chercher à connaître les effets de ces actions favorisant la diversification de l'orientation des filles. Trois chapitres composent ce rapport. Le premier précise le contexte à partir de repères statistiques dans le monde du travail et le milieu de la formation initiale, mettant en lumière les limites et les avancées féminines. Les perceptions des adolescentes et de leurs parents constituent le cœur du deuxième chapitre, illustrées par leurs paroles, une année après leur participation à ces manifestations : quelles sont leurs représentations des métiers techniques ? Quels bénéfices ressortent de ces rencontres ? Le chapitre suivant présente une comparaison des regards et des impressions des élèves interviewées en 2002 et 2011, accompagnée de suggestions pour améliorer ces initiatives.