Ces femmes oubliées ou sous-estimées des prix Nobel

15 oct 2015

Ces femmes oubliées ou sous-estimées des prix Nobel

Le Monde.fr | 9.10.2015 • Mis à jour le 12.10.2015 | Par Mathilde Damgé

En couronnant deux femmes cette année, la Biélorusse Svetlana Alexievitch en littérature et la Chinoise Youyou Tu en médecine, le comité Nobel confirme une tendance qui s’accentue depuis le début des années 2000 : la féminisation des prix.

Si les progrès sont notables, reste que les femmes ne représentent que 5,35 % des nobélisés, avec 48 femmes sur 897 lauréats depuis la création du prix en 1901.

Non pas que les femmes n’aiment pas les prix Nobel : elles n’en ont jamais refusé, contrairement aux hommes (Jean-Paul Sartre en 1964 et Le Duc Tho en 1973). Mais les récompenses ne se sont pas ruées sur elles. Et quand il y a distinction, avec un prix, elle est souvent partagée et sert de prétexte à une diversité de façade.

Le rôle mésestimé des épouses ou des proches collaboratrices

Difficiles d’entrer dans les coulisses des laboratoires et des carrières, parfois tortueuses, des Nobel, mais en parcourant les biographies des uns et des autres, on croise souvent des noms féminins, épouses ou assistantes, sans qui les découvertes récompensées auraient été beaucoup plus difficiles, voire impossibles.

Parmi celles qui sont restées dans l’ombre du « grand chercheur », citons Clara Haber, épouse de Fritz, qui obtint le prix Nobel de chimie en 1918 pour ses travaux sur l’ammoniac. Première femme à obtenir un doctorat de chimie à l’université de Breslau, elle a contribué aux travaux de son mari, traduisant ses articles en anglais, tout en étant cantonnée à la vie familiale.

C’est aussi le cas de Mileva Maric, brillante étudiante qui rencontra Albert Einstein lors de leurs études à l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich. Des lettres attestent de leurs échanges sur les travaux de physique d’Albert mais elle dut, elle aussi, se consacrer à sa vie de famille jusqu’à leur séparation.

L’un des exemples les plus flagrants d’oubli du comité Nobel est celui de Lise Meitner, collaboratrice d’Otto Hahn (prix Nobel de chimie en 1944) et qui joua un rôle majeur dans la découverte de la fission nucléaire. Juive autrichienne, elle dût fuir l’Allemagne nazie en 1938 et refusa ensuite de participer à la construction d’une bombe atomique.

Autre assistante « utile », Jocelyn Bell, qui découvrira le premier pulsar (une étoile qui émet des signaux très régulièrement), découverte pour laquelle son directeur de thèse, Antony Hewish, obtint le prix Nobel en 1974.

[...]

Lire la suite