Actions de la Marche mondiale des femmes en solidarité avec les femmes et le peuple Kurde

20 jan 2016

Actions de la Marche mondiale des femmes en solidarité avec les femmes et le peuple Kurde

Source: 

Marche mondiale des femmes (MMF)

Appel à l’action lancé par le Secrétariat international de la MMF
Toute notre solidarité avec les femmes et le peuple kurde

Aujourd’hui, le 8 janvier 2016, se réalise l’enterrement de trois combattantes et camarades, Pakize Nayir, Fatma Uyar et Sêve Demir, assassinées par les forces de sécurité du gouvernement turc le 4 janvier dernier à Silopi.

Nous, de la Marche Mondiale des Femmes, sommes particulièrement touchées par ce crime. En 2015, les crises et des conflits armés ne nous ont pas empêchés d’organiser notre 4e Action Internationale dans tous les coins du monde incluant aussi les lieux des conflits armés, à la campagne, dans les banlieues, en montagnes, partout où il y a des femmes en résistance. Dans le cadre de la 4e Action Internationale, le lancement de la Caravane féministe européenne a été lancé sur le territoire kurde en Turquie dans le but de soutenir et renforcer les femmes kurdes dans leur lutte pour l’autonomie et l’autodétermination de leur corps et leurs territoires. Nous avons aussi donné de la visibilité aux alternatives construites par la résistance des femmes au système capitaliste, colonial et patriarcal.

Les 6 et 7 mars 2015, des milliers de femmes provenant des deux côtés de la frontière entre la Turquie et la Syrie se sont réunies pour participer à un forum de débats, aux activités culturelles et manifestations dans le cadre de l’activité de déploiement de la 4e Action Internationale à Nusaybin, une ville divisée par la frontière. Des femmes qui jouent un rôle très important dans la construction d’une nouvelle société avaient partagé leurs expériences inspiratrices sur l’autodéfense des communautés locales.

Malheureusement, dernièrement le conflit entre le gouvernement turc et le peuple kurde a repris, en raison de l’échec des négociations de paix après les élections générales turques en juin 2015. Le résultat de ce nouveau moment de conflit est la mort de centaines de civil(e)s, la majorité sont des femmes et des enfants; des centaines de blessé(e)s ; et des milles de personnes emprisonnées. Les assemblées populaires municipales kurdes ont déclaré la légitime autodéfense comme réponse à la violence perpétrée par la police de l’Etat dans les villes de territoire kurde. Il y a 17 maires de gouvernements populaires emprisonnés, et inclut Sara Kaya qui nous a reçues pour la 4e Action Internationale à Nusaybin.

On attaque actuellement les villes qui ont déclaré l’autonomie gouvernementale et on impose un couvre-feu impliquant la coupure d’électricité, d’eau et des communications. N’importe quelle personne dans la rue, qu’elle soit une enfant, une personne âgée ou une femme enceinte ou malade, est assassinée par des francs-tireurs. Quand les gens sont malades, ils ne peuvent pas chercher des soins médicaux. Les personnes ne peuvent pas enterrer leurs morts. Le couvre-feu les laisse en otage dans leurs maisons pendant des semaines sans rien à manger, ce qui aggrave leur santé. De plus, les avortements spontanés augmentent lors de cette situation.

A Nusaybin le couvre-feu a été déclaré sept fois, et le dernier, du 14 décembre, et toujours en vigueur.

Enfin, trois femmes activistes kurdes, ont été assassinées par les forces de sécurité le 4 janvier dernier à Silopi. Une d’elles, Séve Demir, avait coordonné les événements du lancement de la 4e Action Internationale de la Marche Mondiale des Femmes à Nusaybin.

Action :

Nous dénonçons cet assassinat politique et appelons aux Coordinations Nationales à organiser des manifestations devant les ambassades turques et à envoyer des lettres en janvier 2016 pour condamner l’assassinat de trois femmes kurdes en exigeant :

  • La fin de l’impunité et que les responsables répondent au crime commit devant la justice;
  • La fin des assassinats d’activistes politiques, des défenseurs des droits humains et des journalistes;
  • La fin du couvre-feu militaire en villes kurdes;
  • La retraite immédiate des forces militaires et paramilitaires des villes kurdes;
  • La déclaration immédiate d’un cessez-le-feu et le recommencement des négociations de paix;
  • L’arrêt des abus, des insultes et des mauvais traitements des personnes et particulièrement des femmes.

Tant que toutes les femmes ne seront pas libres, nous serons en marche!

Pour plus d’informations

Le Kurdistan est une région géographique et culturelle d'Asie occidentale, majoritairement peuplée par les Kurdes. Le Kurdistan est actuellement séparé sur les quatre pays qu’il recouvre, la Turquie (12-15 millions), l’Iran (6-9 millions), l’Irak (5-7 millions) et la Syrie (2-3 millions).

Nous vous envoyons deux extraits des documents et des revues afin de mieux comprendre la lutte des femmes pour leur libération et leur autonomie. Nous avons ajouté également le communiqué émis par la marche mondiale de la France.

Luttes du peuple kurde pour le droit à l’autodétermination

« Depuis le mois de juillet 2015, l’État turc mène une guerre de grande ampleur au Kurdistan. Comme tous les peuples, le peuple du Kurdistan veut décider de son sort, s’autogérer et vivre libre dans son pays. Mais l’État turc réprime cette volonté par les armes. C’est là le fond et la source du problème.

Uniquement préoccupé par ses intérêts et par la course au pouvoir, le gouvernement AKP a délibérément mis fin au processus de paix avec le Mouvement de Libération du Kurdistan et déclaré la guerre aux Kurdes. Face à ces attaques, les forces de libération du Kurdistan ont adopté une position de défense. Dans de nombreuses villes kurdes, les habitants ont tenté de mettre en place des structures locales d’autogestion. Ce mouvement est totalement civil et fondé sur des bases démocratiques. Mais ne tolérant aucune avancée démocratique en Turquie et réprimant par les armes le moindre mouvement d’opposition, le gouvernement AKP a brutalement attaqué les revendications légitimes du peuple kurde. Il a imposé des blocus sur les villes, visé la population civile, massacré des centaines de personnes et dévasté les localités placées sous couvre-feu.

Selon les données publiées par l’Association des Droits de l’Homme et la Fondation des Droits de l’Homme de Turquie, 173 civils ont été victimes d’exécutions arbitraires et 226 autres ont été blessés par la police ou l’armée turque dans le courant de l’année 2015 (ces chiffres ne tiennent pas compte des attaques qui ont eu lieu après le 5 décembre 2015 et qui ont causé la mort de dizaines de personnes). Ces ONG relèvent par ailleurs que 138 personnes ont été tuées et 929 blessées dans trois attentats-suicides commis cette année dans des rassemblements kurdes ou pro-kurdes, respectivement, en juin à Diyarbakir, en juillet à Suruç et en octobre à Ankara. Elles évoquent par ailleurs des centaines de pertes de vies humaines dues aux affrontements entre l’armée turque et la guérilla kurde et soulignent que 157 civils ont été tués dans le cadre ces affrontements, en particulier du fait des bombardements aériens sur les zones d’habitation.

Aujourd’hui, le siège des villes de Sûr/Diyarbakir, Nusaybin, Kerboran, Cizre et Sirnak se poursuit. Voilà des semaines que ces localités se voient imposer des couvre-feux répétitifs au cours desquels la police et l’armée turque se livrent à des exactions et des exécutions arbitraires contre les civils. Les quartiers kurdes sont bombardés par des tanks et des hélicoptères. Ils sont totalement encerclés par des unités militaires lourdement armées ; toute circulation, entrée ou sortie est interdite ; la fourniture d’eau et d’électricité est interrompue. Chaque jour, on apprend la mort de civils. Les populations de ces villes sont menacées de massacre. Le Kurdistan vit un drame humain.

L’État turc se livre à un massacre au vu et au su du monde entier. Chaque personne qui se dit partisane de la démocratie et du respect de droits humains doit élever la voix pour dire halte à ces massacres ».

Source : Conseil Démocratique Kurde en France (CDKF)

Les femmes au coeur des résistances et luttes menées par le peuple kurde

« Lutte politique des femmes kurdes avait déjà une longue histoire. Elle est née et s’est développée à l’intérieur des luttes du peuple kurde durant ces dernières décennies. Lors de l’insurrection au Kurdistan de Syrie en 2012, les liens entre les organisations kurdes en Turquie et en Syrie ont permis une transmission de ces expériences de part et d’autre de la frontière. Dans la ville de Suruç, à quelques kilomètres de Kobanê, nous avons rencontré Fayza Abdi, militante kurde de Syrie, co-présidente du conseil législatif de Kobanê. Elle explique : « Les femmes dans le mouvement kurde avaient déjà acquis un rôle propre. Elles s’étaient mobilisées et avaient défendu leur représentation dans la société, malgré toutes les difficultés […] Elles avaient déjà acquis une expérience révolutionnaire dans le mouvement [du Kurdistan de Turquie]. Ainsi, après la crise en Syrie, à partir de 2011, nous étions prêtes à continuer notre expérience révolutionnaire au Rojava ». Elle indique que les femmes ont été les « pionnières » de la lutte pour l’autonomie qui s’est engagée alors en Syrie. Mais elle ajoute que cette mobilisation est en même temps l’occasion pour les femmes de s’organiser entre elles : « C’est ainsi que les femmes ont commencé à participer à l’auto-organisation de la ville [de Kobanê] dans cinq ou six associations non-mixtes, comme la Maison des Femmes et un centre éducatif dédié aux femmes ». Dans le nouveau système politique mis en place sous le nom de « communalisme », elles ont obtenu des garanties importantes : les commissions sont systématiquement composées d’au moins 40% de femmes et toutes les organisations de la société civile et politique sont co-présidées en parité. Pour assurer la nouvelle autonomie territoriale, les combattant.e.s s’engagent tout d’abord au sein des « Unités de Protection du Peuple » (en kurde Yekîneyên Parastina Gel, YPG). Plus tard une organisation militaire non-mixte est créée : les « Unités de protection des femmes » (en kurde Yekîneyên Parastina Jinê, YPJ) »

Source : Collectif Solidarité Féministe Kobanê

COMMUNIQUÉ publié par la Marche Mondiale des Femmes en France

Meurtre de 3 féministes kurdes ce mercredi

Nous sommes en deuil

Sevê Demir, membre de l'Assemblée DBP, Pakize Nayir, co-présidente de l'Assemblée du peuple du district de Silopi, ainsi que Fatma Uyar, militante du KJA : trois femmes kurdes, engagées politiquement, délibérément exécutées à Silopi au Kurdistan de Turquie.

Elles étaient engagées pour la liberté de leur peuple et son auto-détermination,

Elles étaient féministes pour construire un monde de justice et d'égalité,

Elles étaient laïques car c'est la seule solution pour respecter les choix personnels de suivre ou de ne pas suivre une religion.

Elles étaient parmi les quatre personnes assassinées au cours d'une attaque des forces gouvernementales contre des civils dans le district de Surnak's Slopi. Le corps de la quatrième victime n'a pas encore été identifié.

Sêvê Demir nous avait reçues le 6 mars, au démarrage de la Caravane européenne féministe de la MMF à Nusaybin. Elle était l'une des organisatrices du lancement de la Caravane européenne féministe au Kurdistan de Turquie. Elle avait 41 ans, avait survécu à 15 ans de prison, 68 jours de grève de la faim. Elle était militante du mouvement politique kurde. Notre douleur est grande, c'est une des nôtres qui a été assassinée.

L'horreur et l'indignation nous envahissent, la peine et la douleur font grandir notre colère.

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La CQMMF en solidarité avec les femmes kurdes!