Féminiser nos propos et nos écrits : un minimum d’effort pour reconnaître l’existence de plus de 50% de l’humanité!

9 juin 2016

Féminiser nos propos et nos écrits : un minimum d’effort pour reconnaître l’existence de plus de 50% de l’humanité!

Il y a des mots qui expriment le pouvoir d’exclure, d’autres la volonté d’inclure.

Par la présente, le Centre d’éducation et d’action des femmes (CÉAF), ancré dans le Centre-Sud depuis bientôt 45 ans, souhaite encourager l’ensemble des organismes du quartier à féminiser leurs propos et écrits, c’est-à-dire inclure les femmes, au même titre que les hommes, dans leurs communications s’adressant à l’ensemble de la population et des groupes du quartier.

En effet, nous remarquons que dans les concertations auxquelles nous prenons part, au sein des communications adressées à la population (affiches, invitations, programmation d’activités), lors de la plupart des événements organisés dans le quartier, très peu de gens féminisent leurs écrits et leurs propos. Résultat : des femmes risquent de ne pas se sentir interpellées ou concernées, ce qui aura pour conséquence de les démobiliser.

C’est dans un esprit d’égalité, de justice sociale et d’inclusion que le CÉAF pense nécessaire qu’un sérieux effort en ce sens soit effectué par l’ensemble des groupes du quartier. D’abord parce que les femmes sont majoritaires à la fois en tant que participantes et travailleuses dans la plupart des organismes communautaires, mais aussi parce qu’elles sont partie prenante, tout autant que leurs homologues masculins, de la vie du quartier. En effet, sur 10 personnes qui travaillent dans le communautaire, 8 sont des femmes. Et sur 10 personnes qui fréquentent les groupes communautaires, 8 sont des femmes.

À celles et ceux qui pensent que la féminisation est une entorse à une règle de grammaire établie depuis des centaines d’années, stipulant que « le masculin l’emporte sur le féminin », nous répondons qu’il importe justement de se questionner sur cette convention rigide et désuète qui a pour effet de nier l’existence des femmes. Le langage est le reflet de la société, il accompagne et marque ses évolutions. Nous pouvons donc le changer, comme nous pouvons changer une société qui ne nous convient pas! Rappelons que cette règle a été créée en 1647, alors que le grammairien Claude Favre de Vaugelas décrète que « le masculin est le genre le plus noble, à cause de la supériorité du mâle sur la femelle ». Comment peut-on, en tant qu’organisme communautaire prétendant agir contre les inégalités et les discriminations, maintenir cette vision des relations hommes femmes, vieille de 369 ans? Comment peut-on continuer à appliquer cette règle sexiste, après toutes les luttes menées pour revendiquer l’égalité entre les sexes?

À celles et ceux qui soulèvent des considérations d’ordre esthétique telles que « oui, mais ça alourdi le texte », nous répondons que loin d’être un fardeau, la féminisation apporte richesse et exactitude à la langue française. Soyons cohérentes et cohérents avec les principes égalitaires portés par les missions de nos organismes, afin qu’ils se concrétisent dans notre reconnaissance de l’apport, de l’engagement, de l’implication, du militantisme des femmes dans nos organismes, notre quartier et notre société. Féminiser nos propos et écrits est un pas dans cette longue lutte que nos organismes mènent coude à coude pour une société plus égalitaire, juste et inclusive.

NON, LE MASCULIN NE L’EMPORTE PAS SUR LE FÉMININ! Choisir le genre masculin pour inclure à la fois les hommes et les femmes n’est pas une décision neutre. Nous en avons assez que la façon « grammaticalement correcte » de parler de cinquante femmes et d’un homme soit d’employer le terme « ils ». Non, le langage n’est pas neutre! C’est un moyen de nommer la réalité et les mots que nous choisissons expriment notre pensée, nos idées, nos opinions, notre vision du monde. Exclure les femmes de nos propos et écrits a un impact direct sur les personnes qui nous entendent/nous lisent. Car comme l’a dit Agnès Callamard, grande militante pour les droits humains : « seul ce qui est nommé existe ».

Les femmes font partie de l’humanité au même titre que les hommes, point final! Nous vous invitons à y penser lorsque vous rédigerez vos prochaines programmations d’activités et communications adressées à la population de Centre-Sud. À notre sens, cela vous permettra de mobiliser encore mieux et encore plus!

Quelques exemples concrets de féminisation du langage

LES MOTS AYANT UNE DIFFÉRENCE DE SONORITÉ SONT FÉMINISÉS TOUT AU LONG.

  •  Ex.: Tous et toutes, résidents et résidentes du quartier, soyons solidaires!

LES MOTS DONT LA SONORITÉ NE CHANGE PAS SONT FÉMINISÉS À L’AIDE DU TRAIT D’UNION.

  •  Ex. : Nous sommes tous et toutes méprisé-e-s par ce gouvernement.

UTILISER DES TERMES INCLUSIFS

  •  Ex. : les gens, les personnes, la population.
  •  Utiliser l’expression « les personnes assistées sociales » plutôt que « les assistés sociaux ».
  •  Ou encore « la population du quartier Centre-Sud » plutôt que « les résidents du quartier ».

Sources