Appel à l'action pour promouvoir l'égalité des genres au sein du comité des droits des personnes handicapées

7 sep 2016

Appel à l'action pour promouvoir l'égalité des genres au sein du comité des droits des personnes handicapées

En juin 2016 ont eu lieu les élections du Comité des Droits des Personnes Handicapées des Nations Unies (Comité CDPH), qui ont abouti à la composition suivante : à compter du 1er janvier 2017 : une seule femme membre pour 17 membres hommes. Ce résultat lamentable a servi d’alarme pour tous ceux qui portent leurs efforts et mènent les actions visant à assurer la parité des genres dans tous les organes, y compris au sein des organes de traités des droits de l'homme des Nations Unies.

Malgré des références explicites à une nécessaire représentation équilibrée des sexes durant les élections du Comité CDPH (Article 34 (4), CDPH)1,  dans les élections des organes de traités en général (Résolution 68/28 de l'Assemblée Générale)2,  dans la représentation aux Nations Unies (Article 8, Charte de l’ONU)3 et plus largement au niveau international (Article 8, CEDEF)4,  sans compter les appels faits par le Comité CDPH et la société civile demandant aux Etats Parties d’y être vigilants, ces appels ont été ignorés.

Le Comité CDPH se présente désormais comme l’organe de traité avec le plus petit nombre de femmes5, et pourrait représenter le pire exemple de parité entre les sexes dans l'histoire des organes de traités.  Ceci est d'autant plus déplorable si l’on considère que la non-discrimination et l'égalité entre les hommes et les femmes sont inscrites comme principes généraux dans la Convention relative aux Droits des Personnes Handicapées (CDPH), et qu'il existe une disposition spécifique concernant les femmes handicapées. Cette dernière invite les Etats Parties à prendre « toutes mesures appropriées pour assurer le plein épanouissement, la promotion et l'autonomisation des femmes, afin de leur garantir l'exercice et la jouissance des droits de l'homme et des libertés fondamentales énoncés dans la présente Convention»6.  En outre, les Objectifs de Développement Durable récemment adoptés visent à réaliser les droits de l'homme de tous et à parvenir à l’égalité des sexes et autonomiser toutes les femmes et les filles (objectif 5).

Bien que des progrès aient été réalisés au cours des dernières décennies pour l’amélioration des droits des femmes, d'une part, et des droits des personnes handicapées d’autre part, les politiques internationales, régionales et nationales ont échouées à y inclure les femmes et les filles handicapées. En comparaison aux hommes handicapés et aux femmes non-handicapées, les femmes handicapées sont confrontées à un niveau plus élevé d'exclusion de l'éducation et de l'emploi, et sont plus exposées à être victimes de violence, de négligence et de pauvreté, étant soumises à des formes multiples et convergentes de discriminations sur la base de leur sexe, de leur handicap et à d'autres niveaux de leur identité.

Cet état actuel des choses est à la fois une cause et une conséquence de la marginalisation des femmes handicapées dans les mouvements de défense des droits de l’homme.  Il est indispensable d’assurer la parité des sexes au sein du Comité CDPH et des autres organes de décision afin de garantir la protection et la promotion des droits des femmes et des filles handicapées.

Bien que les Etats parties soient responsables des nominations et des élections des candidats indépendants et impartiaux pour les organes de traités, et constatant qu'il demeure beaucoup de place pour viser à l'amélioration de la transparence de ce processus, la responsabilité de promouvoir la parité des sexes au sein des organes de traité des droits de l'homme s’étend à tous les acteurs. Il nous incombe à tous, Etats, Institutions Nationales des Droits de l’Homme, mécanismes de suivi indépendants, mouvement des femmes, mouvement des personnes handicapées, le communauté de défense des droits de l'homme et travaillant sur le développement, aux niveaux national, régional et mondial, d'être proactifs afin d’assurer l'inclusion des femmes dans tous les programmes. Nous pouvons seulement y arriver tous ensemble, unis, en ne laissant personne de côté.

Dans ce contexte, la pertinence de la campagne GQUAL (égalité des genres) revêt un enjeu majeur ; cette campagne a été conçue pour améliorer la représentation des femmes dans les tribunaux internationaux et les organes de suivi en aidant à modifier les normes, les lignes directrices et les pratiques qui régissent les processus de nomination et de vote qui déterminent la composition de ces derniers.

GQUAL vise aux changements, à la fois en obtenant d’un grand nombre d'Etats qu’ils intègrent la parité des sexes en tant que critère de nomination et de vote (Engagement GQUAL), et, en aidant à modifier ou à introduire de nouvelles règles, des lignes directrices et des mécanismes qui aident à promouvoir la représentation égale des femmes dans l’élaboration de politique et dans le cadre normatif des organismes internationaux ciblés.

Pour être efficaces, ces efforts doivent être complétés par
a) des processus de sélection nationaux et internationaux améliorés, plus transparents et plus participatifs ; b) une meilleure compréhension des conséquences de l'absence de femmes ou de leur sous-représentation dans ces espaces et dès lors des conséquences sur leurs droits qui en sont affectés, et  enfin; c) par la consolidation d’un réseau mondial engagé, volontaire et fort.

À la lumière de ce résultat négatif sur la parité au sein du Comité CDPH, et de la réalité inégalitaire entre les sexes au sein des organes internationaux de suivi, tous les acteurs (Etats, INDHs, mécanismes de suivi indépendants, organes de traités, experts des droits de l'homme, organisations de la société civile, défenseurs des droits des femmes, droits des personnes handicapées, droits de l'homme, et autres) sont invités à signer cet appel à l'action. Ce faisant, nous, soussignés :

  • Signons la Déclaration GQUAL, participons à la Campagne GQUAL et nous engageons à promouvoir la parité entre les sexes, dans tous les organes de traités, dans les organes et tribunaux internationaux, et au sein des procédures spéciales et des organisations régionales et internationales;
  • Nous engageons publiquement à garantir la parité des genres lors de la nomination et de l’élection des candidats des organes de traités, d'autres organes et tribunaux internationaux, des procédures spéciales, et des organisations régionales et internationales;
  • Nous engageons, en particulier, à promouvoir la nomination de femmes candidates afin de réaliser une liste des candidats faite exclusivement de femmes lors des élections du Comité CDPH de 2018 (au cours desquels, neuf des dix-huit sièges au sein du Comité seront promus et que le mandat de la seule membre femme du Comité touchera à sa fin);
  • Nous engageons à promouvoir l’inclusion et la participation des femmes handicapées dans les processus de décisions des instances nationales, régionales et internationales à travers tous les domaines, entre autres, l'égalité des sexes, les droits des personnes handicapées, les droits de l'homme et le développement.

[1] “Les membres du Comité sont élus par les Etats Parties, compte tenu des principes de répartition géographique équitable, de représentation des différentes formes de civilisation et des principaux systèmes juridiques, de représentation équilibrée des sexes et de participation d'experts handicapés.”  Article 34 (4), Convention relative aux droits des personnes handicapées

[1] “Encourage les Etats parties à veiller, lors de l’élection d’experts des organes conventionnels, à ce qu’il soit tenu compte dans la composition des organes conventionnels des droits de l’homme, comme le stipulent les instruments pertinents relatifs aux droits de l’homme, d’une répartition géographique équitable, d’une représentation des différentes formes de civilisation et des principaux systèmes juridiques, d’une représentation des sexes équitable et de la participation d’experts handicapés", la résolution 68/286 de l'Assemblée générale du 9 avril 2014, para 13

[1] “Aucune restriction ne sera imposée par l'Organisation à l'accès des hommes et des femmes, dans des conditions égales, à toutes les fonctions, dans ses organes principaux et subsidiaires.” Article 8, Charte de l'ONU, 1945

[1] “Les Etats parties prennent toutes les mesures appropriées pour que les femmes, dans des conditions d’égalité avec les hommes et sans aucune discrimination, aient la possibilité de représenter leur gouvernement à l’échelon international et de participer aux travaux des organisations internationales.” Article 8, Convention des Nations Unies sur l'Elimination de toutes les formes de Discrimination à l'égard des Femmes, 1979

[1] Une femme (sur 18 membres) à partir de 2017- un écart important en comparaison des compositions précédentes de six femmes (sur 18 membres) en 2014-2016 ; sept femmes (sur 18 membres) en 2012-2014; huit femmes (sur 18 membres) en 2010-2012; et cinq femmes (sur 12 membres) en 2008-2010

[1] Article 6 (2), Convention relative aux droits des personnes handicapées