Philippe Couillard, féministe?
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« Si cela veut dire l’atteinte de l’égalité entre les hommes et les femmes tout en laissant une place aux hommes dans le débat, je suis féministe », a affirmé le Premier ministre du Québec en clôture du 4e Forum des idées qui prenait place à Saint-Lambert, en Montérégie, la fin de semaine dernière[1].
Le Forum des idées pour le Québec
Le Forum des idées se veut un endroit non partisan où débattre de points de vue issus de tous les horizons politiques. Si les panélistes invité-e-s présentaient effectivement des propositions de politiques sociales tantôt plus progressistes tantôt plus conservatrices, force a été de constater que l’auditoire elle, était essentiellement d’allégeance libérale. Cela a représenté une limite importante à l’objectif du Forum qui était de regrouper des personnes issues de milieux différents et ayant diverses perspectives politiques afin de faire émaner une myriade de possibilités et de solutions novatrices aux enjeux des inégalités, de la pauvreté et de l’exclusion sociale.
L’enjeu de l’égalité femme/homme
Une conférence portant sur l’enjeu des inégalités de genre a eu lieu lors de la dernière journée du Forum. Plutôt que d’expliquer en quoi l’égalité entre les femmes et les hommes est une question d’équité, de justice et de démocratie, la conférencière de la firme McKinsey & Company a plutôt décrit en quoi l’atteinte de l’égalité salariale serait profitable économiquement pour la société. Le fait d’ancrer l’enjeu de l’égalité dans une logique de performance économique pose au moins deux problèmes.
D’une part, réduire les enjeux de genre à la question de l’égalité salariale est fort simpliste. L’égalité salariale est certes toujours un enjeu puisque malgré les lois adoptées, plusieurs mécanismes de contournement de ces lois existent. Cependant, dans un Forum sur les idées, qui se veut novateur et tourné vers l’avenir, on se serait attendu à ce que le choix du thème soit un plus d’actualité. Ou à tout le moins à ce que la conférence explique pourquoi, malgré les lois en place, l’égalité salariale n’est toujours pas une réalité pour bien des femmes au Québec en 2016.
D’autre part, cela envoie comme message que l’égalité à elle seule n’est pas une cause suffisante. Elle doit être rentable pour qu’on s’y attarde. Qu’est-ce que cela veut dire pour les autres types d’enjeux de genre comme la lutte contre les violences envers les femmes qui ne généreront jamais de profit et qui au contraire coûte des millions de dollars annuellement à l’État? L’égalité des femmes ne doit pas être quelque chose que l’on négocie. La correction d’une inégalité historique et systémique devrait suffire comme contrepartie.
Le féminisme de Philippe Couillard
Depuis quelques mois, une nouvelle tendance a émergé : les dirigeants de l’Amérique du Nord se proclament fièrement féministes. Après Justin Trudeau et Barack Obama, Philippe Couillard a choisi le Forum des idées pour affirmer son féminisme devant les médias.
Une affirmation qui surprend – pour le moins – compte tenu du bilan de son gouvernement et des effets de certaines de ses politiques économiques et sociales. En effet, plusieurs recherches et essais publiés au cours des dernières années (Aurélie Lanctôt; IRIS; L’R des centres de femmes) démontrent les impacts néfastes des politiques d’austérité du gouvernement Couillard sur les femmes du Québec.
Dans ces conditions, il est difficile de considérer Philippe Couillard comme féministe. Pour être un allié, encore faudrait-il que le Premier ministre commence par accepter d’entendre les critiques qui lui sont adressées par les féministes et qu’il soit à l’écoute des demandes formulées par les groupes de femmes du Québec.