Déclaration finale de la 11e Rencontre internationale de la Marche mondiale des Femmes (MMF)
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Entre le 22 et le 28 octobre 2018, le Pays basque a reçu la 11ème rencontre internationale de la Marche mondiale des femmes. Un rendez-vous puissant et diversifié où des représentantes de la MMF du monde entier ont pu partager leurs expériences et bâtir un agenda féministe commun pour les années à venir.
À cette Rencontre internationale, il y avait 36 territoires et pays du monde entier. Les Amériques étaient représentées par 12 coordinations nationales.
20 ans de lutte
Cette 11e rencontre a célébré les 20 ans de la Marche mondiale des femmes dont la première rencontre a eu lieu au Québec en 1998. Depuis ce temps, la MMF a organisé régulièrement des mobilisations féministes qui transcendent les frontières et construisent une vision internationale liée aux réalités locales de chaque territoire et pays.
La Marche mondiale des femmes porte une vision féministe anti-systémique et anticapitaliste qui vise à transformer les structures de la société en général pour construire un monde d'égalité, de liberté et de solidarité. Depuis 1998, il y a eu quatre actions internationales, onze rencontres internationales et d'innombrables manifestations, programmes de formation, campagnes et luttes des femmes à travers le monde.
À la onzième réunion d'octobre dernier, il a été réaffirmé qu'aujourd'hui plus que jamais "nous continuerons jusqu'à ce que nous soyons toutes libres".
Declaración final del 11º Encuentro Internacional
Nous, femmes de la Marche Mondiale réunies à Bilbao, Euskal Herria, pour notre 11e rencontre avec des représentantes de 36 pays, nous nous réaffirmons comme féministes, anticapitalistes, anticolonialistes et antiracistes, et en marche permanente jusqu’à ce que nous soyons toutes libres.
La logique du capitalisme et de la vie sont absolument inconciliables, et nos réponses comme organisation plurielle et diverse doivent être chaque jour plus puissantes, de par nos mobilisations dans les rues et au sein des bases populaires.
Nous identifions une réorganisation du système capitaliste, qui aboutit à une résurgence du fascisme, à l’usage de la guerre, à la perte des droits sociaux et économiques. Ce qu’on appelle les crises n’est rien de plus que des justifications pour mettre en place les ajustements économiques, la perte de droits, la privatisation de la vie, la dépossession des corps et l’occupation des territoires. Les entreprises transnationales concentrent chaque fois plus de richesses et de pouvoir, et génèrent la destruction de la nature, de la violence et l’expulsion des peuples hors des lieux dans lesquels ils ont toujours vécus. De grands groupes économiques contrôlent les chaînes de valeur, depuis l’extraction des matières premières, jusqu’à la production et la distribution de marchandises et de services, et les entreprises transnationales de l’agro-commerce produisent des poisons et contaminent nos corps et nos terres.
Les politiques d’ajustement reposent sur le travail des femmes, et répètent des schémas que nous connaissons déjà, tels que la baisse des salaires et des dépenses publiques, en même temps qu’elles transfèrent à la population la responsabilité de ce qui est appelé la crise.
On assiste à une prise d’assaut des gouvernements qui diffèrent du système hégémonique, et qui proposent des alternatives au néolibéralisme et à ses formes de concevoir la vie, la démocratie, l’économie et enfin la distribution du pouvoir et des ressources dans le monde.
Cette réorganisation signifie également une augmentation de la violence contre les femmes dans toute sa dimension patriarcale, raciste et colonialiste, et dont les manifestations les plus graves sont l’agression contre le territoire, contre les corps et les communautés pour son contrôle et son expropriation, ce qui produit de grands déplacements, des migrations, des réfugiées, du trafic de personnes, de l’exploitation sexuelle, de la violence contre les personnes sexuellement diverses, la militarisation de la vie, et la mort.
Depuis nos résistances dans les territoires, nous impulsons des expériences politiques et économiques qui s’opposent à ce système, en affirmant la centralité de la soutenabilité de la vie. La construction quotidienne de l’auto-organisation, de la solidarité, de l’agro-écologie, de l’économie féministe et solidaire, et la défense des biens communs sont des stratégies pour garantir une vie “digne” et pour construire l’autonomie des femmes sur leur corps, leur sexualité et une vie libérée de la violence raciste et patriarcale.
Nous affirmons que l’auto-organisation des femmes est notre stratégie de renforcement comme sujet politique qui construit une force mondiale, en alliance avec les mouvements qui partagent nos valeurs pour pouvoir transformer le monde.
Renforcées par ce que nous avons construit lors de cette 11e Rencontre Internationale, nous lançons un appel à suivre notre marche en participant activement à toutes les luttes dans nos pays, à la construction d’actions de solidarité, aux processus d’alliance.
Nous commençons aujourd’hui à organiser notre 5e Action Internationale en 2020. Nous réaffirmons que le 24 avril sera le jour lors duquel nous réaliserons nos 24 heures d’actions solidaires dans le monde entier, afin de dénoncer le rôle des entreprises transnationales. Nous appelons tout notre mouvement politique à continuer les mobilisations pour dénoncer la violence dont nous souffrons en tant que femmes, et les attaques à notre vie et nos territoires qui provoquent des migrations internes et externes forcées; et à continuer à construire des alternatives à partir de l’économie féministe qui définit nos réseaux de subsistance et de vie.
En sororité féministe,
Nous résistons pour vivre, nous marchons pour transformer
Bilbo, Octobre 2018