Loi sur l’accès à l’égalité en emploi dans des organismes publics : la route est longue pour atteindre une réelle égalité
Montréal, le 9 juin 2020 — Dans le contexte de la 20e année d’application de la Loi sur l’accès à l’égalité en emploi dans des organismes publics, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse dévoile aujourd’hui son rapport triennal. Son constat : les organismes publics du Québec ont enregistré trop peu de progrès dans la représentation des Autochtones, des minorités visibles, des minorités ethniques et des personnes handicapées, au sein de leurs corps d’emplois. Il en est de même des femmes pour les postes de cadres et les métiers traditionnellement masculins.
« Les chiffres que nous dévoilons aujourd’hui révèlent que les programmes d’accès à l’égalité en emploi ne sont pas appliqués de façon optimale », a déclaré Philippe-André Tessier, président de la Commission. Il ajoute qu’« atteindre une meilleure représentation des cinq groupes cibles exige plus de détermination de la part des employeurs assujettis à la Loi ».
La Commission a mis récemment en place différentes mesures pour aider les employeurs assujettis à atteindre leurs objectifs. Elle a notamment réuni un groupe d’experts pour approfondir la situation particulière de chacun des groupes discriminés dans ses efforts pour accéder au marché du travail. Elle a développé un nouvel outil de suivi en temps réel et a augmenté son offre d’accompagnement des employeurs pour les aider à lever les obstacles à l’emploi pour les groupes visés.
La situation des groupes visés en matière d’accès à l’égalité en emploi
Malgré une légère augmentation de leur présence dans certains réseaux, la représentation des personnes autochtones n’a pas connu de variation significative entre 2009 et 2019. Globalement, le taux de représentation est demeuré stable à 0,3 %.
Pour les minorités visibles, la Commission observe une hausse de leur taux de représentation, celui-ci étant passé de 2,7 % en 2009 à 6,3 % en 2019. Toutefois, cette représentativité reste faible si on considère les cibles à atteindre pour chacun des réseaux à l’exception de celui des sociétés de transports qui compte désormais 12,7 % de personnes de minorités visibles pour un objectif de 13,6 %. La situation des minorités ethniques (qui ne sont pas des minorités visibles et dont la langue maternelle n’est ni l’anglais ni le français) est semblable à celle des Autochtones, à savoir que sa représentation n’a pas augmenté de manière significative. Celle-ci est passée de 3,1 % en 2009 à 3,4 % en 2019. « Notons par ailleurs que la présence de ces groupes visés dans les postes de gestion et de cadres est plus que déficitaire. Les organismes assujettis à la Loi doivent procéder à des changements significatifs au niveau des mentalités et des pratiques concrètes pour rendre le milieu de travail plus représentatif, et ce à tous les échelons » a commenté Myrlande Pierre, vice-présidente de la Commission.
Les femmes représentent le groupe ayant obtenu la plus forte croissance de sa représentation dans les organismes publics. Évaluée à 53,9 % en 2009, celle-ci a atteint 65,3 % en 2019. « Cette représentation est une bonne nouvelle », a affirmé Myrlande Pierre, « Il reste cependant encore plusieurs efforts à faire pour atteindre les cibles dans les postes-cadres de plusieurs réseaux. Les organisations doivent exercer un leadership pour corriger ce déficit de représentation des femmes dans ces lieux stratégiques de décision. Il reste également beaucoup de travail à faire pour un meilleur accès des femmes dans certains métiers traditionnellement masculins. » a complété Mme Pierre. Les réseaux des régies intermunicipales de police, des sociétés de transport et des municipalités possèdent les écarts les plus importants entre leur cible et leur représentation en ce qui a trait aux femmes.
Enfin, les personnes handicapées représentent seulement 1 % des effectifs totaux des organismes publics, soit bien en deçà des objectifs fixés qui variaient pour la période entre 4 et 5 % selon le réseau. Une situation qui apparaît aux yeux de la Commission comme étant urgente à corriger.
La Loi a 20 ans
Adoptée en décembre 2000, la Loi institue un cadre normatif particulier d’accès à l’égalité en emploi pour corriger les situations de discrimination envers cinq groupes historiquement discriminés. Elle compte à ce jour 330 organismes publics assujettis que l’on retrouve dans les réseaux de la santé et des services sociaux, les commissions scolaires, les institutions d’enseignement privées, les cégeps, les universités, les sociétés d’État, les municipalités, les sociétés de transport, les régies intermunicipales de police et la Sûreté du Québec pour ses effectifs policiers.
Afin de célébrer le 20e anniversaire de la Loi, la Commission organisera un colloque et une édition spéciale du Prix Droits et Libertés qui seront dédiés à l’accès à l’égalité en emploi.
Rôle de la Commission dans la mise en œuvre de la Loi
La Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse veille à l’application de la Loi. Tous les trois ans, elle publie un rapport comprenant la liste des organismes assujettis à la Loi et faisant état de leur situation en matière d’égalité en emploi.
Il incombe aux organismes de procéder à une analyse rigoureuse et soutenue de leurs effectifs et de leur système d’emploi afin d’identifier les obstacles systémiques pouvant freiner l’embauche et la progression en emploi de chacun des groupes. Tous les moyens nécessaires permettant d’atteindre les objectifs poursuivis doivent être mis en œuvre.