Le décrochage scolaire, une affaire de société

Le décrochage scolaire, une affaire de société

Article de: Sophie Méley-Daoust
Date: 20 avril 2008

Même si le taux de décrochage scolaire est en légère baisse à Laval depuis 2004, cette réalité touche, encore aujourd'hui, un nombre important d'adolescents et de jeunes adultes. Lueur d'espoir : plusieurs mesures ont été mises en place ou sont en cours de réalisation afin de contrer ce problème à Laval.

Autant la Commission scolaire de Laval (CSDL) que l'organisme Diapason Jeunesse, venant en aide aux décrocheurs, s'entendent pour dire que le décrochage scolaire est un problème de société. « Ce n'est pas seulement aux écoles de régler le décrochage, toute la communauté doit y participer », confie Maryse Ouimette, conseillère pédagogique au Service de l'éducation des adultes et de la formation professionnelle.

Des programmes mieux ciblés

Le ministère de l'Éducation a ainsi lancé en 2005 un plan d'action ayant permis la réalisation d'un programme d'aide pour favoriser le retour en formation des 16-24 ans. « Il a été prouvé qu'une personne sans diplôme d'études secondaire rencontre des obstacles à l'intégration au marché du travail », soutient Maryse Ouimette.

Le but de ce programme est ainsi d’offrir une formation pour les 16-24 ans sans diplôme et ne fréquentant plus l'école. « Les jeunes sont vus par des conseillers en orientation. Nous les aidons à mieux se connaître et à se projeter dans l'avenir », explique la conseillère pédagogique.

Du côté de Diapason Jeunesse, créé en 1997, deux programmes sont offerts. L'un vise l'accompagnement scolaire afin de prévenir le décrochage chez les 12 à 17 ans et l'autre se veut un programme de revalorisation pour les 15 à 17 ans ayant décroché. Environ 75% des jeunes, participant au programme d'accompagnement scolaire, réussissent leur cheminement selon la directrice de Diapason Jeunesse, Chantal Lachaine. « Il y a souvent plus de gars que de fille ici, car ces dernières ont plus de facilité à chercher de l'aide », constate Mme Lachaine. L'organisme a en plus eu l'idée, il y a quatre ans, de mettre sur pied la démarche Pré_am_bulle visant à soutenir les jeunes ayant suivi le programme revalorisation. « À la fin de ce parcours [revalorisation], nous avons constaté que plusieurs étaient encore fragiles et vulnérables à l'abandon », confie Mme Lachaine. Pré_am_bulle assurerait également la scolarisation des jeunes n'ayant pas encore l'âge leur donnant accès à la formation générale des adultes. « Il nous reste des modalités à définir. Nous recherchons des locaux et des partenaires financiers », indique la directrice de Diapason Jeunesse, où œuvrent cinq employés et une cinquantaine de bénévoles.

Des besoins à combler

Au Service d'éducation des adultes, sur les 5000 inscriptions faites d’août 2007 à mars 2008, 2000 proviennent de jeunes décrocheurs. « Le portrait de notre clientèle a changé. Avant, il n'y avait que des adultes dans les salles de cours, aujourd'hui il y a beaucoup plus de jeunes », assure Mme Ouimette. Ce changement serait dû, en partie, à une baisse marquée du financement des programmes de formation d'Emploi-Québec. « L'éducation des adultes encourage les jeunes à rester au secondaire et tente de briser l'idée que le parcours est plus facile aux adultes », soutient Mme Ouimettes.


Plusieurs jeunes à l'éducation des adultes ne sont d'ailleurs pas préparés à toutes les responsabilités qui les attendent. Certains y trouvent une source de motivation alors que d'autres abandonnent. « Il arrive que des étudiants décrochent, mais ils reviennent souvent plus tard, quand ils sont prêts à faire face aux mêmes responsabilités qu'un adulte », constate M. Ouimette.

Chez Diapason Jeunesse, de 80 à 90 jeunes passent la porte de l'organisme chaque année. « Les jeunes nous arrivent d'écoles, de CLSC ou du centre jeunesse. Ils ont décroché pour diverses raisons allant de leur situation familiale à des problèmes financiers ou personnels », estime Mme Lachaine, ajoutant que les jeunes arrivent chez Diapason Jeunesse les épaules bien basses et la confiance démolie. Celle-ci soutient toutefois que le système scolaire ne peut répondre à tous les manques, notamment lorsqu'un jeune traverse une période où il a besoin d'expérimenter et de confronter. « On ressent une réelle volonté du réseau scolaire de mieux répondre aux besoins », atteste toutefois Mme Lachaine. Selon elle, la CSDL ne devrait pas être blâmée pour certaines situations dépeintes par quelques jeunes de l'école Le Virage (voir article Le Virage scruté à la loupe). « La CSDL fait tout son possible. Il faut garder en tête que le système scolaire fonctionne pour une grande majorité d'étudiants », avoue Mme Lachaine.

Pour l'heure, les secteurs de Laval-des-Rapides, Pont-Viau et Saint-François ont été ciblés par la CSDL et Diapason Jeunesse comme des quartiers où les jeunes sont plus enclins au décrochage.

Une journée d'échange sur l'abandon scolaire et la persévérance a d'ailleurs eu lieu en février avec divers représentants de la CSDL et organismes venant en aide aux jeunes, afin, entre autres, d'intensifier les ressources pour soutenir les élèves et prévenir le décrochage.

Taux de décrochage (%) à Laval de 2001 à 2006
2001-2002 : 28,1
2002-2003 : 28,4
2003-2004 : 28,0
2004-2005 : 26,8
2005-2006 : 26,7
(Source : Institut de la statistique du Québec)