Formation professionnelle en France: inadaptée aux besoins des individus et des entreprises selon un rapport critique de la Cour des comptes
Publié au début du mois, ce rapport de la Cour des comptes consacré à la formation professionnelle tout au long de la vie appelle à une profonde réforme d’un système actuel qu'il juge "inefficace, inéquitable et couteux".
La Cour des comptes contrôle en France la gestion de toutes les administrations, de tous les organismes publics ou para-publics nationaux et même de certains organismes privés.
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Communiqué
La formation professionnelle tout au long de la vie
1er octobre - La Cour des comptes publie aujourd’hui un rapport consacré à la formation professionnelle tout au long de la vie (formation initiale et continue). Ce travail mené avec les chambres régionales des comptes sur près d’une centaine d’organismes tant publics que privés met en évidence l’inefficacité du système et l’urgence de sa réforme :
- Les formations sont largement inadaptées aux besoins des individus et des entreprises. La formation professionnelle initiale ne garantit pas aux jeunes qui en bénéficient une insertion satisfaisante sur le marché du travail tandis que la formation continue, loin de donner une deuxième chance aux personnes en ayant besoin, bénéficie en priorité aux personnes les mieux insérées dans l’emploi.
- Les financements sont abondants (plus de 34 milliards d’euros en 2006) mais très insuffisamment mutualisés ; les circuits financiers sont excessivement cloisonnés et peu contrôlables.
- Les intervenants sont éclatés à l’extrême et ne coordonnent qu’insuffisamment leurs actions.
La Cour appelle donc à une profonde réforme d’un système inefficace, inéquitable et couteux. Ses recommandations s’articulent autour des trois axes suivants :
En matière de formation initiale, l’Etat et les régions doivent mieux se coordonner pour que les formations en lycées professionnels et en apprentissage soient plus complémentaires et mieux adaptées aux besoins du marché du travail. En matière de formation continue, les opérateurs publics – AFPA et réseau des GRETA – doivent faire évoluer sans délai leur forme juridique et leurs modes de gestion. La possibilité d’un rapprochement ou d’une mise en commun de leurs moyens ne doit pas être exclue. Enfin, les régions doivent s’attacher, dans le cadre des commandes publiques de formation, désormais soumises au droit de la concurrence, à exercer complètement leurs responsabilités et à définir précisément en fonction des besoins le contenu des actions financées, en rupture avec la logique de l’offre qui continue largement à prévaloir.
2. Clarifier les modalités de collecte des fonds de l’apprentissage et de la formation continue et assurer leur meilleure répartition.
Les réformes à mettre en oeuvre doivent viser non pas à accroître des moyens déjà abondants, mais à les mutualiser beaucoup plus fortement et à les réorienter vers les publics qui en ont le plus grand besoin tout en diminuant très sensiblement les coûts de collecte.
Une diminution du nombre d’organismes collecteurs apparaît donc nécessaire, ce qui suppose que l’on rehausse le seuil de collecte donnant accès à l’agrément ; l’hypothèse d’une fusion du réseau de collecte des fonds de la formation professionnelle avec celui de la taxe d’apprentissage, voire celle d’un transfert de la collecte de l’ensemble de ces contributions aux URSSAF, devraient être examinées à cette occasion.
3. Créer les conditions d’une stratégie coordonnée en matière de formation tout au long de la vie
La mise en oeuvre d’une telle stratégie suppose un renouvellement complet des méthodes de coordination entre les acteurs. Elle pourrait s’appuyer sur :
- une instance commune de diagnostic et de programmation, réunissant l’ensemble des acteurs de la formation professionnelle, tant au niveau national (elle s’appuierait sur l’actuel Conseil national de la formation tout au long de la vie) qu’au niveau local ;
- un dispositif commun de financement abondé par l’ensemble des acteurs, et notamment les organismes collecteurs des fonds de la formation professionnelle ;
- un dispositif d’information et d’évaluation de nature à combler les importantes lacunes constatées dans ce domaine.
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Résumé du rapport
La formation professionnelle ne conditionne pas seulement aujourd'hui l'accès à l'emploi. Elle se double aussi d'un enjeu social déterminant et s'affirme comme l'instrument majeur de la sécurisation des parcours professionnels dans un contexte d'accélération des mutations économiques.
L'évaluation d'une politique publique aussi décisive nécessite une approche la plus large possible. Dans le cadre de ce rapport, la formation professionnelle tout au long de la vie est entendue comme celle qui permet, à tous les âges de la vie, d'acquérir de façon formelle une qualification ou une compétence professionnelle.
Le rapport est circonscrit aux trois champs suivants :
- la formation professionnelle initiale ; (qu'elle soit dispensée à des jeunes sous statut scolaire dans des établissements d'enseignement ou à des jeunes sous statut de salarié, avec un contrat de travail, c'est-à-dire en apprentissage) ;
- la formation professionnelle des demandeurs d'emploi ;
- la formation professionnelle des actifs occupés.
Le périmètre retenu a pris en compte dans toute sa dimension la complexité de la formation professionnelle. De ce fait, l'ensemble des juridictions, Cour des comptes et chambres régionales des comptes, se sont mobilisées pour mener des investigations nécessaires, tant au niveau national (État, organismes du service public de l'emploi, organismes de collecte de la taxe d'apprentissage et des fonds de la formation professionnelle) que régional (chambres de commerce et d'industrie, chambres de métiers), des centres de formation continue (GRETA).
À l'issue de ces investigations, la Cour des comptes et les chambres régionales des comptes font trois séries de constats :
- Les formations sont largement inadaptées aux besoins des individus et des entreprises, qu'il s'agisse de la formation professionnelle initiale dont les résultats en termes d'insertion dans l'emploi sont insuffisants ou de la formation continue qui répond très imparfaitement aux difficultés des salariés peu formés ou mal qualifiés ;
- Les financements sont abondants mais insuffisamment mutualisés, ce qui met d'autant plus en cause la pertinence du système actuel que celui-ci manque de transparence et fait apparaître des coûts élevés ;
- L'action des différents acteurs de la formation professionnelle est faiblement cohérente ; les cloisonnements du système, les insuffisances de son pilotage et la faiblesse des évaluations auxquelles il donne lieu rendent impossible la définition d'une stratégie partagée et compromettent l'efficacité d'ensemble des actions menées.
Chacun de ces constats est accompagné de préconisations. Comme pour chacun des rapports thématiques de la Cour des comptes, les réponses des administrations et des organismes concernés sont également présentées dans leur intégralité.