Le travail, tant qu'il nous plaira!
Gazette des femmes (janv/fév 2010)
Je suis de celles-là et j’en suis fière. Celles-là, ce sont ces femmes dans la cinquantaine ayant formé la première cohorte à porter consciemment l’héritage du féminisme au Québec et à en avoir profité. Une lutte, menée avec persévérance et entêtement, qui nous avait offert un cadeau inestimable : la conviction profonde d’avoir des droits et des possibilités de même que l’assurance de pouvoir se suffire à soi-même, particulièrement sur le plan financier, et ce, sans devenir « l’épouse de ». Tout un progrès, toute une victoire, mais il restait encore du chemin à faire.
Mes premières prises de conscience féministes ont eu lieu pendant mes études collégiales. L’analyse d’annonces publicitaires sous l’angle de la représentation de la femme me faisait dresser les cheveux sur la tête. J’y ai également vécu mes premières expériences comme militante politique et engagée dans le changement. C’est l’époque où j’ai pris conscience du boulot qu’il restait à abattre en matière d’égalité entre les femmes et les hommes. Heureusement que d’autres avant nous s’étaient battues pour le droit de manifester, de travailler et de voter. Grâce à ces femmes, dont ma mère, j’ai eu accès à l’université, où j’ai pu former une pensée, une pensée critique qui est l’un de mes outils les plus précieux.
Les femmes de la génération précédente n’ont pas eu cette chance. Une femme âgée de 60 ans en 1976 avait obtenu le droit de vote à l’âge de 24 ans. Et cette même année, 37,2% de celles âgées de 50 à 54 ans étaient actives sur le marché du travail. En 2006, ce taux a grimpé à 76,3 %. Nous avions bel et bien été les héritières d’avancées déterminantes pour l’avenir de notre genre. Et nous en avons été conscientes.
Cette conscience nous a permis d’explorer les possibilités qui s’offraient à nous sur le plan professionnel, sans pour autant délaisser le projet familial. Il a tout de même fallu ralentir le rythme en matière de procréation. Les femmes de ma génération sont celles à avoir mis au monde le moins d’enfants dans l’histoire du Québec. En effet, nous sommes plus de 25% de cette génération à ne pas en avoir eu. Contrairement à aujourd’hui, les congés de maternité et parentaux n’étaient pas encore suffisants pour que l’on puisse aussi facilement choisir d’avoir des enfants et de travailler.
Nous avons quand même réussi à baliser la voie. Nos prédécesseures avaient lutté, nous allions marcher dans leurs pas et taper bien fort ce chemin encore peu fréquenté pour les suivantes. Et cela, dans le plaisir ! En témoigne la parole des quinquagénaires interviewées dans le dossier Elles redéfinissent la cinquantaine : ces femmes aiment travailler. Le milieu professionnel représente une source de développement et d’enrichissement qu’elles tardent à quitter. Et pourquoi pas ! Nous sommes libres d’y demeurer tant qu’il nous plaira.
Une certitude m’habite désormais : il sera de plus en plus difficile de faire reculer la participation des Québécoises à la société, car elles disposent maintenant d’une solide voie d’accès à la pleine réalisation de soi selon leurs aspirations les plus profondes. Néanmoins, demeurons vigilantes concernant l’entretien de cette route. D’une part, afin d’éviter que l’on abuse de leur désir de servir, en assignant systématiquement les femmes, par exemple, dans le rôle d’aidantes naturelles, mais aussi afin que la voie balisée reste libre pour le passage de la génération qui nous succédera.
Voeux de saison
Je souhaite sincèrement que l’année qui commence soit pour vous synonyme de bien-être et d’équité dans toutes les sphères de votre vie ! J’espère que vous resterez nombreuses à suivre de près les enjeux et les dossiers qui seront présentés dans la Gazette des femmes afin de demeurer bien au fait des défis qui animent les Québécoises de l’an 2010.
Christiane Pelchat
Présidente
Conseil du statut de la femme
Mot de la présidente du Conseil du statut de la femme
Le travail, tant qu'il nous plaira!
Le travail, tant qu'il nous plaira!
Je suis de celles-là et j’en suis fière. Celles-là, ce sont ces femmes dans la cinquantaine ayant formé la première cohorte à porter consciemment l’héritage du féminisme au Québec et à en avoir profité. Une lutte, menée avec persévérance et entêtement, qui nous avait offert un cadeau inestimable : la conviction profonde d’avoir des droits et des possibilités de même que l’assurance de pouvoir se suffire à soi-même, particulièrement sur le plan financier, et ce, sans devenir « l’épouse de ». Tout un progrès, toute une victoire, mais il restait encore du chemin à faire.
Mes premières prises de conscience féministes ont eu lieu pendant mes études collégiales. L’analyse d’annonces publicitaires sous l’angle de la représentation de la femme me faisait dresser les cheveux sur la tête. J’y ai également vécu mes premières expériences comme militante politique et engagée dans le changement. C’est l’époque où j’ai pris conscience du boulot qu’il restait à abattre en matière d’égalité entre les femmes et les hommes. Heureusement que d’autres avant nous s’étaient battues pour le droit de manifester, de travailler et de voter. Grâce à ces femmes, dont ma mère, j’ai eu accès à l’université, où j’ai pu former une pensée, une pensée critique qui est l’un de mes outils les plus précieux.
Les femmes de la génération précédente n’ont pas eu cette chance. Une femme âgée de 60 ans en 1976 avait obtenu le droit de vote à l’âge de 24 ans. Et cette même année, 37,2% de celles âgées de 50 à 54 ans étaient actives sur le marché du travail. En 2006, ce taux a grimpé à 76,3 %. Nous avions bel et bien été les héritières d’avancées déterminantes pour l’avenir de notre genre. Et nous en avons été conscientes.
Cette conscience nous a permis d’explorer les possibilités qui s’offraient à nous sur le plan professionnel, sans pour autant délaisser le projet familial. Il a tout de même fallu ralentir le rythme en matière de procréation. Les femmes de ma génération sont celles à avoir mis au monde le moins d’enfants dans l’histoire du Québec. En effet, nous sommes plus de 25% de cette génération à ne pas en avoir eu. Contrairement à aujourd’hui, les congés de maternité et parentaux n’étaient pas encore suffisants pour que l’on puisse aussi facilement choisir d’avoir des enfants et de travailler.
Nous avons quand même réussi à baliser la voie. Nos prédécesseures avaient lutté, nous allions marcher dans leurs pas et taper bien fort ce chemin encore peu fréquenté pour les suivantes. Et cela, dans le plaisir ! En témoigne la parole des quinquagénaires interviewées dans le dossier Elles redéfinissent la cinquantaine : ces femmes aiment travailler. Le milieu professionnel représente une source de développement et d’enrichissement qu’elles tardent à quitter. Et pourquoi pas ! Nous sommes libres d’y demeurer tant qu’il nous plaira.
Une certitude m’habite désormais : il sera de plus en plus difficile de faire reculer la participation des Québécoises à la société, car elles disposent maintenant d’une solide voie d’accès à la pleine réalisation de soi selon leurs aspirations les plus profondes. Néanmoins, demeurons vigilantes concernant l’entretien de cette route. D’une part, afin d’éviter que l’on abuse de leur désir de servir, en assignant systématiquement les femmes, par exemple, dans le rôle d’aidantes naturelles, mais aussi afin que la voie balisée reste libre pour le passage de la génération qui nous succédera.
Voeux de saison
Je souhaite sincèrement que l’année qui commence soit pour vous synonyme de bien-être et d’équité dans toutes les sphères de votre vie ! J’espère que vous resterez nombreuses à suivre de près les enjeux et les dossiers qui seront présentés dans la Gazette des femmes afin de demeurer bien au fait des défis qui animent les Québécoises de l’an 2010.
Christiane Pelchat
Présidente
Conseil du statut de la femme