La campagne de publicité de la Fédération des cégeps: le sort des parents-étudiants
La Fédération des cégeps a lancé le 3 mai 2010 une campagne publicitaire à la télévision et sur Internet intitulée «Mon retour au cégep». Cette capsule publicitaire, mettant à l'avant-scène une mère de famille d'environ 45-50 ans, vise à «encourager un plus grand nombre d'adultes à revenir au cégep pour se former, se perfectionner ou se recycler». La narratrice, la fille de la future étudiante, raconte que sa mère peut enfin «penser à elle», après avoir voué les dernières années de sa vie à l'éducation de ses enfants.
Cette publicité nous laisse perplexes. Nous ne sommes pas contre le retour aux études des mères au foyer ou contre le fait que des parents (mères ou pères) décident de vouer quelques années de leur vie à l'éducation de leurs enfants. Cependant, nous pensons que cette catégorie d'étudiants potentiels n'est pas suffisamment importante en nombre pour justifier que la Fédération des cégeps y consacre sa campagne publicitaire.
Il existe cependant au Québec une population étudiante grandissante et trop souvent reléguée aux oubliettes: les parents-étudiants, de tous âges. En ce sens, la Conférence des recteurs et des principaux des universités du Québec (CREPUQ) estime que les parents-étudiants représentent une catégorie «émergente» d'étudiants.
Selon nous, le noeud du problème de cette campagne publicitaire est qu'elle passe complètement à côté de la question de la conciliation famille-études. Si la conciliation entre les responsabilités familiales et professionnelles peut être un véritable casse-tête, la conciliation famille-études ou encore famille-travail ET études est tout aussi complexe. D'ailleurs, la CREPUQ reconnaît que la présence d'enfants à charge représente un facteur important d'abandon scolaire. Les responsabilités supplémentaires des parents-étudiants ainsi que leurs besoins financiers accrus ont tôt fait de les décourager.
De plus, le message semblant suggérer qu'une mère, afin qu'elle soit considérée comme la «meilleure maman du quartier» et qu'elle puisse assurer les meilleures conditions à ses enfants, se doit de laisser tomber carrière et études, est discutable. Le modèle de la famille traditionnelle avec le père pourvoyeur et la mère au foyer est bel et bien révolu; la Fédération des cégeps est-elle au courant que nous sommes en 2010? Mais plus important encore, un tel message omet de dire que pour beaucoup de parents-étudiants, le choix d'étudier vise précisément l'amélioration des conditions de vie de leur famille. Cela est loin d'être une décision égoïste et irréfléchie!
Il faut déplorer le fait que le Québec, avec son maigre 8 %, présente le plus bas taux de parents-étudiants de niveau collégial au Canada. Si la Fédération des cégeps désire encourager plus d'étudiants à occuper les bancs de ses établissements, elle se doit d'inciter ses membres à mettre en place des mesures contribuant à l'amélioration des conditions d'études des parents-étudiants. Or, à ce jour, aucun établissement d'enseignement québécois ne s'est encore doté d'une politique familiale. De plus, les ressources en services de garde pour les parents-étudiants dans les enceintes des établissements sont largement insuffisantes. Et, comble de l'absurde, la plupart du temps, les places ne sont pas accordées en priorité aux parents-étudiants!
En concentrant son message sur un petit groupe d'étudiants adultes potentiels, la Fédération des cégeps a perdu une belle occasion d'avoir un message rassembleur et de s'adresser à TOUS les parents qui pourraient envisager un retour aux études. Or, quelles mesures la Fédération des cégeps entend-elle mettre en place afin d'appuyer ses actuels parents-étudiants dans la poursuite de leurs études ou pour inciter les parents de tous âges à retourner aux études? Est-ce que la Fédération des cégeps désire transmettre le message voulant que les parents étudiants doivent attendre 25 ans avant de «penser à eux»?
Ont signé ce texte: Association cigogne, Comité parents-études du Cégep de Saint-Jérôme, Association de parents étudiant ou travaillant à l'Université Laval, Comité de soutien aux parents-étudiants de l'UQAM (CSPE-UQAM)
Texte paru le 26/05/2010 dans Le Devoir: http://www.ledevoir.com/societe/education/289588/libre-opinion-le-sort-des-parents-etudiants
Cette publicité nous laisse perplexes. Nous ne sommes pas contre le retour aux études des mères au foyer ou contre le fait que des parents (mères ou pères) décident de vouer quelques années de leur vie à l'éducation de leurs enfants. Cependant, nous pensons que cette catégorie d'étudiants potentiels n'est pas suffisamment importante en nombre pour justifier que la Fédération des cégeps y consacre sa campagne publicitaire.
Il existe cependant au Québec une population étudiante grandissante et trop souvent reléguée aux oubliettes: les parents-étudiants, de tous âges. En ce sens, la Conférence des recteurs et des principaux des universités du Québec (CREPUQ) estime que les parents-étudiants représentent une catégorie «émergente» d'étudiants.
Selon nous, le noeud du problème de cette campagne publicitaire est qu'elle passe complètement à côté de la question de la conciliation famille-études. Si la conciliation entre les responsabilités familiales et professionnelles peut être un véritable casse-tête, la conciliation famille-études ou encore famille-travail ET études est tout aussi complexe. D'ailleurs, la CREPUQ reconnaît que la présence d'enfants à charge représente un facteur important d'abandon scolaire. Les responsabilités supplémentaires des parents-étudiants ainsi que leurs besoins financiers accrus ont tôt fait de les décourager.
De plus, le message semblant suggérer qu'une mère, afin qu'elle soit considérée comme la «meilleure maman du quartier» et qu'elle puisse assurer les meilleures conditions à ses enfants, se doit de laisser tomber carrière et études, est discutable. Le modèle de la famille traditionnelle avec le père pourvoyeur et la mère au foyer est bel et bien révolu; la Fédération des cégeps est-elle au courant que nous sommes en 2010? Mais plus important encore, un tel message omet de dire que pour beaucoup de parents-étudiants, le choix d'étudier vise précisément l'amélioration des conditions de vie de leur famille. Cela est loin d'être une décision égoïste et irréfléchie!
Il faut déplorer le fait que le Québec, avec son maigre 8 %, présente le plus bas taux de parents-étudiants de niveau collégial au Canada. Si la Fédération des cégeps désire encourager plus d'étudiants à occuper les bancs de ses établissements, elle se doit d'inciter ses membres à mettre en place des mesures contribuant à l'amélioration des conditions d'études des parents-étudiants. Or, à ce jour, aucun établissement d'enseignement québécois ne s'est encore doté d'une politique familiale. De plus, les ressources en services de garde pour les parents-étudiants dans les enceintes des établissements sont largement insuffisantes. Et, comble de l'absurde, la plupart du temps, les places ne sont pas accordées en priorité aux parents-étudiants!
En concentrant son message sur un petit groupe d'étudiants adultes potentiels, la Fédération des cégeps a perdu une belle occasion d'avoir un message rassembleur et de s'adresser à TOUS les parents qui pourraient envisager un retour aux études. Or, quelles mesures la Fédération des cégeps entend-elle mettre en place afin d'appuyer ses actuels parents-étudiants dans la poursuite de leurs études ou pour inciter les parents de tous âges à retourner aux études? Est-ce que la Fédération des cégeps désire transmettre le message voulant que les parents étudiants doivent attendre 25 ans avant de «penser à eux»?
Ont signé ce texte: Association cigogne, Comité parents-études du Cégep de Saint-Jérôme, Association de parents étudiant ou travaillant à l'Université Laval, Comité de soutien aux parents-étudiants de l'UQAM (CSPE-UQAM)
Texte paru le 26/05/2010 dans Le Devoir: http://www.ledevoir.com/societe/education/289588/libre-opinion-le-sort-des-parents-etudiants