Table-ronde sur le mouvement féministe et la construction du mouvement populaire au Québec
Un article de Pierre Beaudet pour la revue Nouveaux cahiers du socialisme, 19 novembre 2013
Cette table-ronde a été animée par Isabelle Bouchard avec les contributions de Francine Descarries (professeure de sociologie à l’UQAM et directrice scientifique du Réseau québécois en études féministes (RéQEF), de Délice Mugabo (co-porte-parole des États généraux sur l’action et la réflexion féministe) et d’une vingtaine de participant-e-s membres et ami-es des NCS.
Quelques jalons
Dans les années 1970 surgit au Québec un féminisme radical. Il va plus loin que le mouvement des femmes des années précédentes qui était socio-politique, et qui proposait une approche égalitariste, pour l’égalité des droits, contre la discrimination. Le féminisme radical affirme que la question de l’inégalité n’est pas la cause, mais la conséquence du problème. Ce problème est systémique, c’est le patriarcat.
Pour le féminisme radical qui surgit alors, il faut s’attaquer à la racine. Comme dans le paradigme marxiste, il faut renverser ce système, développer les luttes et abattre le pouvoir. Les rapports de sexe sont alors pensés comme des rapports sociaux en tension, des rapports de pouvoir, d’oppression, de résistance. Le pouvoir n’est pas simplement une « idéologie », des « valeurs », mais une structuration du réel, des conditions matérielles d’un pouvoir de classe. Le patriarcat, comme le capitalisme, divise la société en classe.
Les femmes sont l’équivalent d’une classe, elles occupent une position subordonnée dans un système. Plus tard dans les années 1980 – 1990, l’analyse se raffine. Dans les luttes des femmes contre le patriarcat, des hiérarchies deviennent apparentes. La « classe des femmes » ne peut plus être considérée comme « homogène, elle est diversifiée par différents statuts, néanmoins, il reste une homologie de positions. De ces débats se développent de nouvelles grammaires pour penser les rapports de sexe. Le mouvement des femmes devient présent partout au Québec (1500 – 2000 groupes). Le féminisme militant se déploie à travers la Fédération des femmes du Québec (FFQ) qui organise la Marche du pain et des roses (1995) et la Marche mondiale des femmes (2000).
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