Appel à communications « La recherche et le politique en éducation : enjeux et débats dans le monde francophone »
Argumentaire
Les questions relatives aux liens entre recherche scientifique et action politique sont récurrentes dans les sciences sociales, que l’on songe à Weber (Le savant et le politique, 1959), Habermas (La technique et la science comme idéologie, 1968), Bourdieu (Questions de sociologie, 1981) ou Latour (Le métier de chercheur, 2001). Depuis quelques années, la recherche en éducation s’est elle aussi emparée des enjeux inhérents à l’usage par le politique de ses propres productions : Poupeau (« Une sociologie d’état », 2003) ou Van Zanten (Dossier RFP, 2013). L’intérêt de ce colloque est d’interroger les formes peut-être nouvelles du rapport entre scientifique et politique dans un contexte de gouvernance post-bureaucratique des institutions éducatives qui modifie substantiellement les liens structurels, les attentes et les interactions entre les différents acteurs du système éducatif dans son ensemble (chercheurs de l’éducation compris). En effet, les formes contemporaines de pilotage que l’on regroupe sous le nom de gouvernance sont fondées sur des instruments spécifiques (au sens de Lascoumes et Le Gallès, 2012) censés rationaliser le système en vue d’une meilleure efficacité : évaluations réitérées, indicateurs de performance, obligations de résultats, redditions de comptes (voir; Lessard, 2004, Mons, 2007). Dans ce contexte, les chercheurs en éducation sont fortement sollicités pour produire des connaissances potentiellement utilisables par les décideurs pour asseoir leur politique, légitimer leurs choix, engager de nouveaux espaces de concertation, ou plus simplement communiquer leurs réformes. La « demande » faite à la recherche est d’autant plus à questionner que les chercheurs eux-mêmes sont de plus en plus soumis à des contraintesstructurelles les incitant à « produire de la recherche » et satisfaire eux aussi aux mots d’ordre d’efficacité et de résultats (évaluations des chercheurs sur leurs productions et l’obtention de subventions).
Les chercheurs en éducation sont ainsi à l’occasion invités par des instances politiques (ministères, syndicats, gouvernements locaux ou collectivités territoriales) à s’engager dans des recherches commanditées, sous la forme d’appels d’offre ou de projets ciblant des objets prédéfinis. Dans le cadre d’une nouvelle gouvernance en éducation, les décideurs mobilisent pour leur part de plus en plus les savoirs scientifiques pour rationaliser et légitimer leur action politique. La recherche en éducation ne constitue pas la seule source de production de connaissances pour l’action politique, dans la mesure où d’autres instances y participent (services ministériels, agences internationales etc.), mais elle doit "composer" avec le politique dans des formes nouvelles que nous souhaitons interroger. Ce colloque examinera comment se nouent les interrelations entre chercheurs et décideurs, entre recherche et action politique, et comment ces relations informent le processus de recherche dans le champ de l’éducation.
La réflexion sur les enjeux de la recherche commanditée en éducation s’appuiera sur les axes de questionnement suivants :
- Construction et délimitation de l’objet d’étude : Comment la recherche transforme-t-elle des objets sociétaux (la persévérance, la réussite, la violence... scolaires) en objets de recherche?
- Temporalité de la recherche et de l’action politique : Comment la production parfois longue de savoirs scientifiques s’accommode-t-elle d’une temporalité politique à plus ou moins court terme?
- Travail de terrain et positionnement des chercheurs : Comment l’entrée sur le terrain et le recueil des données se trouvent-ils modifiés par la dialectique demande (du chercheur agissant pour le compte de...) / commande (du commanditaire le plus souvent employeur des participants)?
- Restitution de résultats aux commanditaires et aux participants : Comment la recherche se positionne-t-elle vis à vis de groupes professionnels porteurs d’enjeux et d’intérêts parfois opposés?
Les communications orales proposées devront traiter de l’un ou de plusieurs de ces axes. Les propositions doivent être présentées dans un document Word (.doc ou .docx) ou .pdf et être envoyées par courrier électronique d’ici le 20 janvier 2014 simultanément aux deux adresses suivantes :
grossmann.sophie@uqam.ca (Sophie Grossmann)
christophe.roine@u-bordeaux2.fr (Christophe Roiné)
Les propositions doivent inclure les éléments suivants :
- Auteur(s) : Nom, prénom, fonction, affiliation et adresse électronique
- Titre (180 car. max. incluant espaces)
- Résumé de la communication (1500 car. max incluant espaces, bibliographie en sus)
Pour toute question ou renseignement complémentaire, vous pouvez communiquer avec les organisateurs du colloque à l’une ou l’autre des adresses ci-dessus.
Décision du comité scientifique : 3 février 2014
Remise des contributions longues (40000 signes maximum espaces comprises) : 7 avril 2014
Nous envisageons la publication de certains textes.