Le CEDAW tient le Canada responsable de ses résultats décevants en matière de droits des femmes
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Le 28 octobre, 2016 (GENÈVE, Suisse) – Les résultats du Canada en matière d’égalité des femmes ont été la cible de toutes les critiques aux Nations Unies, à Genève, cette semaine. La 65e session du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (CEDAW) a lieu à un moment opportun pour les Canadiennes. Le Canada a un nouveau gouvernement fédéral, ainsi qu’un premier ministre qui se dit féministe, préconise une relation de nation à nation et reconnaît que « la pauvreté est sexiste ». Nous savons que les mots comptent, mais il nous faut maintenant de l’action.
Des décennies de modifications législatives régressives et de réductions budgétaires ont considérablement érodé les droits des femmes au Canada, en vertu de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW). Depuis 1995, le Canada est passé de la première à la 25e place sur l’Indice d’inégalités de genre des Nations Unies.
Dans le but d’assurer l’égalité des sexes, le Canada a besoin d’un plan national holistique et exhaustif qui aborde toutes les formes de discrimination envers les femmes et les filles. L’approche doit être intersectorielle, compte tenu du fait que des groupes particuliers – femmes et de filles des Premières Nations, Inuites et Métisses, racialisées, handicapées, immigrantes, transgenres, lesbiennes, bisexuelles et mères seules – font l’objet de formes particulières de discrimination et de désavantage aggravé.
Les organisations de femmes autochtones, de droits des femmes et de droits de la personne accueillent favorablement la création de l’enquête nationale sur les femmes et les filles disparues et assassinées. Cependant, nous demeurons préoccupées par l’insuffisance du cadre de référence et par le fait que 37 autres recommandations de l’enquête sur la crise des meurtres et disparitions menée par le comité CEDAW n’ont pas encore été mises en œuvre.
Comme l’a démontré l’Association des femmes autochtones du Canada, les femmes autochtones demeurent marginalisées. « Les femmes et les filles autochtones au Canada sont affectées par des taux de suicide parmi les plus élevés au monde, une surreprésentation dans les prisons et des taux élevés de violence sexualisée », a déclaré Pam Palmater, Ph. D., titulaire de la chaire de gouvernance autochtone de l’Université Ryerson, qui ajoute : « Ces circonstances sont la conséquence d’années de colonisation, d’usurpation de terres et de ressources naturelles, de lois gouvernementales discriminatoires, de sous-financement chronique de programmes sociaux d’importance cruciale relatifs à l’eau, l’alimentation, le logement, la santé et l’éducation, ainsi que le vol d’enfants placés en foyers de substitution. De plus, ces circonstances sont exacerbées par les répercussions dévastatrices de l’industrie extractive, à laquelle on permet de pratiquer ses activités sans le consentement des Autochtones. »
Au Canada, l’écart de salaire entre les hommes et les femmes est deux fois celui de la moyenne nationale. Les tendances de ségrégation en matière d’emploi entre hommes et femmes restent inchangées; les femmes sont concentrées dans des emplois traditionnellement féminins, moins payés, et elles sont surreprésentées dans les emplois précaires et à temps partiel. Il faut une législation en matière d’équité salariale et de soin des enfants adéquate, à l’échelle du pays, en parallèle à de nouvelles stratégies énergiques qui supposent la participation de tous les ordres de gouvernement pour remédier aux inégalités structurelles et combler l’écart salarial. « En raison de ce qu’on appelle la taxation de la maternité (“motherhood tax”), les mères canadiennes gagnent 12 % moins d’argent que les femmes qui n’ont pas d’enfants », a déclaré la directrice générale de West Coast LEAF, Kasari Govender. « L’écart s’élargit à mesure que le nombre d’enfants augmente. Il est également plus grand pour les mères seules et celles qui sont restées plus longtemps éloignées du travail rémunéré. »
Le Canada manque à son devoir de respect, de protection et de réalisation des droits économiques et sociaux des femmes et des filles. Trop de femmes au Canada connaissent la pauvreté, l’itinérance, des logements précaires, des revenus d’aide sociale lamentablement inadéquats, l’insécurité alimentaire et d’autres formes de violation du droit à un niveau de vie suffisant. Les organisations de la société civile recommandent avec insistance au Canada de bonifier immédiatement le montant du Transfert canadien en matière de programmes sociaux aux provinces et aux territoires et de réserver expressément pour l’aide sociale des fonds suffisants assortis de conditions pour assurer la reddition de comptes en ce qui concerne les obligations liées aux droits, de veiller à ce qu’une approche axée sur les droits et les questions de genre soit appliquée à la stratégie nationale du Canada en matière de logement et d’améliorer l’accès à l’éducation pour les femmes autochtones.
Il reste que, souvent, la violence des hommes envers les femmes n’est pas signalée à la police et que les autorités policières et le système de justice pénale manquent à leurs devoirs envers les femmes. Des services inadéquats et sous-financés pour la prévention de la violence et le soutien des survivants, des logements à prix abordable et des refuges accessibles aux femmes qui fuient la violence, particulièrement dans les communautés rurales et nordiques, sont des violations des droits des femmes et des filles de vivre dans la sécurité, libres de violence. Selon l’Association des femmes autochtones du Canada, la violence racialisée affecte de façon disproportionnée les femmes et les filles autochtones au pays.
Les permis de travail fermés attribués à un employeur précis compliquent la situation des femmes migrantes, notamment celles qui s’occupent de soins aux enfants, qui voudraient quitter un emploi parce que l’employeur abuse de ses employés. Le Canada doit mettre fin à son utilisation de permis de travail fermés dans le Programme des travailleurs étrangers temporaires.
L’accès à l’avortement, médical et chirurgical, particulièrement dans les régions rurales et nordiques nous préoccupe beaucoup. Le Canada est l’un des seuls pays qui se soient dotés d’un régime de soins de santé dépourvu d’un programme national d’assurance-médicaments. Le coût de certains régimes médicamenteux pénalise certains groupes de femmes, notamment les femmes enceintes qui veulent avoir un avortement médical et les femmes séropositives.
Un écart de mise en œuvre important persiste entre les obligations du Canada en matière de droits fondamentaux des femmes et l’actualisation de ces droits dans les lois, les politiques et les programmes nationaux. Il est temps que notre gouvernement fédéral fasse preuve de leadership et collabore avec les provinces et les territoires pour assurer la mise en œuvre de la Convention CEDAW et qu’il lance une initiative nationale exhaustive pour faire en sorte que toutes les femmes au Canada puissent jouir des garanties que garantit la Convention.
Aboriginal Legal Services
Amnistie internationale
Barbara Schlifer Clinic
BC CEDAW Group
Canada sans pauvreté
Association canadienne des sociétés Elizabeth Fry
Alliance canadienne féministe pour l’action internationale (AFAI)
La titulaire de la chaire de gouvernance autochtone (Université Ryerson), Pam Palmater, Ph. D.
Coalition of Child Care Advocates of BC
Indigenous Women Against the Sex Industry
Mines Alerte Canada
Association des femmes autochtones du Canada (AFAC)
OXFAM
West Coast LEAF