Bulletin - Spécial COVID : prisons et COVID-19
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Ce courriel est l’avant-dernier de nos bulletins COVID-19. Notre intention, avec ces bulletins hebdomadaires, était de diffuser de l’information sous un angle particulier : celui de la COVID-19 et des inégalités que le virus a rendues encore plus criantes, celui des dysfonctionnements économiques et démocratiques de nos sociétés exacerbés par la pandémie.
Cette semaine, nous voulons mieux comprendre certaines réalités du milieu carcéral en écoutant la voix des personnes détenues. Nous voulons nous sensibiliser collectivement et développer notre réflexion critique sur le système carcéral et pénal ainsi que sur le déni absolu des droits des personnes incarcérées que la pandémie a mis en évidence.
1. Des voix suspendues : paroles des prisons
Depuis le début de la pandémie, des voix «d’en’dans» se sont levées pour dénoncer la réalité des prisons face à la COVID-19. Ces voix courageuses émanent des prisons de Joliette, de Bordeaux, Leclerc, du centre fédéral de formation et de la prison pour migrant.e.s de Laval.
Ces voix suspendues au mur des prisons et qui résonnent jusqu’à nous, nous permettent d’ouvrir les yeux et de nous interroger sur les fondements d’un système qui condamne à des sentences qui impliquent de bien plus lourdes conséquences que la privation de liberté. Si celle-ci est prévue par le code pénal, la privation des autres droits, à commencer par celui à la santé, ne fait pas partie de l’économie des peines. Déjà, que ce qui vient de facto avec la peine de prison, c'est la rupture des liens avec la famille, les proches, le travail, l'hébergement, etc. Cette double, triple et quadruple peine est réelle pour toutes les personnes incarcérées et leurs proches, même si elle n’est pas visible aux yeux des autres.
Aujourd’hui, on peut aisément affirmer qu’avec la COVID-19 et l’absence d’accès aux médecins et de mesures sanitaires appropriées, la détention rime avec risque de mort. Pas convaincu.e.s ? Il suffit de lire la plainte déposée par Robert Langevin à la mi-mars, détenu de 72 ans, malade et mort à la prison de Bordeaux dans la nuit du 19 au 20 mai. Si cet homme avait été libéré, il serait encore en vie aujourd’hui. Il est mort parce qu’incarcéré dans des conditions sanitaires inacceptables.
Des détenus récemment libérés témoignent
COVID-19 dans les lieux de détention au Québec
Au Centre fédéral de formation à Laval, un détenu est également décédé de la COVID-19. Cette prison connaît le plus grand nombre de cas depuis la mi-mars.
À la prison fédérale pour femmes de Joliette, plus de la moitié des femmes détenues ont été contaminées à la COVID-19. La première à avoir été testée positive, Joelle Beaulieu, a d’ailleurs initié un recours collectif contre Service correctionnel Canada.
Grèves de la faim et cris d’alarme nous interpellent depuis la mi-mars. Mais les dénonciations, revendications et actions ne sont pas nouvelles.
Les lettres des femmes détenues au Leclerc
Il y a 4 ans le gouvernement provincial fermait l'établissement Tanguay étant donné l'insalubrité du bâtiment. Les femmes incarcérées au provincial sont maintenant détenues au Leclerc, un ancien établissement de détention fédéral pour hommes fermé parce que trop vétuste. Plusieurs femmes ont dénoncé les conditions misérables de détention, et ce depuis sa réouverture.
Certaines des femmes détenues ont écrit des lettres pour témoigner et dénoncer les conditions de totale insalubrité dans lesquelles elles étaient détenues ainsi que les traitements dégradants qu’elles recevaient. Grâce au travail de soutien et de solidarité du groupe de femmes du Centre des femmes de Laval, certaines de ces lettres nous sont parvenues.
Nous sommes fières d’en publier quelqu’unes aujourd’hui et sommes conscientes de la somme de courage, de travail et de solidarité dont ces femmes ont fait preuve pour livrer ces témoignages et les rendre publics.
Pour aller plus loin : Féminisme, justice pénale, coronavirus et révoltes dans les prisons
Toutes les informations données dans les lettres ont été récoltées par une femme ex-détenue au centre de détention Leclerc. Au courant de l’automne-hiver 2020, nous publierons davantage de témoignages et réaliserons un dossier spécial sur femmes et prisons. Notre mission est de permettre l’accès aux connaissances sous toutes ces formes et les voix de ces femmes sont un savoir précieux pour alimenter notre réflexion sur les questions du féminisme et de la justice pénale.
La prison pour anges gardiens : le centre de détention de l’immigration de Laval
On ne cesse de chanter les louanges de ces femmes et de ces hommes immigrant.e.s qui sont en première ligne, souvent au péril de leur vie, pour soigner et prendre soin des personnes aînées et/ou malades de la COVID-19. Ces femmes et ces hommes à qui l’on ne veut pas reconnaître un statut d’immigration qui leur permettrait de vivre ici dans des conditions correctes. Ces femmes et ces hommes suffisamment «utiles» pour nous soigner mais pas pour vivre ici, au Québec, en sécurité, sans risque d’être enfermé.e.s dans une prison pour migrant.es et renvoyé.e.s dans leur pays d’origine.
Les détenu.es du centre de détention pour migrant.e.s ont entamé une grève de la faim à la fin du mois de mars pour réclamer leur libération. Grâce à la lutte de ces détenu.e.s, les autorités n’ont eu d’autre choix que de libérer les personnes détenues.
Des migrants détenus à Laval en grève de la faim
Grève de la faim de migrants en détention
2. Le balado de la semaine
« Épisode très costaud cette semaine avec le retour d’Helen Faradji à la balado; Mathieu Bélisle réfléchit sur les films catastrophe; God nous offre sa ''Laurendose'' hebdomadaire mais surtout, nous avons la chance de parler à un détenu de la prison de Bordeaux qui lance un cri d’alarme face à la pandémie qui hante les centres de détention. »
Détenu de Bordeaux, Helen Faradji, Godefroy Laurendeau et Mathieu Bélisle
3. Et toujours, sur le site du CDÉACF
a) Assemblée générale annuelle
Notre assemblée générale annuelle le 11 juin à 10 heures, en ligne. Pour s’inscrire.
b) Dossier spécial COVID-19
Voyez les nouveautés dans le dossier spécial COVID-19.
c) Les formations pour le télétravail
Nous sommes complets pour les formations. Nous réservons nos disponibilités aux groupes ayant une mission en alphabétisation.
d) Les besoins de groupes en alphabétisation
Afin de bien se préparer cet été, nous vous invitons à répondre à ce sondage sur vos besoins.
Nous voulons savoir quelles formations vous serons le plus utiles, quels outils et quelles ressources documentaires vous soutiendraient le mieux dans vos démarches.
Solidairement à vos côtés,
L'équipe du CDÉACF.
Si vous désirez recevoir notre bulletin spécial COVID, contactez-nous au bulletins@cdeacf.ca.